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Italie

La vigne - n°105 - décembre 1999 - page 0

Situé au nord-ouest de l'Italie, le Piémont est parmi les plus grandes régions viticoles du pays. 62 000 ha abritent une quarantaine d'appellations et la variété des vins est impressionnante.

Les anciens Grecs l'appelaient OEnotria, le pays du vin. L'Italie, trois millénaires plus tard, est toujours le premier producteur mondial, avec des vins peu connus en France, trop proches peut-être ou souffrant d'une réputation de boissons de pizzeria (chianti, lambrusco ou autre valpolicella). La réalité du terrain est plus complexe. Les Italiens éprouvent eux-mêmes certaines difficultés de classification... La seule province du Piémont reconnaît près de quarante appellations contrôlées, mais une majorité de viticulteurs ignorent délibérément ces règles. Ils produisent des vins de table avec des cépages traditionnels non autorisés, ou avec les résultats de leurs essais sur l'implantation de nouvelles variétés. Malaisé à résumer, ce panorama de nombreux vins uniques est aussi difficile à vendre en dehors d'un cercle de connaisseurs.Dans la région du Piémont, 62 000 ha de vignobles produisent chaque année 6 millions de quintaux de raisins transformés en 0,5 milliard de bouteilles. 'Notre région de Cuneo (sud) est souvent comparée à la Bourgogne, car le vin vient d'un seul cépage, le nebbiolo, qui possède le parfum fruité du pinot noir de Bourgogne. De plus, les nombreux petits producteurs spécialisés ne facilitent ni la communication, ni la vente à grande échelle', explique Claudio Salaris dirige le Consorzio di Tutela Barolo Barbaresco Alba Langhe e Roero (mélange de syndicats et d'interprofessions à la française).Suivant sa zone d'implantation, le noble nebbiolo donne différents vins. Le barolo vieillit quatre années, dont deux ans en fûts, avant de conquérir les marchés internationaux ; le barbaresco, 'son petit frère', séjourne une année de moins dans les tonneaux. 'Le nebbiolo de la zone Barolo vaut 30 F/kg et de nombreux petits viticulteurs vendent directement leur récolte. Ceux dont le vignoble dépasse 10 ha la vinifient eux-mêmes, mais produire du barolo revient très cher. Quatre ans plus tard, la bouteille se vend de 100 à 500 F. Les neuf dixièmes de la production partent vers un pays à monnaie forte (Allemagne, Suisse, États-Unis ou Japon).' Les rendements sont faibles (80 q/ha) et les soins apportés à la vinification exigeants.La famille Cordero di Montezemolo se distingue dans les produits de luxe. Un cousin est PDG de Ferrari, l'autre élève du Barolo. À La Morra, toujours au sud du vignoble, les 26 ha du domaine produisent 130 000 bouteilles environ chaque année, dont 70 000 du célèbre cépage.Autre point commun avec la Bourgogne, la forme et la couleur des bouteilles restent traditionnelles. La fermentation s'effectue dans des cuves en Inox avant le séjour en fûts, 'sauf le chardonnay intégralement élaboré en barriques fabriquées dans la région de Cognac', précise le jeune marquis Enrico Cordero di Montezemolo.A 20 km de là, sur les collines de la coopérative Santa Rosalia, le nebbiolo donne un vin différent, appelé nebbiolo d'Alba ; le dolcetto, autre cépage, y est également cultivé. Claudio Salaris détecte un problème de vocabulaire : 'Le dolcetto est à l'origine d'un vin rouge analogue au bourgogne. Cela n'a rien à voir avec l'adjectif dolcetto, qui qualifie un vin blanc mousseux et sucré. Pour éviter cette ambiguïté qui perturbe la diffusion du produit, je conseille d'utiliser l'appellation géographique Langhe'.La coopérative regroupe quatorze viticulteurs, dont trois produisent 200 hl de vin biologique entièrement exporté en vrac vers la Suisse et l'Allemagne. 'Sur 40 ha, nous consacrons 5 ha à la vigne biologique, ce vin se vend mieux.' Gian Franco Prandi, président de la coopérative, en est aussi le plus jeune membre ; la moyenne d'âge élevée des autres adhérents l'inquiète.Claudio Salaris craint de voir disparaître, lors du départ à la retraite des viticulteurs, des vins rares tels l'erbaluce de Caluso Passito. Cueillies mi-septembre, les grappes de ce raisin blanc sont pendues à des fils et pressées à la mi-février. Le vin obtenu titre 14 à 15° d'alcool et contient encore beaucoup de sucre. Autre vedette du Piémont, les 100 M de bouteilles d'asti produites chaque année ; ce blanc pétillant s'élabore à partir d'un muscat partiellement fermenté et contient peu d'alcool (moscato : 5 à 6°, spumante : 7 à 9°). Original, l'asti est victime de son succès et de calamiteuses contrefaçons.La vendange s'effectue surtout à la main dans ces petites propriétés vallonnées. Les techniciens préconisent l'abandon du système en tonnelle au rendement trop élevé (150 q/ha), peu pratique pour la récolte et les traitements. Autrefois, l'avantage était d'éviter le soleil trop fort en été et de surélever les grappes d'1,50 m pour les protéger du froid nocturne. Autres conseils : une fertilisation équilibrée, le bon traitement au bon moment et la réduction du nombre des grappes. Les viticulteurs attentifs à ces principes ont bénéficié de deux points de sucre supplémentaires.La distribution évolue également. L'Italien n'achète plus sa bonbonne de 54 l à un voisin viticulteur, il prend le vin ordinaire au supermarché et les grands crus à l'oenoteca. Aujourd'hui, seule l'appellation d'origine ou une notoriété spectaculaire peut justifier le prix des bouteilles, condamnant un grand nombre de vins de table originaux. La viticulture italienne va-t-elle évoluer vers l'uniformité? Claudio Salaris souhaite 'améliorer la situation afin que le point commun des vins piémontais soit leur qualité'. Il constate que de nombreux élèves suivent les cours de l'organisation nationale des dégustateurs à Turin, que les fêtes du vin et le salon du goût sont très appréciés...

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