En deux ans, deux produits de lutte contre le pourridié ont été homologués. Ils permettent de traiter le sol nu avant plantation ou les zones infestées sur la vigne en place.
Le principal champignon responsable du pourridié s'appelle Armillaria mellea. Il s'attaque à la vigne mais aussi aux arbres fruitiers, aux chênes, peupliers, frênes, châtaigniers... qui constituent autant de réservoirs. Ceci explique que ce champignon se manifeste préférentiellement dans des vignes plantées sur des défriches de feuillus. En revanche, on n'observe pas de problèmes sur des défriches de résineux ou d'acacias.Le champignon colonise les racines, les détruit et provoque un dépérissement progressif de la plante attaquée. Il peut se conserver dans le bois ou les racines mortes contenus dans le sol tant que ceux-ci renferment une base nutritive suffisante. Ensuite, des filaments se forment, s'allongent et vont coloniser des racines vivantes.Le pourridié provoque des dégâts ponctuels, notamment dans les vignobles du sud de la France, en Gironde, dans les Charentes et dans le pays nantais. Mais il est difficile d'évaluer précisément les surfaces concernées. Depuis peu, deux produits permettent de lutter contre ce champignon. Esaco, mis au point et commercialisé par les établissements Touzan, à Cestas (Gironde), a reçu le premier son autorisation de vente à la fin de l'année 1997. Il est présenté sous forme liquide et sa matière active, le métam-sodium, se transforme peu à peu en gaz dans le sol. Pour obtenir une bonne efficacité, il faut que la température du sol au niveau de l'application, à environ 40 cm de profondeur, soit supérieure à 10°C. On déconseille aussi la partie chaude de l'été pendant laquelle le champignon est peu vulnérable. L'application peut donc être réalisée au printemps ou à l'automne et il faut ensuite attendre deux mois avant de planter.Sur sol nu, l'application d'Esaco est effectuée en prestation de service par les établissements Touzan ou des distributeurs équipés. Pour les vignes en place, une pompe reliée à un tonnelet d'une capacité de 25 l a été mise au point. Elle permet d'injecter le produit dans le trou réalisé avec une tarière. Selon ses besoins, l'utilisateur peut acheter la pompe ou s'en faire prêter une par son distributeur. Dans ce second cas, le prix du litre de produit est nettement plus élevé (15 F contre 9,90 F lorsqu'il n'y a pas de prêt de matériel). Le choix dépend des surfaces concernées, sachant qu'il faut apporter 0,2 l par trou à raison d'un trou par mètre carré.Sur vigne en place, Touzan propose deux stratégies. Dans le cas d'une tache bien délimitée, il est conseillé d'arracher les pieds morts et malades, mais aussi les pieds se trouvant entre 1,50 et 2 m autour de la tache afin de mettre en place un 'cordon de sécurité'. De cette manière, il semble qu'une application sur la zone suffise à enrayer le champignon. Si la maladie apparaît de façon plus éparpillée, on arrache seulement les pieds morts et malades et on traite. Dans ce cas, il faut s'attendre à devoir intervenir à nouveau par la suite au fur et à mesure que les pieds atteints extérioriseront les symptômes.Le deuxième produit homologué pour lutter contre le pourridié, l'Enzone, a été homologué en novembre 1998. Sa matière active, mise au point par la firme Calliope, à Noguères (Pyrénées-Atlantiques), est le tétrathiocarbonate. Sur l'année 1999, le produit a été commercialisé avec son kit d'application pour traiter des taches sur vigne en place. On applique 0,1 à 0,3 l de produit par trou selon la nature du sol. Puis il faut recouvrir avec 10 cm de terre meuble et verser 10 à 30 l d'eau selon la quantité de produit utilisé. Le liquide se transforme en gaz au contact de l'eau. La présence de terre évite que le gaz ne parte dans l'atmosphère, améliore la sécurité du travail et l'efficacité du traitement. Là encore, la température du sol doit dépasser 10°C. Le fabricant conseille de respecter un délai de deux à quatre semaines avant de planter, voire davantage dans le cas de sols très argileux.Pour le traitement des sols nus avant plantation, une machine spécialement conçue est à l'essai et des prestations devraient être proposées dès l'année prochaine.Dans la plupart des zones viticoles concernées, des expérimentations ont été mises en place afin de comparer les deux préparations et de disposer de références locales. Mais l'arrivée de ces produits ne dispense pas les utilisateurs de respecter les mesures préventives classiques.En effet, la désinfection n'élimine pas totalement le champignon, notamment dans les couches profondes du sol, mais limite sa virulence. Lors de la préparation d'une parcelle à la plantation, des labours croisés permettent d'extraire le maximum de racines. Au moment de l'arrachage, certains préconisent une dévitalisation des pieds pour rendre les racines moins attractives pour le champignon. D'autres estiment cette opération superflue, le pourridié pouvant vivre sur des racines mortes comme sur des racines vivantes.Sur une vigne en place, lorsque des foyers apparaissent, on limite l'extension de la maladie en évitant de transporter des racines contaminées vers le reste de la parcelle. Il est donc conseillé de lever les charrues au moment de passer au-dessus de la zone infestée.Enfin, dernière précaution en zone sensible, il est préférable de rabattre les arbres situés en bordure de parcelle plutôt que de les éliminer. En effet, si l'arbre est coupé, les racines restant dans le sol meurent. Or, une fois leurs réserves épuisées, le champignon se propage dans le sol et colonise de proche en proche des racines vivantes. On a ainsi constaté que l'apparition du pourridié dans une parcelle pouvait être consécutive à des arrachages d'arbres en bordure.