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Nouveaux décrets et reconquête des marchés

La vigne - n°95 - janvier 1999 - page 0

Avec de nouveaux décrets, le lancement d'une marque certifiant une culture raisonnée (Terra Vitis) et une meilleure santé des cours, le Beaujolais retrouve le sourire. Mais la flambée de certains vins pourrait de nouveau fragiliser la région.

Sur la lancée de 1997, l'année 1998 restera celle des réformes et de la reconquête des marchés pour le Beaujolais. ' Il est encore prématuré d'affirmer que nous sommes sortis de la crise, précise un vigneron. Il reste encore certains points à améliorer, en premier lieu la recherche d'une meilleure rentabilité pour les beaujolais et beaujolais villages. 'Sur le plan économique, la campagne 1997-1998 avait commencé avec des cours moyens, aux alentours de 2 054 F/pièce (950 F/hl) pour le beaujolais et de 2 230 F/pièce (1 038 F/hl) pour le villages. Puis les prix ont commencé à grimper dès janvier pour augmenter de façon significative en mai-juin, sur des volumes toutefois limités. Mais le ton était donné et les stocks au 31 août dernier étaient bas, représentant seulement 2,5 % de la récolte 1997.La nouvelle campagne a logiquement démarré de façon très dynamique pour atteindre une activité record en octobre 1998. La consigne des différents opérateurs était de fixer le cours du beaujolais à 2 700 F la pièce (215 l) et à 3 000 F la pièce de beaujolais villages. Dans les faits, ces prix ont été largement dépassés, ce qui fait craindre à bon nombre de professionnels la perte de certains marchés. ' Il est très difficile de maîtriser les prix, surtout lors d'une forte demande comme celle que nous connaissons pour les primeurs, estime un responsable local. Le problème, c'est que notre niveau de prix va induire le désintérêt de certains acheteurs et il nous faudra à nouveau beaucoup d'énergie pour les reconquérir. 'La création d'un fonds de stockage (50 000 hl) en juin 1997 avait suscité de nombreuses interrogations à l'époque. La majorité des vins bloqués étaient vendus au début de l'année 1998 et, début septembre, il ne restait plus que quelques lots à commercialiser... Preuve du succès de cette initiative, bien aidée par la remontée imprévue des demandes. La majorité des intervenants veulent toutefois éviter ce genre de structure, coûteuse (10 F/hl) et contraire à la logique des marchés.Les beaujolais primeurs représentent toujours le gros des ventes, avec 50 % des volumes du beaujolais (575 000 Mhl au global en 1997-1998), mais ' la période du printemps commence à exister pour tous les beaujolais ', commente Michel Déflache, directeur de l'interprofession. La communication ' Beaux jours Beaujolais ', mise en place en 1996, est à l'origine de ce rééquilibrage progressif des ventes tout au long de l'année.Sur un budget total de 25 MF, l'interprofession consacre 6 MF à cette action. La communication est relayée par la présence des vignerons dans les linéaires des grandes surfaces pour un week-end d'animation. 230 producteurs sont ainsi mobilisés, encadrés par des vignerons formés à la manière d'aborder un client potentiel et de lui parler du vin.' La présence des vignerons dans les rayons constitue un véritable électrochoc au sein de l'appellation, poursuit Michel Déflache. Ces deux jours valent toutes les formations sur le fonctionnement des GMS, la concurrence avec les autres vins ou encore la difficulté de convaincre un client. ' La part de la vente directe reste d'ailleurs assez faible dans la région (15 à 20 % au total), même si les volumes progressent. Lors de la dernière campagne, 214 000 hl (toutes appellations confondues) ont été commercialisés en direct contre 170 000 hl en 1995-1996. L'objectif de l'appellation serait d'atteindre 20 à 25 % pour la vente directe, de façon à stabiliser les prix et à rééquilibrer le rapport de force entre les différentes familles. La belle progression des cours en vrac risque toutefois de faire diminuer la part de la vente directe, le vrac étant alors bien rémunérateur.Dans un tel contexte, la reprise des plantations n'est pas envisagée. Du côté des crus, les cours restent sur une tendance très dynamique, ce qui inquiète une partie des opérateurs de ce secteur, comme en témoigne l'éditorial de Maurice Large, président de l'UIVB dans la revue Beaujolais : ' L'envie de transgresser les règles élémentaires du bon sens est plus forte que celle de construire ensemble et d'assurer l'avenir. L'incapacité à donner une orientation au marché des crus peut nous faire craindre le pire. Souvenez-vous de 1989! 'L'année 1998 aura également été marquée par la création du premier centre de vinification au Perréon par les établissements Loron. Ce centre, créé pour vinifier des beaujolais villages de garde, s'adresse principalement aux vignerons en manque de trésorerie pour investir en matériel de vinification et à ceux dont la vigne n'est pas l'activité principale. Pour la première année, sa capacité de vinification s'est élevée à 1 600 hl. Le paiement du raisin s'effectue sur la moyenne du cours à la fin du mois de mars, avec des acomptes versés entre temps.Cette installation montre l'intérêt croissant des négociants pour l'amont et leur souhait de vinifier eux-mêmes pour répondre aux attentes des acheteurs. Dans le même ordre d'idée, le négociant SNJP a mis en place une charte de qualité avec des caves coopératives et des vignerons.Cette volonté de mieux produire n'est pas l'apanage de quelques intervenants, comme en témoigne la publication d'un nouveau décret d'appellation en octobre dernier, qui met un terme à une gestation longue de quatre à cinq ans. Le changement de décret vise à asseoir la qualité des vins dans le long terme, contrecarrant ainsi les commentaires selon lesquels trop de beaujolais sont vinifiés pour être primeurs et n'ont plus trop de tenue quelques mois plus tard.Le nouveau décret fixe le rendement d'appellation du beaujolais à 64 hl/ha, celui des beaujolais villages à 60 hl/ha et celui des crus à 58 hl/ha. En cas d'année exceptionnelle et selon la santé économique des appellations, l'Inao permettra d'ajouter 1 à 5 hl/ha au rendement d'appellation. La notion de rendement maximum de production (RMP) a également été mise en place : en cas de dépassement d'une certaine limite, tous les volumes récoltés dans l'appellation concernée seront déclassés. Les parcelles non récoltées sont sorties de la surface d'exploitation. Désormais, les vignerons du Beaujolais devront raisonner leur rendement à la parcelle et non plus sur l'ensemble de leur exploitation.La filière se mobilise en amont, mais ne délaisse pas pour autant l'aval de la production. L'export enregistre des progressions importantes. Cette belle notoriété génère des contrefaçons. A la suite des succès obtenus en Australie et aux USA, l'interprofession s'attaque à l'Argentine, où des millions de bouteilles de faux beaujolais sont vendues.

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