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Les épidémies d'oïdium

La vigne - n°110 - mai 2000 - page 0

Si rien ne vient perturber son évolution, l'oïdium se développe discrètement pendant 40 à 50 jours. Lorsqu'il devient visible (fin floraison), il entre dans sa phase explosive.

Lorsque le vigneron s'aperçoit que les feuilles de ses vignes portent des taches d'oïdium, la maladie est déjà présente dans sa parcelle depuis longtemps. A l'Inra de Bordeaux, Philippe Cartolaro et Agnès Calonnec ont voulu savoir comment débutaient et se propageaient les épidémies d'oïdium. Pour cela, ils ont travaillé pendant trois ans dans des parcelles de cabernet sauvignon sensibles à la maladie, sans réaliser de protection antioïdium. Certaines parcelles ont été contaminées artificiellement, d'autres ont connu une évolution naturelle de la maladie. Les chercheurs ont suivi ensuite pas à pas l'évolution du champignon en observant chaque cep individuellement.En contamination artificielle, les conidies du champignon ont été déposées sur le cep central d'une parcelle élémentaire de 49 pieds de vigne, au stade 4 à 5 feuilles étalées. Les chercheurs ont alors remarqué que la maladie se développait surtout autour du foyer. Les concentrations de forts dégâts sur les feuilles et les grappes se trouvent sur et à proximité de ce foyer. Dans la parcelle témoin, non contaminée artificiellement, l'apparition de la maladie fut décalée de quelques jours, l'épidémie s'est alors développée plus lentement et au final, les dégâts sont moins importants que dans la parcelle contaminée artificiellement (76% de feuilles malades dans la parcelle témoin le 10 juillet contre 89% dans la parcelle contaminée). 'Là où la maladie apparaît très tôt, l'attaque est la plus homogène et les dégâts sont les plus importants', expliquent les chercheurs.Après la contamination, durant une quarantaine de jours, l'oïdium connaît une croissance discrète. 'C'est la phase cachée de la maladie', explique Philippe Cartolaro. L'oïdium est bien présent, il progresse, mais le vigneron ne le voit pas. 'La maladie se développe tranquillement, le mycélium sort sur la face inférieure des feuilles. Pour s'en apercevoir, il faudrait que le vigneron tombe sur le bon cep et retourne les bonnes feuilles.'Ensuite, la croissance est forte. En 20 jours seulement, on passe de 10 à 70% de feuilles malades. 'On dit toujours que l'oïdium est une maladie qui explose au moment de la nouaison, et les gens se demandent d'où cela vient, explique Philippe Cartolaro. En fait, c'est comme une avalanche. Dans la première phase, discrète, la maladie se multiplie également, mais comme on débute de très peu, ce n'est pas perceptible tout de suite.' Dans les parcelles sans contamination artificielle, la dynamique est la même: une phase discrète de 40 à 50 jours, suivie d'une phase explosive. Et là aussi, les chercheurs ont noté l'importance des premiers foyers dans l'essor de la maladie.Les infographies illustrant cet article ont été construites à partir des observations réalisées sur une parcelle de 330 ceps (5 rangs de 66 ceps chacun). Dès le 12 mai, les chercheurs ont noté la présence d'oïdium en trois points de la parcelle.Deux de ces points deviendront les principaux foyers de la maladie et domineront les autres jusqu'à la véraison. Comme pour les parcelles contaminées artificiellement, la première phase est discrète. Le 2 juin, les chercheurs trouvent de l'oïdium sur près de la moitié des ceps, mais seulement 2,6% des feuilles sont malades. 'A ce stade-là, un bon observateur trouve l'oïdium', précise Philippe Cartolaro. Ensuite, tout s'accélère. Le 15 juin, pratiquement tous les ceps sont atteints, avec 14% de feuilles touchées. Début véraison (fin juillet), toutes les grappes sont atteintes, mais pour beaucoup, les dégâts sont inférieurs à 50%. En revanche, ils sont bien plus importants autour des deux foyers primaires.Dans cette parcelle, les chercheurs ont été étonnés de compter au début si peu de foyers, cette vigne ayant connu une forte infestation l'année précédente. Ils émettent donc l'hypothèse d'une perte importante d'inoculum au cours de l'hiver. 'Selon des études, les cléistothèces 'valables' passent l'hiver dans les infractuosités du tronc', précise Pascal Cartolaro. Cependant, on le voit bien dans l'exemple illustrant cet article: il suffit de peu de foyers pour que l'ensemble de la parcelle soit finalement atteinte.

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