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La sélection clonale

La vigne - n°96 - février 1999 - page 0

La première étape, réalisée par l'Inra, l'Entav (Etablissement national technique pour l'amélioration de la viticulture) ou ses sections régionales et leurs partenaires, est la prospection au vignoble afin de repérer des plants potentiellement intéressants. En plusieurs passages, le sélectionneur vérifie visuellement que le plant est sain, exempt de court-noué, et présente des qualités agronomiques intéressantes (petites grappes, rendement modéré, grappes lâches défavorables à la pourriture, etc.). Une fois les clones présélectionnés, ils sont transférés à l'organisme sélectionneur pour y être étudiés. La seconde étape est la sélection sanitaire au cours de laquelle on contrôle que le plant est indemne des principales viroses : court-noué, enroulement et, éventuellement, marbrure, maladie de l'écorce liégeuse et cannelure du tronc. Pour cela, on dispose de tests sérologiques performants, les tests Elisa, fondés sur une réaction du virus recherché avec un anticorps spécifique. Ces tests sont rapides, permettent d'écarter immédiatement les souches contaminées, mais la méthode officielle pour l'agrément des plants demeure l'indexage. Le principe de l'indexage est de greffer le plant à tester sur une variété ' indicatrice ', qui extériorise bien les symptômes spécifiques de la maladie à dépister. A titre d'exemple, pour le court-noué, cette variété est un porte-greffe, le rupestris du lot. Pour l'enroulement, on peut utiliser le cabernet sauvignon, le cabernet franc, le pinot ou le merlot. Pour l'indexage, on fera soit un greffage ligneux, soit un greffage herbacé, qui permet une expression plus rapide des symptômes, en chambre climatique et en serre. Globalement, la sélection sanitaire peut durer trois ans. Pour l'instant, le dépistage des maladies à phytoplasme (flavescence dorée) n'est pas compris dans les conditions de certification. Toutefois, l'Entav peut être amené à traiter les bois à l'eau chaude lorsqu'il existe un risque de contamination (provenance d'une parcelle touchée), voire de façon préventive sur le matériel de prémultiplication. Dès la détection du virus, les plants contaminés sont éliminés. Toutefois, si on souhaite sauver un clone particulièrement rare ou intéressant, une parade existe. Les très jeunes tissus de l'apex sont exempts de virus. En les mettant en culture in vitro, en les maintenant à 40°C, sous une lumière artificielle pendant trois mois, on parvient à reconstituer un plant identique et sain. ' Ce n'est pas nécessairement intéressant : on a sélectionné le plant pour son rendement modéré, qui était dû à la virose. Une fois assaini, il faudra le réévaluer et, peut-être, ne présentera-t-il plus d'intérêt ', tempère un professionnel. L'évaluation qualitative des clones nécessite des expérimentations longues et rigoureuses. C'est le deuxième volet de la sélection. Sur une collection de clones ayant satisfait aux tests sanitaires, on étudie pendant cinq ans au moins la phénologie, la récolte et les vins obtenus par microvinification. A l'issue de ces études, un dossier d'agrément est présenté au CTPS (Comité technique permanent de la sélection des plantes cultivées, section vigne), qui évalue l'intérêt de l'inscription au catalogue. Par la suite, l'évaluation des clones dans des domaines expérimentaux d'organisations professionnelles et interprofessionnelles, et à plus grande échelle (100 souches au minimum, 8 répétitions), permet d'améliorer la connaissance de leurs aptitudes et d'affiner les préconisations dans les conditions locales.Les clones ont été accusés de tous les maux : forte production au vignoble, sensibilité à la pourriture, etc. ' Il faut comparer ce qui est comparable, à âge, conduite et état sanitaire identiques ', rappelle un professionnel. Une vieille parcelle de sélection massale, très court-nouée, produira moins qu'une jeune sélection clonale, saine et abondamment fumée à la plantation. Même s'il est vrai que les premiers clones sélectionnés l'étaient surtout vis-à-vis du court-noué, la ' deuxième génération ' de clones l'est dans des objectifs qualitatifs plus stricts, à la demande de la profession. Toutefois, les prospections sont à poursuivre... ' Pour le pinot noir, la population est très hétérogène : il n'existe pas de clone idéal. Nous recommandons donc de planter plusieurs clones, mais séparés dans la parcelle, afin d'adapter à chaque clone la taille et les opérations culturales. Schématiquement, certains clones donnent plus de couleur, d'autres plus de finesse et d'arômes. L'idéal est de les assembler, explique Jean-Michel Menand, de l'Association technique viticole de Bourgogne. Nous poursuivons les prospections. La plupart des clones de pinot dont nous disposons sont des ?gros pinots? productifs et, finalement, il ne reste que 4 ou 5 clones de pinot moyen, recommandés pour la Bourgogne, entre lesquels les vignerons peuvent choisir. Pour le chardonnay, le problème est identique. Notre but est d'élargir le choix. Il faudrait pouvoir classer les clones en trois niveaux pour le pinot (appellations régionales, villages, grands crus) et, à l'intérieur de chaque niveau, disposer d'une vingtaine de clones. Pour cela, nous disposons encore de très vieilles parcelles de sélection massale à prospecter. Mais la sélection est ardue car 80 % des plants sélectionnés en l'absence de symptômes visuels sont virosés. ' Le gros inconvénient de la sélection clonale est donc le manque de choix pour certains clones. Pour le riesling, le viognier et la marsanne, un seul clone est disponible. ' Il nous est difficile d'isoler des clones intéressants du vignoble de Condrieu, dont une majorité est touchée par le court-noué et l'enroulement ', précise Laurent Audeguin, de l'Entav.

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