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En l'an mille

La vigne - n°104 - novembre 1999 - page 0

Après l'effondrement de l'Empire carolingien et l'éclatement de la France en provinces féodales, l'église conserve la mainmise sur les vignobles.

Les Romains ont introduit la viticulture en Gaule et ont favorisé la création de nombreux vignobles. A l'état sauvage avant la conquête et susceptible de fournir quelques fruits de cueillette, la Vitis vinifera, notre vigne, n'est devenue vigne à vin qu'à l'aube de l'ère chrétienne. Un millénaire après, vers l'an mille, le vignoble, qu'on appellera français par commodité, occupe une petite proportion de l'espace cultivé.La consommation du vin est réservée à la noblesse laïque et ecclésiastique de haut rang. De plus, la population formant aujourd'hui le territoire français est très faible : on peut l'évaluer à cinq millions d'habitants au moment où Hugues Capet monte sur le trône (en 987). A cette même date, l'Angleterre ne dépassait sans doute pas le million d'habitants, à peine un million et demi pour l'ensemble des îles britanniques.Présente partout, jusqu'à l'ombre de la cathédrale de Lille et en Belgique, la vigne n'est guère étendue et elle est aux mains des puissants, des évêques et des collèges de chanoines principalement. Elle cerne les villes, car la main-d'oeuvre est urbaine. C'est dans les celliers et les caves que le raisin est pressé et le vin entreposé. La vigne est alors une culture de banlieue, de coteaux, car les principales villes se sont créées sur les bords des grandes rivières. Une grande abbaye, comme celle de Saint-Germain-des-Prés, totalise 300 à 400 ha de vignes et produit environ 13 000 hl de vin sur ses propres terres et sur celles qu'elle confie à des tenanciers.Pour proposer un ordre de grandeur, le vignoble français ne dépassait pas quelques dizaines de milliers d'hectares (sans doute très loin des 100 000 ha) pour une production moyenne n'atteignant pas le million d'hectolitres. Du vin blanc pour l'essentiel, acide et vert, faible en degré alcoolique, aidant à la digestion des viandes rôties et faisandées consommées alors par les riches.Officiellement instauré sous l'Empire romain en 313, propagé par saint Martin dans la seconde moitié du IVe siècle, le christianisme a besoin de vin pour célébrer le mystère de la communion. N'oublions pas non plus qu'en l'an mille, tous les sujets du roi de France ne sont pas encore chrétiens et toutes les paroisses connues aujourd'hui ne sont pas encore fondées.Quand l'Empire romain s'écroule, en 476, l'église (et surtout l'évêque dans sa ville épiscopale) reste le seul lien unissant les populations. Elle maintient, par nécessité et par goût, la culture de la vigne. Tous les évêques s'efforcent de contrôler un vignoble, même si leur siège ne s'y prête pas. C'est pourquoi on voit l'évêque de Saint-Quentin préférer la résidence de Noyon, sur l'Oise, et l'évêque de Langres se morfondre quand il ne peut pas gagner Dijon.C'est l'époque où les ecclésiastiques font des miracles : saint Airy, évêque de Verdun, s'attire ainsi la protection de Childebert II, roi d'Austrasie, en maintenant plein de vin le tonneau dans lequel le roi et sa suite puisent à volonté. A partir du XIe siècle, l'essor de l'agriculture et celui de la population (la France comptera près de 20 millions d'habitants vers 1300) favorisent l'extension du vignoble et l'accession de la bourgeoisie aux plaisirs du vin. Le vignoble connu jusqu'à l'époque du phylloxéra prend alors définitivement sa place.

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