La vendange par tries permet de ne ramasser que la portion de grappe arrivée à parfaite maturité. Une grande leçon de patience...
Dans les années quatre-vingt, nous faisions en général deux ou trois passages. En 1989 et 1990, la qualité a été exceptionnelle. Nous avons essayé par la suite de retrouver ce niveau, ce qui nous a amené à mieux raisonner nos tries, explique Jean-François Vaillant. La première difficulté a été de différencier la pourriture grise de la pourriture noble et de bien identifier les différents stades d'évolution du raisin. Il a ensuite fallu faire passer le message aux vendangeurs. Généralement, ce sont les mêmes qui reviennent d'une année sur l'autre, ce qui simplifie les choses. 'Pour mieux les sensibiliser, nous leur faisons aussi découvrir les produits qui résultent des différentes tries', ajoute-t-il.La production de vins liquoreux se raisonne bien avant les vendanges. 'Le chenin est un cépage sensible à la pourriture grise. Il faut prendre des mesures préventives pour éviter son installation. Cela commence par une bonne maîtrise de la vigueur. Depuis trois ans, nous effeuillons entre le début de la nouaison et la fermeture de la grappe des deux côtés du rang et nous obtenons d'excellents résultats.''Le chenin étant productif, nous taillons court afin d'atteindre 40 à 50 hl de rendement avant les tries, sachant que l'on perd ensuite 50% du volume. Si la charge est trop importante, nous éclaircissons vers la fin juillet.'Lorsque l'année est pluvieuse et que malgré les précautions prises, la pourriture grise apparaît, il faut procéder à des tries de nettoyage pour enlever les parties pourries et éviter la propagation de la maladie. Ce fut le cas en 1998 où certaines parcelles ont même fait l'objet de deux tries de nettoyage.'La pourriture noble s'installe sur des raisins mûrs et dorés dont le degré potentiel se situe entre 13 et 15% vol. On passe ensuite au stade pourri plein, puis rôti. Pour chaque trie, nous nous décidons la veille ou l'avant-veille en fonction des observations faites sur chaque parcelle. Ce sont les meilleurs critères de décision qui existent. Il faut être patient pour attendre la maturité optimale et ne pas paniquer à la première averse. En effet, on court toujours le risque de voir la pourriture noble s'abîmer et le gris s'installer, ce qui endommage la trie. Il nous est arrivé dans ce cas de faire un passage avec deux seaux chacun, l'un pour récolter le noble qui reste, l'autre pour enlever le gris. A ce stade, il semble préférable de ne pas laisser les parties de grappes atteintes par la pourriture grise au sol car cela peut servir de source de contamination pour le raisin encore sur les souches.'Chaque année a permis d'affiner les connaissances et donc les produits. Aujourd'hui, le Gaec Vaillant produit trois cuvées de coteaux du Layon et deux de Bonnezeaux (trois les années exceptionnelles). Le raisin est récolté entre les stades pourri plein et rôti avec des degrés potentiel de 20 à 25% vol. Le nombre de tries varie de quatre à huit selon les millésimes et chacune est vinifiée séparément. 'Nous travaillons en pressurage pneumatique avec une montée en pression très lente ; le cycle dure 4 à 5 heures. Le moût est débourbé puis fermenté en cuves ou en fûts selon les lots. Les assemblages se font en fin de fermentation avant la période d'élevage. Nous nous appuyons sur la dégustation et travaillons avec l'aide d'un oenologue. Selon la richesse des millésimes, nous aurons plus ou moins de volume dans la cuvée haut de gamme'.Mais la récolte par tries successives n'est pas réservée aux vins liquoreux. Depuis 1993, l'anjou blanc du domaine est récolté aux stades raisins dorés et début de pourri plein entre 14 et 15% vol. potentiel. Généralement, deux tries suffisent. Elles sont vinifiées séparément et assemblées plus tard car Jean-François Vaillant estime qu'ainsi, elles conservent mieux leurs caractéristiques de départ. En principe, tout le sucre est transformé et on obtient un vin blanc sec, gras et très aromatique.