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Japon

La vigne - n°108 - mars 2000 - page 0

Un climat difficile, des coûts de revient élevés et un contexte très concurrentiel rendent improbable l'essor de la filière du vin au Japon. Cependant, des jeunes se lancent.

Symbole du Japon, le mont Fuji peut aussi être considéré comme le protecteur des vignerons de la vallée de Kofu, le centre viticole de la préfecture de Yamanashi, 120 km à l'ouest de Tokyo. 'Sa masse constitue une barrière contre les pluies de juin-juillet et permet à la région d'enregistrer des précipitations inférieures à la moyenne nationale, mais dépassant néanmoins les 1 000 mm/an', explique Naoki Watanabe, responsable de la recherche à la winery Yamanashi. Ce domaine du groupe Suntory est numéro un des alcools sur l'archipel et l'un des leaders mondiaux du secteur. A l'instar des pays anglo-saxons, on trouve ici des restaurants, des boutiques et des visites guidées. Mais c'est avant tout l'une des exploitations les plus performantes du pays et importante en surface: 60 ha où se côtoient une quinzaine de cépages.
Sans surprise, le climat humide est à l'origine des principales maladies: botrytis, mildiou et, à un degré moindre, oïdium et 'bampu', une spécificité locale. 'Nous réalisons dix traitements par an, dont six à base de cuivre sur les cépages européens, et six à huit sur les variétés locales ou certains hybrides', révèle Yasuo Murakami, le directeur de la winery. Le département de recherche a donc déjà réalisé 9 000 croisements et il conduit chaque année une dizaine de parcelles d'essais, suivies de micro-vinifications. Alors que la tradition dans ce pays est à la pergola, de plus en plus de vignes sont palissées; et si les plus anciennes ont une densité de 2 000 pieds/ha, les plus récentes en comptent 5 000. Le rendement moyen est de 50 hl/ha.
Réalisées manuellement, les vendanges s'échelonnent de fin août à fin octobre. Suntory achète en plus 1 000 t d'autres raisins auprès d'exploitants (dans un rayon de 10 km), et plus de 100 t de muller-thurgau venant d'Hokkaïdo. Principalement équipée de matériels français et italiens, la cave dispose de cuves thermo-régulées. L'élevage s'effectue dans des cuves en Inox ou dans des fûts de chêne français, achetés 4 500 F/pièce.
Sur le plan des vinifications, la loi, très tolérante, autorise l'ajout de sucre et d'acide, sans fixer de limites. Le prix de revient moyen se situe à 28 F la bouteille et les prix au détail varient de 55 à 550 F. Des tarifs parfois peu compétitifs par rapport aux importations. Mais les salaires et le prix d'achat du raisin (11 à 14 F/kg) sont élevés. Voila peut-être pourquoi Suntory ne semble pas avoir de projets d'extension. Pourtant, les ventes ont atteint 50 000 caisses en 1999, dont la moitié à la propriété où l'on a accueilli 350 000 visiteurs! 'La publicité du French Paradox a dopé la demande, gommant les effets de la crise économique', souligne Yasuo Murakami.

La winery Kizan, toujours dans la vallée de Kofu, est une petite exploitation familiale (1 ha), créée il y a soixante-dix ans. Kozo Tsuchiya, le maître des lieux, est le petit-fils du fondateur. Il s'est lancé dans l'aventure avec sa femme Yukari alors qu'ils étaient microbiologistes chez un brasseur.
'Le métier nous attirait mais nous n'imaginions pas que ce serait aussi dur, avoue cette vigneronne qui a pris des cours d'oenologie en Australie. Ces études m'ont permis d'élargir mes connaissances et de rencontrer des vignerons de partout avec lesquels je suis toujours en contact. Un point important car, ici, nous sommes coupés du monde en termes d'informations techniques.'
Le Japon ne compte aucun institut ou magazine sur la viticulture et les grandes wineries ne divulguent pas les résultats de leurs recherches. Leur production de raisin de 15 t est complétée par l'achat d'une quantité équivalente des variétés kosyu et black queen auprès de voisins. Mais c'est difficile car le raisin de cuve se vend moins cher que celui de table. Malgré cela, ces jeunes n'envisagent pas d'acheter d'autres vignobles.
Leur objectif: produire des vins légers, adaptés à la cuisine japonaise. Tout est embouteillé avant la récolte suivante. Atteignant 30 000 bouteilles par an, la production est vendue en direct (65 à 100 F) par correspondance ou sur place. 'De cette manière, nous parlons de nos vins avec les acheteurs. Il existe une clientèle à la recherche de vrais vins japonais.'
Le Japon compte environ 23 000 ha de vignes entre les mains de plus de 80 000 propriétaires, produisant de 250 000 à 270 000 t de raisins par an. Sur ce total, seuls 8% servent à faire du vin. Le nombre de producteurs de vins proprement dit se limite à 242. Ce sont des grandes entreprises ou des petits propriétaires récoltants. Les sociétés Mercian, Suntory et Sapporo assurent plus de 50% de la production nationale.
Mais la loi japonaise autorise la mention 'produit du Japon' dès lors qu'au moins 5% de vin local entrent dans la composition du produit final. Conséquence: les grandes entreprises ne se contentent pas d'élaborer des vins locaux, mais réalisent aussi des assemblages avec des vins ou des moûts étrangers, surtout de Bulgarie, d'Argentine ou de Roumanie.

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