ImprimerLa plupart des porte-greffes multipliés aujourd'hui ont été obtenus au lendemain de la crise phylloxérique.
L'année suivant la découverte du phylloxera, l'idée de greffer les Vitis vinifera sur les vignes américaines avait déjà germé. Mais le greffage ne se développa réellement qu'à partir de 1880.La greffe fit rapidement apparaître des problèmes inhabituels, notamment des symptômes de chlorose, les vignes américaines supportant beaucoup moins les sols calcaires que les Vitis vinifera. Il fallait donc adapter les porte-greffes aux sols viticoles. Alors que se développait le greffage, les hybrideurs se sont mis à l'ouvrage. Ils recherchaient un hybride alliant la qualité des cépages européens et la résistance aux maladies des vignes américaines. La perle rare n'a pas été trouvée, mais de ces multiples croisements sont nés la plupart des porte-greffes actuels.Ensuite, il fallut attendre presque cent ans pour voir apparaître de nouveaux porte-greffes, le Fercal en 1978, suivi neuf ans plus tard par le Gravesac.Aujourd'hui, trente porte-greffes sont recommandés, mais quinze sont très peu utilisés. Dans ce lot, un porte-greffe a connu ses heures de gloire. 'Le 44 53 Malègue fut à la mode après la Seconde Guerre, explique Pierre-Marie Guillaume, des pépinières du même nom (Haute-Saône). Il a même été vendu quatre à cinq fois plus cher que les autres! Il a fallu quinze ans pour que le soufflet retombe car il induit une carence en magnésie et montre une résistance au calcaire assez faible.' 'L'évolution des porte-greffes ne peut pas être dissociée de celle de la viticulture, explique Jean Cordeau, ancien conseiller de la chambre d'agriculture de Gironde. L'orientation vers la recherche de la qualité a modifié leur diffusion. Le Rupestris du Lot en est un bon exemple.' En effet, ce porte-greffe très vigoureux, qui a pu être associé à l'Aramon dans le Midi, représente actuellement moins de 1% des greffages. 'Le SO4 a explosé en Gironde entre 1960 et 1972, poursuit Jean Cordeau. A une certaine période, il représentait plus de la moitié des porte-greffes bordelais! Aujourd'hui, il entre dans 20% des greffages de la région.' Au niveau national, il tient toujours le haut du pavé avec un quart des assemblages.La sélection sanitaire et génétique a pesé sur l'importance de chaque porte-greffe. 'On a redécouvert le Riparia ou le 3309 C grâce aux travaux de sélection', ajoute Jean Cordeau. Aujourd'hui, même si le porte-greffe est peu vigoureux, avec du matériel végétal sain, les rendements sont atteints. A l'inverse, le vigneron a les moyens de maîtriser les rendements si le porte-greffe est vigoureux.Aujourd'hui, les techniciens aspirent à une plus grande diversité des porte-greffes plantés. Au plan national, le quinté de tête (SO4, 110 R, 3309 C, 41 B et 140 Ru) entre dans près des trois quarts des assemblages! Les choses évoluent, mais très lentement.La recherche d'obtentions nouvelles est restée au point mort plusieurs années. Pourtant, il reste encore des situations sans solution : il n'existe pas de porte-greffe précoce conférant une faible vigueur dans des sols argilo-calcaires, à la fois humides et chlorosants. Mais l'Inra de Bordeaux redémarre un programme de recherche.Mais cette recherche, les pépiniéristes s'en méfient parfois. Au début des années 90, la greffe-bouture herbacée les a effrayés. Ils craignaient pour l'avenir de leur métier. 'Aujourd'hui, plus aucun pépiniériste n'en parle!', s'exclame un professionnel.