Après s'être implantée sur la Côte-d'Azur et en Corse, Metcalfa pruinosa progresse dans la vallée du Rhône et le Languedoc-Roussillon, et apparaît en Midi-Pyrénées.
J'ai observé pour la première fois Metcalfa sur une parcelle de 8 hectares en 1996. Trois ans après, elle avait colonisé les 72 ha du domaine, constate Didier Auboire, du château Beauferan (Bouches-du-Rhône). Pour l'instant, je n'ai pas eu de dégâts notables. Mais les adultes produisent un miellat abondant qui attire les insectes, en particulier les drosophiles. Leur pullulation pourrait nuire à la qualité du raisin en favorisant la pourriture acide. C'est un risque à prendre au sérieux.L'an dernier, il a contenu la population d'adultes grâce aux effets secondaires d'un traitement avec du Karaté contre la deuxième génération des vers de la grappe. Cette année, il est intervenu en juin avec le même produit. L'efficacité a été bonne sur les larves, qui se trouvaient entre les stades L2 et L3, bien localisées au niveau des grappes. Mais il a constaté une recolonisation par des adultes présents dans les haies, quinze jours après le traitement. La population a ensuite continué à se développer jusqu'au 15 juillet, sans influence négative sur l'état sanitaire des baies.Très polyphage, cet insecte piqueur-suçeur, appartenant à une famille voisine de celle des cicadelles, les flatides, ne se développe pas que sur les vignes et les vergers. La liste des plantes sur lesquelles on le trouve occupe 17 pages! Lorsqu'il s'installe dans une région, il envahit rapidement les espaces verts, les jardins en zone urbanisée et les haies en zone agricole. 'Il est impossible d'envisager des traitements généralisés. Nous devrions disposer à court terme de possibilités de lutte chimique. Mais à moyen terme, seule la lutte biologique, avec introduction de prédateurs, pourra régler durablement le problème', souligne Pierre Speich, de la Protection des végétaux, à Avignon (Vaucluse). Repérée dès 1986 sur la Côte-d'Azur, Metcalfa pruisona est aujourd'hui présente partout dans les Bouches-du-Rhône, le Var ou les Alpes-Maritimes.'Des concentrations importantes ont été signalées dans le Vaucluse autour d'Avignon, dans le Gard autour de Saint-Gilles, dans l'Hérault à proximité de Montpellier, et en Corse autour d'Ajaccio et de Bastia. Dans les Pyrénées-Orientales, l'Aude, la Haute-Garonne et le Tarn, pour l'instant, il n'y a que des petits foyers', souligne François Faivre d'Arcier, de l'Inra de Montfavet.Les modes de dissémination ne sont pas complètement connus, mais la zone s'étend rapidement, et d'ici à quelques années, cet insecte devrait être présent dans tout le sud de la France. 'Chaque année, il apparaît dans de nouveaux secteurs et là où il était déjà installé, il se développe', constate Didier Richy, de la chambre d'agriculture des Bouches-du-Rhône. 'L'été, les adultes pullulent et forment des chapelets très impressionnants qui inquiètent les vignerons', ajoute un conseiller viticole du Var.Cet automne, l'ITV tentera d'évaluer l'incidence du miellat et de la fumagine sur la qualité des vins.Pour l'instant, aucun produit de traitement n'est homologué. Des essais ont été faits pour tester les matières actives et les stades d'intervention. Plusieurs pyréthrinoïdes donnent de bons résultats, sur les larves jeunes. Sur les larves âgées et les adultes, inutile de traiter.Ces produits sont déjà homologués contre d'autres insectes. Les firmes, qui avaient demandé cette année au ministère de l'Agriculture une dérogation pour obtenir une extension, ont vu leur dossier rejeté. 'Il faut d'abord créer un nouvel usage', souligne Pierre Speich. Plusieurs firmes travaillent dans ce sens.Dans sa zone d'origine aux USA, Metcalfa ne pose pas de problèmes car elle est accompagnée d'un cortège d'auxiliaires qui contrôlent son développement. Malheureusement, ils ne sont pas venus avec elle en Europe.'Pour rétablir un équilibre biologique, nous menons des essais d'introduction de parasites', explique Jean-Claude Malausa, de l'Inra d'Antibes (Alpes-Maritimes). En 1996, Néodryinus typhlocybae, un hyménoptère, a été lâché dans un jardin du cap d'Antibes, où il s'est bien implanté. Ce parasite se déplace assez lentement, mais une fois installé, il semble efficace. 'En Italie, dans la région de Padoue où il a été introduit il y a dix ans, il est devenu difficile de repérer le ravageur. En France, nous avons réalisé cette année une série de lâchers avec un maillage de 25 à 30 km dans toutes les zones où Metcalfa était présente. Par ailleurs, nous allons poursuivre notre prospection aux USA pour trouver de nouveaux auxiliaires, qui pourraient intervenir en complémentarité avec Néodryinus', conclut Jean-Claude Malausa.