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A la recherche de vins équilibrés, Pierre Trimbach veille sur les sucres résiduels

La vigne - n°113 - septembre 2000 - page 0

Le niveau légitime dans les blancs est un sujet constant de débats. Il s'agit de savoir si on laisse leur vivacité s'exprimer ou si, au contraire, on l'atténue.

La maison Trimbach est connue pour le style de ses blancs. Ils sont franchement secs, sauf les vendanges tardives et les sélections de grains nobles. Ici, il n'est pas question de masquer l'acidité par des sucres résiduels, même pas celle du riesling dont les pH oscillent entre 3 et 3,2. On préfère attendre qu'elle se fonde et vendre les vins après deux ans de maturation en bouteilles.
De tous les cépages alsaciens, le riesling connaît les fins de fermentation les plus délicates, comme s'il voulait s'enrober lui-même d'un peu de douceur. Mais Pierre Trimbach s'y oppose. Selon lui, il ne tient son rang à table que s'il est vif. Pour cette raison, il s'est attaché à résoudre les difficultés qui sont survenues voilà quelques temps, sans doute du fait de l'enherbement des vignes.
' Longtemps, nous avons pensé que les arrêts de fermentation étaient liés à un manque d'aération, explique-t-il. Mais depuis trois à quatre ans, nous mesurons la teneur en azote des moûts. Neuf fois sur dix, les problèmes venaient de là. Le riesling est naturellement pauvre en azote. '

L'arrivée de l'herbe n'a fait qu'accentuer ce caractère. Pour y remédier, Pierre Trimbach a réduit l'intensité du débourbage en réglant différemment sa centrifugeuse. Il a ainsi ramené la majorité de ses moûts à l'épuisement des sucres. Quelques-uns ont malgré tout persisté à caler. Toujours les mêmes. Ils proviennent de parcelles en pente, aux sols calcaires et maigres, où les vignes souffrent fréquemment de chlorose. Maintenant que les raisons de leur faible aptitude fermentaire sont clairement établies, ils sont systématiquement supplémentés à l'aide d'un produit associant du phosphate d'ammonium, des écorces et des autolysats de levures, de la vitamine B1.
Résultat ? ' L'an dernier, nous n'avons eu aucun problème avec les rieslings. ' Fait inhabituel, quelques cuves de pinot gris se sont arrêtées alors qu'elles renfermaient 15-20 g/l de sucres. Les moûts avaient été sévèrement débourbés pour les nettoyer d'une atteinte de pourriture grise. Il a suffi d'un remontage à l'air pour donner aux levures le souffle d'aller jusqu'à 5-6 g/l. ' Ces vins titrent 13 % d'alcool acquis. A la dégustation, ils sont secs ', remarque Pierre Trimbach. Et c'est bien ce qui compte. ' Les chiffres sont accessoires. L'important, c'est l'équilibre. Certains vins renferment 5 g de sucres et on le sent, d'autres 10 g et on ne le sent pas. En fait, le déséquilibre apparaît lorsque les sucres viennent de la chaptalisation pour maquiller une maturité trop faible. ' Ce qu'il a refusé en 1999, il l'avait accepté en 1996. Cette année-là, ' nous avons battu des records d'acidité. Nous avons rentré des pinots gris à 14° sans pourriture noble. Les fermentations se sont arrêtées naturellement alors qu'il restait 14 g de sucre. Les vins titrent 5 g d'acidité totale. Leur équilibre est parfait. Les autres années, 14 g, cela ne passe pas. '

Le gewurztraminer pose les difficultés inverses du riesling. Sauf exception, il fermente trop facilement. Or, au-delà de 13-13°5, Pierre Trimbach juge que l'alcool l'emporte au point de devenir brûlant. Les vendanges tardives et les sélections de grains nobles sont donc très surveillées. Elles réclament d'autant plus d'attention que les raisins sont peu atteints de pourriture noble, car alors rien ne freine les levures. Le moment d'arrêter les fermentations se décide à plusieurs. Bulletin d'analyse sous les yeux, Pierre, son père et des employés dégustent les cuvées. Tout leur art consiste alors à déterminer si les vins ont atteint leur équilibre. A partir de ce moment, ils sont refroidis entre 7 et 8°C, la température la plus basse permise par l'équipement de la cave. Ensuite, ils sont soutirés et sulfités à raison de 10 à 12 g/hl. Durant les quinze jours suivants, les cavistes mesurent quotidiennement la densité et épient le moindre frémissement. Ils suivent l'évolution de la teneur en SO 2 libre pour apprécier le taux de combinaison des sulfites. Lorsque les fermentations se poursuivent, ils pratiquent un second soutirage. S'il ne suffit pas, en dernier recours, il reste la centrifugation. Après ce traitement, les levures sont éliminées, les fermentations ne redémarrent plus.





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