Retour

imprimer l'article Imprimer

archiveXML - 1999

Le grenache au gré des terroirs

La vigne - n°98 - avril 1999 - page 0

Selon les millésimes et les terroirs, le grenache présente des caractéristiques aromatiques, de couleur et de structure très variables. L'Institut rhodanien (Vaucluse) travaille à comprendre ce cépage.

Au Comité interprofessionnel des côtes du Rhône, Gilles Masson a travaillé sur la composition polyphénolique du grenache. La plus importante de ses anthocyanes est le 3-glucoside de malvidol, qui représente 75 % des anthocyanes totales en moyenne. Sa prédominance serait l'une des raisons du caractère oxydatif du grenache : sensible à la température, elle s'oxyde facilement. A la suite d'analyses quantitatives des polyphénols du grenache, Gilles Masson a constaté une forte variabilité entre millésimes et surtout entre parcelles, puisque les teneurs varient du simple au triple pour les composés phénoliques totaux, voire plus pour les anthocyanes, ce qui est associé à une gamme de couleurs très large.Par ailleurs, il a suivi la corrélation entre précocité et couleur sur les 24 parcelles de l'observatoire grenache de l'Institut rhodanien entre 1996 et 1998. Les parcelles précoces sont caractérisées par leur situation méridionale et leur faible altitude, les tardives sont à une altitude plus élevée et situées en limite nord de la culture du grenache. Si on classe les vins issus de vinifications à l'échelle pilote en trois couleurs, on s'aperçoit que la répartition s'effectue selon un gradient presque identique au premier, les vins les plus colorés étant généralement issus des parcelles les plus tardives.Toutefois, la correspondance entre les deux cartes n'est pas parfaite, preuve que d'autres facteurs jouent aussi un rôle. ' En 1998, nous avons à nouveau observé cet effet de précocité, mais la différence entre les terroirs précoces et tardifs était moindre en raison du stress hydrique, particulièrement fort dans les zones précoces, qui a concentré les raisins et a donné des couleurs intéressantes ', explique Gilles Masson. Ces travaux devraient permettre de mieux raisonner la plantation du grenache : les situations les plus chaudes ne sont pas celles qui lui conviennent le mieux. Ensuite, ils donnent des éléments pour anticiper le millésime. Des millésimes à faible stress hydrique, comme 1996 et 1997, sont généralement associés à de faibles teneurs en polyphénols; ils devront être vinifiés différemment des millésimes à fort stress hydrique et forte maturité phénolique, pour lesquels on privilégiera les macérations longues.Les arômes du grenache ont également fait l'objet d'une étude approfondie, qui a montré que les millésimes et les terroirs influaient beaucoup sur les arômes variétaux. Plutôt que les arômes, ce sont les précurseurs aromatiques, ou arômes liés, qui ont été dosés. ' Le grenache est riche en précurseurs : dans les baies, nous avons trouvé 24 composés libres et 84 composés liés, ce qui est supérieur aux autres cépages, même rouges. Au cours de la fermentation alcoolique et de l'élevage, ils seront libérés ou non. Leur teneur représente le potentiel de vieillissement du vin ', explique Jean-François Ormières, du Comité interprofessionnel des vins des côtes du Rhône.Par ailleurs, une dizaine de composés ont été identifiés, qui sont les plus discriminants pour mettre en évidence les effets du terroir et du millésime sur la teneur en précurseurs du grenache. Aucune molécule ne semble spécifique à ce cépage. La zingérone, caractérisée par une note de gingembre, épicée et florale, ressort en quantités assez élevées, mais on la trouve aussi en quantité moindre dans d'autres cépages. ' Le grenache est très réactif aux conditions de production : il s'exprime selon le stress hydrique, le terroir, et on peut mettre en évidence des différences dans les teneurs de précurseurs aromatiques.Par exemple, 1996 et 1997 ont été des années atypiques, avec des vins peu tanniques, à tendance oxydative. Elles ont été marquées par des teneurs en précurseurs des arômes de chocolat chaud, de poivre et épice pour 1996, ou punaise et floral pour 1997. Le millésime 1995, plus marqué par les polyphénols, était caractérisé par de plus fortes teneurs en précurseurs d'arômes floraux, fruités et animaux ', poursuit Jean-François Ormières. Que ce soit pour les polyphénols et les arômes, le grenache a donc de multiples profils selon les millésimes et les terroirs.

Cet article fait partie du dossier

Consultez les autres articles du dossier :

L'essentiel de l'offre

Voir aussi :