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Levures et terroir : des liens à préciser

La vigne - n°103 - octobre 1999 - page 0

Une étude menée dans le Muscadet révèle que la microflore autochtone semble ne pas pouvoir être considérée comme un élément direct du terroir.

La généralisation des levures sèches actives génère des peurs. Les vins vont-ils perdre leur identité? On peut prendre le problème autrement et se demander si la levure indigène joue un rôle dans la notion de terroir. Le centre ITV de Nantes a réalisé pendant trois ans, sur quatorze parcelles en appellation Muscadet, une étude de la flore levurienne autochtone. Mille souches ont été isolées et génétiquement caractérisées. Cette étude révèle que, même si le rôle organoleptique de la levure n'est plus à démontrer, celle-ci ne peut être raisonnablement considérée comme un élément objectif du terroir. On n'obtient pas un meilleur respect de la typicité avec une fermentation spontanée.Sur les trois années d'étude, la fermentation s'est déroulée selon le même schéma. Après le débourbage, la microflore est caractérisée par la présence de plusieurs souches de levures oxydatives, et surtout différents individus de Kloeckera apiculata. Cette situation peut engendrer des problèmes oenologiques uniquement si les fermentations tardent à démarrer, ce qui n'a pas été le cas dans les essais.Puis, se développe un nombre important de souches différentes de Saccharomyces cerevisiae (entre 10 et 20), mais seulement une ou deux se dégagent comme dominantes, soit par leur importance numérique (en moyenne 50% de la population levurienne), soit par leur présence tout au long de la fermentation. Les souches minoritaires n'apparaissent que sporadiquement, pendant deux à quatre jours, en fonction des conditions du milieu, semble-t-il, et notamment de la teneur en alcool.La fermentation alcoolique spontanée se singularise donc par une grande variété de levures minoritaires, supplantées par une population d'une à deux souches majoritaires. Cependant, même si l'organisation générale perdure, l'identité génétique des souches retrouvées varie d'une année à l'autre pour une même parcelle, et d'une parcelle à l'autre pour une même année.L'étude des composés produits pendant ces fermentations n'a pas permis de mettre en évidence de relation directe entre l'apparition d'une souche et la concentration d'une substance dans le milieu. Les souches minoritaires, qui pour la plupart ne dépassent jamais 20%, ne semblent pas influer de manière sensible, sauf cas particuliers, sur les caractéristiques majeures du vin et sur sa complexité. C'est la souche dominante qui détermine les caractéristiques générales du vin.Cette étude révèle également que les levures issues de parcelles connues pour leurs problèmes fermentaires montraient chaque année des capacités fermentaires insuffisantes ou inopportunes. L'incidence du levurage sur la flore indigène a été évaluée. Deux ensemencements ont été réalisés, l'un à l'aide d'une préparation commerciale, l'autre avec la levure indigène dominante de l'année précédente.Dans les deux cas, la souche ensemencée est présente tout au long de la fermentation alcoolique de manière quasi exclusive. La grande diversité constatée en fermentation spontanée n'est donc pas respectée.Au regard de cette étude, pour le vignoble nantais, il apparaît difficile d'affilier à une situation géographique ou à un terroir une microflore active sur un moût en fermentation. A la cave et à la vigne, de multiples facteurs peuvent modifier ou imposer une microflore à un moût donné. Aucune règle ne semble prévaloir, les mesures d'hygiène classiques sont sans aucun doute insuffisantes pour préserver une éventuelle population levurienne originelle, elle-même dépendante des conditions culturales au vignoble.Tout se passe comme si la microflore autochtone ayant participé à la fermentation était issue d'un réservoir de souches, plus ou moins adaptées à l'environnement vitivinicole et à ses pressions de sélection. La prédominance des souches fluctuerait selon les changements advenus au vignoble et au chai.

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