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archiveXML - 1999

Une appellation ne peut jamais avoir un caractère générique

La vigne - n°96 - février 1999 - page 0

La Justice a condamné un metteur en marché qui apposait sur son matériel publicitaire, la marque ' Atrium Cahors ' alors que le vin ne provenait pas de ce vignoble. Les tribunaux désapprouvent toujours ce procédé qui entraîne une confusion.

Les négociants et les distributeurs de vin imaginent les notions susceptibles d'éveiller l'attention, de solliciter l'envie de l'acheteur. Ils connaissent l'intérêt que représente l'image plus ou moins consciente du vigneron vinifiant sa récolte, le tout dans une consonance de pays ' viticoles ', de terroirs connus pour leur production.Fort de cette connaissance et des exigences du marketing, un distributeur mettra sur pied une organisation commerciale, apte à faciliter le choix de ses marchandises, tant par les restaurants que par les particuliers. Sur les cartons d'emballages de son produit et sur le matériel publicitaire, il faisait état d'une marque, Atrium Cahors, et de la mention ' propriétaire récoltant '. Peut-être dénoncé et, en tout cas, poursuivi par le procureur de la République, il sera déféré devant le tribunal correctionnel et condamné pour publicité mensongère.Devant la cour d'appel, on discutera du fondement de la prévention sur les deux points qui la soutiennent. La première difficulté consiste dans l'utilisation de la dénomination ' propriétaire récoltant '. Il est d'abord affirmé qu'il n'y a pas de réglementation spécifique concernant cette mention. Il convient donc, dans cette hypothèse, de se référer au sens usuel des termes et lorsqu'on parle de propriétaire en matière agricole, on s'en rapporte au bien foncier. Donc, le vin doit provenir d'un bien foncier approprié et le terme ' récoltant ' s'applique à celui qui cultive et récolte les fruits de sa production. Il s'en déduit que, pour que soit mentionnée légalement l'appellation ' propriétaire récoltant ', la preuve doit être rapportée que le vin vendu provient d'une propriété dont le titulaire exploite le vignoble et vinifie la récolte.On reprochait ensuite au distributeur d'avoir fait référence au terme ' Cahors ', même adjoint à un mot neutre ' Atrium '. S'il est vrai que Cahors est un lieu, il correspond à une appellation d'origine contrôlée. Or, une AOC ne peut jamais être considérée comme présentant un caractère générique et, de ce fait, ne peut pas tomber dans le domaine public. En conséquence, l'utilisation de ' Cahors ' crée une confusion avec l'AOC, faisant croire que les vins commercialisés sous la marque ' Atrium Cahors ' proviennent de ce vignoble et ont des qualités semblables à celles.La publicité était donc bien mensongère, de nature à créer une confusion entre le vin offert à la consommation et celui bénéficiant de l'AOC. Il est vrai que le prévenu avait, devant le tribunal, invoqué l'article 122-3 du nouveau code pénal, qui dispose que ' n'est pas pénalement responsable la personne qui justifie avoir cru, par une erreur sur le droit, qu'elle n'était pas en mesure d'éviter pouvoir légitimement accomplir l'acte '. Mais là, il se heurtait à l'interprétation du nouveau texte par la Cour de cassation, qui affirme que ne peut invoquer l'article 122-3 CP, celui qui se prévaut de l'erreur sur la portée d'un texte législatif ou réglementaire, erreur qui pouvait être évitée par une consultation auprès de l'autorité compétente. Il est à noter du reste qu'en son temps, nous avions évoqué l'utilisation abusive de la notion ' Rosé de Provence '...On retrouve dans ce contentieux les échos de la réglementation inscrite dans l'article 115-3 du code de la consommation, qui donne pouvoir au règlement d'interdire de faire figurer sur les produits autres que ceux bénéficiant de l'AOC ou sur les emballages qui les contiennent et les étiquettes, papiers de commerce ou factures qui s'y réfèrent, toute indication pouvant provoquer une confusion l'origine des produits. De même, dès lors qu'il ne s'agit pas d'une appellation contrôlée, telle que visée à l'article 115-2 du code de la consommation, il est interdit d'utiliser les mots comme ' château ', ' domaine ' et toute expression analogue.On y discerne aussi les impératifs contenus dans le règlement communautaire du 24 juillet 1996, modifiant celui du 24 juillet 1989 tendant à éviter, dans l'esprit du consommateur, une confusion sur l'origine véritable du vin. Dans ce texte communautaire, il est affirmé la nécessité pour les vins de table de faire connaître le nom de l'exploitation viticole où le vin a été obtenu et, comme l'a retenu la cour d'appel, la référence au mot ' propriétaire récoltant ' ne correspond pas à la norme exigée. Il s'en déduit, tant pour les producteurs que pour les négociants, la nécessité de tenir compte d'une différence fondamentale entre les appellations d'origine et les vins de table.Références : cour d'appel d'Agen, 15 janvier 1998, JCP, édition générale 3 232.

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