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Un bilan contrasté

La vigne - n°95 - janvier 1999 - page 0

Les vins alsaciens connaissent des évolutions commerciales divergentes. L'usage de la machine à vendanger devient de plus en plus limité.

Décalée : telle pourrait être la caractéristique des vins alsaciens lors de la dernière campagne. Alors que l'ensemble des vignobles français affichent des volumes et des cours à la hausse, avec des amplitudes plus ou moins élevées, les vins d'Alsace ont connu une année assez contrastée. De même, dans la majorité des autres régions, les vins en difficulté sont tirés vers le haut par les autres et parviennent ainsi à une certaine stabilité. Ce n'est pas le cas de l'Alsace où le gewurztraminer et le tokay caracolent pendant que les cours du sylvaner, de l'edelzwicker et du riesling s'effritent.' Nous sommes habitués à être en décalage avec les autres régions viticoles, analyse un vigneron. La crise de 1992-1993 ne nous a pas atteint comme ailleurs. Et aujourd'hui, nous passons à côté de l'euphorie générale. Cela tient probablement à la couleur de nos vins et à notre positionnement géographique, qui entraîne un fort taux d'exportation. 'Sur l'ensemble des exploitations viticoles, la situation financière reste néanmoins équilibrée. Les hausses des cépages porteurs compensent la baisse des vins en perte de vitesse. Toutefois, pour les exploitations spécialisées en riesling ou en sylvaner, le bilan est plus délicat. Car, en une campagne (1997-1998), le cours du riesling a chuté de 8,4 %, à 1 026 F/hl; celui du sylvaner a chuté de 13,2 %, à 705 F/hl. La baisse atteint même 20 % par rapport à la campagne 1995-1996. L'edelzwicker, pour sa part, enregistre une perte de 11,9 %, à 728 F/hl. La ressemblance entre le riesling et le sylvaner s'arrête là car de nombreux observateurs n'accordent pas le même avenir à ces deux vins. La mauvaise passe du riesling semble en effet passagère. ' Il faut se souvenir qu'il y a quelques années, c'est le gewurztraminer qui était dans une situation difficile, rappelle Thierry Schoepfer, directeur général de Bestheim (union de coopératives de Bennwirh et de Westhalten). Le goût des consommateurs évolue vers des vins plus faciles. Or, le riesling et le sylvaner sont des vins assez rustiques. Pour accroître la part de marché du riesling, il faudrait envisager une évolution de la vinification qui casse la rusticité, par un maintien de sucres résiduels par exemple. Ce dosage doit être léger car il faut se garder de faire du riesling doux. ' Pour le sylvaner, la crise semble plutôt chronique. Les vignerons ne s'y trompent pas en arrachant ce cépage pour replanter du tokay ou du pinot blanc pour faire des crémants. Le sylvaner représentait ainsi 27,3 % de la production alsacienne en 1969 contre 14,8 % en 1997 (voir tableau). Comment ce vin en est-il arrivé à cette désaffection? ' Les vignerons ne présentent plus le sylvaner à leurs clients, estimant que c'est un petit vin, avance Raymond Baltenweck, président de l'Association des vignerons alsaciens (Ava). De plus, la qualité des vins n'a pas toujours été optimale à cause des rendements excessifs. Ce vin a donc souvent été galvaudé par la grande distribution qui s'en sert comme produit d'appel. Son image s'est ainsi, petit à petit, dégradée. Enfin, il est en concurrence avec de nombreux autres vins, français et étrangers. 'D'autres vins prennent toutefois leur essor. C'est le cas des crémants, dont la production est passée de 142 000 hl en 1997 à 170 000 hl en 1998. La perspective des fêtes de l'an 2000 dope cette croissance. On observe également la relance du ' gentil ', issu d'un assemblage comprenant 50 % de cépages nobles. Actuellement la production s'élève entre 4 000 à 5 000 hl, avec un objectif de 20 000 hl d'ici à un an.Outre les cours attirés par les extrêmes, la réforme des décrets figure également parmi les points forts de l'année 1998. Un arrêté, publié au Journal officiel du 5 novembre 1998, précise que l'utilisation de la machine à vendanger est interdite pour les appellations Alsace et Alsace grand cru, suivies de la mention ' vendanges tardives ' ou ' sélection de grains nobles '.Par ailleurs, une réflexion sur les grands crus a été menée en 1998 auprès des syndicats locaux pour mettre en place un décret plus qualitatif. Un prochain décret devrait obliger l'apport de la récolte entière pour les grands crus. Ce qui sous-entend, au vu des techniques actuelles, l'interdiction de la machine à vendanger. Toujours dans le registre des changements, la motion d'interdiction d'épandage de boues de station d'épuration, de papeterie et des composts d'origine ménagère a été votée lors de l'assemblée générale de l'Ava en mars 1998. L'Alsace rejoint ainsi la Champagne pour demander à l'Inao d'inscrire cette interdiction dans ses décrets.Enfin, la région travaille sur les appellations intermédiaires en s'interrogeant sur le statut à donner aux lieux-dits. ' L'Inao place les lieux-dits entre l'appellation de base et les grands crus ', explique Jean-Paul Goulby, directeur de l'Ava. Mais les opérateurs locaux s'interrogent : est-ce intéressant pour l'image des vins d'Alsace d'ajouter cette mention à celle du cépage, au risque d'entraîner une certaine confusion auprès des consommateurs non avertis?Autre dossier en amont, la recherche de droits de plantation constitue l'une des tâches de l'année 1999. Sur les 136 ha de vignes à planter en 1999, 55 ha devront être achetés aux autres régions viticoles. Ce qui sous-entend de belles discussions en perspectives!L'Alsace cherche à accroître sa surface viticole mais pourrait se voir prochainement amputer de 8 ha à Châtenois. Le problème de la contournante de la RN 59 reste d'actualité. Les divergences d'intérêts entre les différentes communes concernées semblent prévaloir sur le tracé le plus cohérent qui, de plus, épargne les vignes. De délicates négociations en vue...

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