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Le pressoir de Caton

La vigne - n°115 - novembre 2000 - page 0

A Beaucaire (Gard), en 1994, Hervé Durand a entrepris de construire un pressoir antique pour élaborer le vin comme les Romains.

Propriétaire d'un domaine viticole dans les costières de Nîmes, Hervé Durand eut la chance qu'il fut découvert sur sa terre, un atelier d'amphores à vin datant du I er siècle. De là, l'idée lui vint de faire du vin à la romaine. Aidé de deux spécialistes de l'Antiquité, Jean-Pierre Brun et André Tchernia, un archéologue et un historien, il entreprit de construire un pressoir utilisé par les Romains à l'époque de Caton l'Ancien (234-149 av. J.-C.) et que celui-ci décrit dans son traité de Agricultura (1).Le pressoir de Caton est à levier et à treuil. Sous un hangar couvert et sur un sol surélevé, dont la base forme une dalle creuse de 6,10 m de longueur sur 2,66 m de largeur, on édifie d'abord le cadre du pressoir. A l'arrière, deux grosses jumelles de chêne de 11 pieds de hauteur (3,25 m), d'une section carrée de 2 pieds (59 cm), liées à la poutraison afin de résister à la force exercée par l'arbre (ou mouton) qui presse la vendange. Les jumelles sont espacées de 1 pied, de façon à recevoir une extrémité amincie du mouton formant la languette d'une section carrée de 1 pied. Tout cela repose sur une maçonnerie renforcée pour que le sol résiste à l'effet d'écrasement. A l'avant du pressoir, deux poteaux (ou fausses jumelles) de 10 pieds de hauteur dans lesquels doit s'emboîter le tambour du treuil nécessaire à la pression. Les montants sont écartés de 9 pieds, la longueur du tambour. Jumelles et poteaux sont reliés par des longrines qui assurent la rigidité de l'ensemble. Tous ces assemblages se font par tenons et mortaises. Le mouton, d'une longueur de 7,40 m, est fait d'un seul arbre (chêne) d'un diamètre de 70 cm, à peine équarri. A une extrémité, il est aminci en une languette de 30 cm de section afin de s'encastrer entre les jumelles. Pour le régler en hauteur, au fur et à mesure qu'il doit s'abaisser pour rester toujours en contact avec le marc que l'on presse, chaque jumelle est percée de deux mortaises longues et étroites, l'une vers le bas, l'autre vers le haut, perpendiculaires à l'axe du pressoir. Ces mortaises reçoivent des aiguilles de 2,50 m de longueur et d'une dizaine de centimètres d'épaisseur, chaque aiguille pesant 30 kg environ. Ainsi, deux aiguilles enserrent toujours l'extrémité arrière du mouton. A l'avant du pressoir, entre les poteaux, les tourillons du tambour (long de 2,66 m) peuvent, grâce à des mortaises creusées dans la base des poteaux, s'encastrer dans ceux-ci. Le tambour peut ainsi être changé à volonté sans qu'on ait à démonter l'ensemble de la structure. De chaque côté, le tambour, d'un diamètre d'un pied et demi (44 cm), est percé de six trous pour loger les barres de manoeuvre. Par un système de poulies et de cordes de chanvre (d'un diamètre de 3 cm), l'extrémité antérieure du mouton peut être relevée, laissant un espace suffisant pour installer sur la maie, la cage du pressoir contenant le marc. Une autre corde de chanvre, reliée au tambour, permet au contraire d'abaisser le mouton pour exercer la pression. Le coffre de bois a une contenance de 1 m³. Il est démontable et ses traverses sont espacées pour que le moût puisse s'écouler. Lors du pressurage, le jus, qui s'écoule par gravité, est dirigé vers une cuve souterraine placée à l'arrière de l'appareil et du coffre. Grâce aux mortaises taillées dans les jumelles, les aiguilles amovibles enserrant l'extrémité postérieure du mouton peuvent être déplacées de façon à le descendre au fur et à mesure que la masse du marc s'abaisse. De grosses cales de bois sont placées sur le marc et dans la cage, assurant un contact permanent avec la masse à pressurer. Le coffre peut contenir le marc provenant du foulage de 3 tonnes de raisin qui ont déjà donné 9 à 10 hl de moût par foulage. Le passage au pressoir permet d'ajouter en moyenne 8 hl de vin de presse, tous ces chiffres pouvant varier en fonction du cépage et de la maturité du raisin. (1) André Tchernia et Jean-Pierre Brun, Le vin romain antique, éditions Glénat, Grenoble, 1999, 160 pages.

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