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Vignoble du Jura

La vigne - n°106 - janvier 2000 - page 0

Depuis des siècles, tout prédestine le vignoble du Jura à jouer un rôle important dans la viticulture médiévale.

Le vignoble du Jura courre sur 80 km de longueur, depuis les environs de Salins (nord) jusqu'à Saint-Amour (sud), et environ sur 10 km de largeur. Implanté sur le Revermont, côte escarpée entre 200 et 500 m d'altitude, à la jonction de la plaine bressane et du premier étage des plateaux, il prospère autour de noms devenus célèbres: Arbois, Pupillin, Château-Chalon, l'Etoile, l'appellation côtes du Jura donnant une unité à tout ce vignoble.Dans ce pays au climat continental, les expositions sud et sud-ouest se multiplient tandis que les indentations du relief, constituées par les reculées, procurent des abris irremplaçables. Les marnes de couleurs variées, enrichies d'éboulis calcaires, donnent des sols favorables à la vigne. Dans cet ensemble favorisé par la nature, des cépages intéressants ont prospéré, comme le trousseau et le poulsard pour les vins rouges, le savagnin pour les blancs. S'y ajoutent, bien sûr, ces merveilleux cépages bourguignons que sont les pinot noir et le chardonnay.Loin de la mer, la région jurassienne possède heureusement des sources salées (Salins et Lons-le-Saunier en sont les témoins) qui ont joué un rôle considérable dans l'histoire. Or, les plus anciens possesseurs connus des sources de Salins sont les moines de Saint-Maurice-en-Valais, dans la vallée du Rhône, qui disposent d'une route directe, par la cluse de Pontarlier, pour tirer parti de leur bien. A ce patrimoine important, les moines ajoutent la propriété du château de Bracon, juste au sud de Salins.Dès le Xe siècle, les moines engagent leurs biens (y compris une vigne) à Aubri, comte de Mâcon. Au XIIIe siècle, Jean de Chalon possède de nombreuses vignes à Arbois, à l'Etoile et à Poligny. En 1282, Othon IV, son petit-fils, octroie aux habitants d'Arbois une charte de commune pour se concilier leurs faveurs. A cette époque, il emploie des centaines d'ouvriers à travailler ses vignes d'Arbois et de Pupillin. Il va utiliser ses liens familiaux pour donner aux vins du Jura l'éclat qu'ils n'ont jamais perdu.Dès la fin du XIIIe siècle, le vin d'Arbois est apprécié en Artois, en Hainaut et à Paris. En 1298, Philippe le Bel en achète 37 muids. En 1315, on sait qu'il y en a une provision dans la cave de la comtesse d'Artois, à Hesdin. Le mariage, en 1307, de Jeanne de Bourgogne, fille d'Othon IV, avec le futur roi de France Philippe V, ne peut que renforcer le prestige du vin d'Arbois et lui attirer de nouveaux clients. Veuve en 1322, Jeanne, installée au château de Bracon, continue à faire prospérer ses vignes d'Arbois, de Poligny et de Blandans (commune de Domblans).Philippe le Hardi, duc de Bourgogne, recueille au XIVe siècle l'héritage des descendants d'Othon IV. C'est du vin de ses vignes qu'il régale ses invités quand il marie, à Cambrai en 1385, son fils aîné Jean avec une princesse de Bavière. En 1463, cette protection des ducs de Bourgogne engage les gens d'Arbois à demander des exemptions de taxes sur l'expédition de leurs vins, privilège maintenu avec les empereurs Maximilien Ier et Charles Quint, au XVIe siècle. La tante et la soeur de ce dernier apprécient les vins d'Arbois et ceux de Château-Chalon puisqu'elles en achètent en 1527 et en 1533 pour leur palais de Malines.François Ier, prétendant aussi à la possession de la Franche-Comté, croit également devoir s'attirer les bonnes grâces des vignerons d'Arbois. En 1533, il fait planter des cépages venus d'Arbois autour du palais de Fontainebleau; mieux, il fait livrer cent pièces de vin d'Arbois à Marseille pour l'entrevue qu'il doit avoir avec le pape Clément VII. L'excellence de ces vins du Jura apparaît à tous et leur renommée est internationale. L'écrivain François Rabelais, dans son Pantagruel, construisant le temple de la Dive bouteille dans son Chinonais natal, n'hésite pas à mettre des plants d'Arbois (avec des plants de Beaune, d'Anjou, de Grave et de Malvoisie) dans sa propriété idéale pour y célébrer le bon vin.

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