Lorsqu'un client se révèle être un mauvais payeur, il faut réagir vite. L'efficacité du recouvrement est directement liée à cette rapidité d'intervention.
Lorsqu'une créance arrive à son échéance, il ne faut pas traîner pour exiger son paiement, constate Michel Gouveia, président du Syndicat national des professionnels du recouvrement (SNPR). Mais il faut agir avec diplomatie. L'aspect commercial des rapports avec le client doit être préservé. Celui-ci peut ne pas avoir honoré sa facture pour des raisons valables. La relance peut se faire par téléphone, mais il faut la confirmer par écrit. L'idéal est de se déplacer. Un contact avec le client permettra de mesurer son éventuelle mauvaise foi. Le débiteur toujours absent lorsqu'on l'appelle, proposant un rendez-vous auquel il ne se présente pas, souhaite manifestement se soustraire à son obligation.Si on ne peut pas procéder à ces démarches, autant les confier à une société de recouvrement. Diverses formules existent: honoraires fixes ou en fonction des sommes à recouvrer (de 10 à 30%). Certaines prévoient des forfaits de prise en charge (entre 100 et 200 F), d'autres fixent un montant minimal de dettes, généralement 2 000 F. La marge de négociation est plus ou moins large, selon que l'on fait appel régulièrement ou non à la société de recouvrement.Les agents de ces structures connaissent bien les personnes auxquelles ils ont affaire. 'Les mauvais payeurs le sont souvent pour plusieurs fournisseurs. Ils sont légion dans la restauration. On connaît leur psychologie. Un restaurateur tient à sa réputation vis-à-vis de ses clients, mais surtout de ses autres fournisseurs. Il n'a pas envie que son boucher ou son fromager apprennent qu'il ne paie pas toutes ses factures...', explique le SNPR. Plus on connaît son mauvais payeur, plus on dispose de moyens de pression.Lorsque l'impayé est constaté, la mise en demeure s'impose par lettre recommandée avec accusé de réception. Ce courrier rappelle la nature et le montant de la créance, la date de paiement exigible et les éventuelles clauses prévues dans le contrat initial (voir La Vigne n° 109, p. 55-56). Cette mise en demeure a pour effet de faire courir les intérêts. Elle marque le début de la procédure contentieuse. On peut également faire appel à un huissier de justice pour procéder à une sommation interpellative. Le prix de cet acte (tarification libre) peut varier du simple au double. Il en coûte de 1 200 à 1 500 F dans les grandes villes et moins de 500 F dans les petites communes rurales.L'officier ministériel se présente chez le débiteur, lui demande de régler sa dette et la raison pour laquelle il ne peut pas payer. Si ce dernier répond qu'il est dans l'incapacité d'honorer la facture pour insuffisance de trésorerie, il reconnaît implicitement sa dette, ce qui présente un avantage en cas d'action en justice ultérieure. 'La sommation interpellative peut ainsi servir de commencement de preuve de l'obligation du débiteur qui, jusque-là, en fonction du dossier, pouvait paraître insuffisante', note Luc Migan, huissier de justice à Paris.Le droit français a prévu une autre procédure dont le coût et les délais sont limités: l'injonction de payer. Celle-ci est bien adaptée au recouvrement des petites créances. Elle est introduite par voie de requête auprès du président du tribunal d'instance ou de commerce, selon que la créance est civile ou commerciale. Il suffit de remplir un formulaire au greffe et de l'accompagner des documents justifiant la créance (contrat de vente, bons de commande et de livraison, mise en demeure...).La requête est appréciée librement par le juge. En cas de rejet, le créancier n'a d'autre solution que d'assigner son débiteur devant les tribunaux (voir encadré). Plutôt que de rejeter brutalement la demande, le magistrat peut y accéder en partie. Par exemple, il accorde une condamnation sur le montant du principal, mais refuse la liquidation des intérêts qui ont couru depuis la mise en demeure. 'Dans cette hypothèse, soit le créancier se contente de cette ordonnance et l'accepte dans son intégralité, ce qui le prive pour l'avenir de demander l'allocation des intérêts, soit il renonce à son bénéfice et engage une action au fonds', explique Luc Migan. Lorsque la demande est acceptée, le greffe délivre un extrait du document au créancier. Celui-ci doit, dans les six mois, l'adresser au débiteur par acte d'huissier: on parle de signification de l'ordonnance (environ 300 F).Cette procédure a ses limites. Tout d'abord, le débiteur a un mois pour y faire opposition. S'il y a contestation, le créancier n'a d'autre solution que d'engager une procédure au fonds. Si le débiteur garde le silence, à l'expiration du délai, le créancier doit demander au tribunal de rendre l'ordonnance exécutoire. 'Une fois en possession de celle-ci, le vigneron dispose des mêmes droits que ceux propres à une décision de justice qui lui serait favorable: possibilité de prendre des mesures conservatoires, saisie des biens...', explique un juriste. Il ne faut pas négliger non plus l'impact psychologique de l'intervention d'un huissier de justice.Si malgré ces pressions, la créance n'est pas recouvrée, il reste alors deux options. Si la somme d'argent en jeu est importante, on peut prendre un avocat et poursuivre devant les tribunaux. Si ce n'est pas le cas, autant accepter la perte et, comme beaucoup, répercuter le coût moyen annuel des impayés sur le prix de vente des bouteilles.(2) En avril, nous avons publié la partie 1 de notre enquête sur les impayés (p. 55: 'Prévenir le risque').