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archiveXML - 1999

Les acaricides perdent du terrain

La vigne - n°101 - juillet 1999 - page 0

Dans plusieurs régions, les pullulations d'acariens se font rares. L'usage d'insecticides moins perturbateurs de la faune auxiliaire a permis de rétablir un équilibre entre les acariens et leurs prédateurs, les typhlodromes.

Les araignées rouges deviennent une curiosité, lance un conseiller bourguignon. ' Il y a quelques parcelles où les populations d'acariens sont à surveiller, notamment celles sans typhlodromes, poursuit un technicien angevin, mais d'une façon générale, les araignées sont en nette régression grâce à la lutte intégrée. ' Le constat est similaire en Alsace, en Champagne, en Beaujolais...La situation est-elle générale? Pas tout à fait. Cependant, à l'échelle nationale, les firmes phytosanitaires notent une nette diminution de l'usage des acaricides. Entre 1996 et 1998, on est passé de 400 000 à 300 000 ha traités (si 1 ha est traité deux fois, il est comptabilisé deux fois). ' On observe en viticulture ce que l'on a connu en arboriculture il y a quelques années, commente Pascale Dapilly-Montégut, d'AgrEvo. Cela a été possible notamment grâce à un choix des produits intégrant le respect des typhlodromes, concomitant avec le développement des régulateurs de croissance, insecticides plus respectueux de cette faune auxiliaire ', considère-t-elle.L'Alsace est sans doute le vignoble français le plus en avance sur ce point. ' Chez nous, depuis une dizaine d'années, il y a un abandon quasi-total des traitements acaricides ', témoigne Jean Swach, de la chambre d'agriculture du Haut-Rhin. Des applications de pyréthrinoïdes contre les tordeuses avaient fortement perturbé les populations de typhlodromes et provoqué des pullulations d'acariens.Ces observations, à la fois expérimentales et pratiques, ont conduit les conseillers à modifier leurs discours. ' On a dit aux gens d'arrêter les pyréthrinoïdes et les acaricides, poursuit Jean Schwach. Certains ont d'abord été réticents, mais pour ceux qui ont suivi le conseil, le résultat fut pratiquement immédiat. Quelques-uns utilisent encore des produits comme Talstar (un pyréthrinoïde) sur des superficies très faibles, une fois par an, mais cela n'engendre pas de déséquilibre irréparable. C'est du cumul des agressions que naît le déséquilibre. 'Dans le vignoble alsacien, on trouve aujourd'hui bien d'autres auxiliaires que les typhlodromes : des chrysopes, des coccinelles...C'est aussi le cas en Beaujolais. 'L'écosystème se reconstitue petit à petit', témoigne Caroline Leroux, du comité de développement du Beaujolais. En 1989, au début de la lutte raisonnée, 100% des parcelles ainsi protégées recevaient un traitement acaricide. En 1998, seulement 5% étaient dans ce cas. ' Même dans les parcelles nouvellement intégrées aux groupes de lutte raisonnée, la population de typhlodromes est suffisante, poursuit Caroline Leroux. C'est l'abandon des pyréthrinoïdes et l'utilisation de Cascade qui ont favorisé ces colonisations. '.En Champagne, ' les problèmes d'acariose sont en chute libre depuis trois ou quatre ans, indique Christèle Rinville, au CIVC. A quelques exceptions près, on n'utilise plus d'acaricides. ' Pour elle, c'est surtout la démarche de lutte raisonnée, entamée depuis cinq ans, qui porte ses fruits, entre autres la confusion sexuelle, utilisée aujourd'hui sur 15% du vignoble champenois.En Aquitaine, la prise de conscience a été plus tardive. Cependant les habitudes évoluent. ' Cela se ressent sur les ventes d'acaricides spécifiques, dans le choix des fongicides et des insecticides ', juge Thierry Coulon, à l'ITV de Bordeaux. Cependant, à la Protection des végétaux de Midi-Pyrénées, le discours est différent. ' On voit encore des acariens, explique Monsieur Chapelle. A l'exception du secteur chasselas de Moissac, les vignerons font moins attention aux typhlodromes que les arboriculteurs. En viticulture, la protection intégrée est encore balbutiante. 'Préserver les typhlodromes devient une opération délicate lorsque la lutte contre la cicadelle vectrice de la flavescence dorée est obligatoire. ' On est dans une impasse technique, juge M. Trespaillé, de la Protection des végétaux du Languedoc-Roussillon. Il n'y a pas de produit à la fois homologué contre la cicadelle et amical vis-à-vis des typhlodromes. ' Cependant, il souligne que ' les problèmes d'acariens ne sont pas à relier aux traitements contre la cicadelle. Les pullulations peuvent avoir de multiples causes. Un lien existe, mais il n'est pas unique '.' Dans l'Aude, nous n'avons jamais été de grands utilisateurs d'acaricides, poursuit Richard Planas, de la chambre d'agriculture. Cependant, nous avons de plus en plus de dégâts d'acariens. Je pense que c'est lié à la généralisation depuis dix ans des traitements insecticides dans une région où, auparavant, ces produits n'étaient pas utilisés. Un équilibre a été rompu, il a des difficultés à se rétablir. 'La chambre d'agriculture de l'Aude a cherché une stratégie de lutte contre la flavescence dorée moins préjudiciable pour les populations de typhlodromes. Deux organophosphorés, Dursban et Ekalux, ont montré les effets les moins dépressifs sur ces auxiliaires. En revanche, des pyréthrinoïdes, comme Karaté ou Sherpa, sont apparus plus favorables au développement des acariens jaunes. Face à la flavescence dorée, on peut donc utiliser des organophosphorés ' tolérés ' par les typhlodromes ou choisir de maîtriser à la fois la cicadelle et les acariens jaunes avec des produits moins respectueux de la faune auxiliaire, comme Sigona, associant un régulateur de croissance et un pyréthrinoïde, ou encore le mélange de Sherpa (0,3 l/ha) avec Cascade (0,4 l/ha). Cette année, les expérimentations se poursuivent avec un pyréthrinoïde, un organophosphoré et un produit associant les deux.

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