Les vins bio sont-ils meilleurs que les autres? D'après une étude allemande, il est difficile à la dégustation de s'y retrouver. L'enherbement peut cependant avoir une incidence sur l'expression aromatique des vins, mais il favorise la vie dans les sols.
Lors de la dernière assemblée générale de l'OIV (Office international de la vigne et du vin), qui s'est déroulée en 1999 à Mayence (Allemagne), plusieurs communications ont porté sur les incidences d'une viticulture plus respectueuse de l'environnement, se fondant sur l'agriculture biologique ou sur l'enherbement de la vigne.Isabelle Dupin, de l'Institut de recherche et de formation de Neustadt, a présenté une étude comparative de 91 vins blancs allemands, issus soit de viticulture biologique, soit d'une viticulture dite conventionnelle. Le but était de savoir si la dégustation permettrait de distinguer le mode de culture des vignes. Dans chaque série étudiée, les vins comparés étaient, bien évidemment, issus du même cépage (riesling, sylvaner ou pinot blanc), de la même aire de production et avaient le même niveau de qualité. Chaque série comprenait au moins deux vins issus de l'agriculture biologique, et deux vins issus d'une viticulture conventionnelle. Les échantillons venaient de deux zones du Palatinat, et de deux autres de la Hesse-Rhénanie.Les vins ont d'abord été dégustés afin d'établir une liste de descripteurs leur convenant, puis un jury a évalué l'intensité de chaque descripteur pour chaque vin. En fait, il apparaît difficile de distinguer les deux modes de production à la dégustation. Seuls les caractères herbacés permettent de différencier les vins issus d'une culture conventionnelle des vins bio. Cependant, en moyenne, les vins 'conventionnels' tendent à être plus fruités, plus floraux ou végétaux (avec des notes herbacées, haricot vert) que les autres. 'La qualité des vins issus de l'agriculture biologique ne souffre pas, en général, des restrictions dans l'usage des produits phytosanitaires et des fertilisants, conclut Isabelle Dupin. Cependant, l'agriculture biologique ne confère pas non plus au vin une plus grande intensité aromatique.' Cette étude révèle également que le mode de production a une incidence organoleptique moins importante que la région de production. En effet, les chercheurs ont montré que l'intensité de certains descripteurs permettaient de différencier les quatre zones de production dont les vins dégustés étaient issus.Par souci de respect de l'environnement, mais aussi dans une recherche de la qualité, les vignerons tendent désormais à réduire la fertilisation azotée dans leurs parcelles. Sur un poster, Otmar Löhnertz, du centre de recherche de Geisenheim, présentait les conséquences d'une telle évolution, qui a conduit à une forte réduction des apports d'azote dans les vignes ces dix dernières années.'Aujourd'hui, certains vignerons ont totalement stoppé toute fertilisation azotée', explique Otmar Löhnertz. En parallèle, l'enherbement des vignes s'est développé. Or, cette technique joue elle aussi sur la richesse en azote des sols.Ces deux pratiques combinées (baisse de la fertilisation et enherbement) ont fini par jouer sur la concentration en azote assimilable des moûts. Dans les vignobles septentrionaux, en zone plutôt froide, jusqu'à présent, la richesse en acides aminés des moûts n'était pas un facteur limitant. Mais ces dernières années, de basses concentrations en azote assimilable ont pu être retrouvées dans certains moûts. Elles sont associées à des problèmes fermentaires et à des modifications du profil aromatique. Après des apports d'azote parfois excessifs, on arrive aujourd'hui chez certains producteurs à l'extrémité inverse, avec des conséquences néfastes sur le profil aromatique des vins.Stephan Reuter, de l'institut de Neusdadt, a quant à lui présenté les effets de l'enherbement ou du désherbage, mécanique ou chimique, sur la biomasse microbienne des sols viticoles, qui est un indicateur de leur activité biologique. Les échantillons de sol sont prélevés durant toute l'année dans des vignes du Palatinat, notamment juste avant et juste après les désherbages. Selon cette étude, la biomasse microbienne tend à être plus importante dans les sols enherbés que dans les terrains désherbés, mécaniquement ou chimiquement. En revanche, les chercheurs n'ont pas pu mettre en évidence de différences entre le désherbage chimique et le désherbage mécanique. En fait, là encore, les conditions locales dans les parcelles semblent avoir une incidence plus importante sur la biomasse microbienne que les façons culturales. Cependant, cette étude s'inscrit sur le long terme et n'est pas aujourd'hui encore terminée.