Une cellule ' environnement ' existe au sein de l'interprofession. Ses missions : coordonner les actions de recherche, d'expérimentation et de développement touchant à l'environnement, et réagir en cas de crise.
'L'environnement est devenu l'un des éléments incontournables de l'image d'un produit. Or, le champagne, comme tous les produits de luxe, vit beaucoup sur son image. Pour nous, il existe donc un double enjeu à se préoccuper de l'environnement : préserver notre image, mais également prendre le virage d'une viticulture durable, respectueuse et intégrée dans son milieu naturel ', constate un professionnel.La cellule ' environnement ' a vu le jour début 1998. Elle dépend de la commission technique de l'interprofession. ' Devant la montée en puissance des problèmes d'environnement et de sécurité alimentaire, les professionnels ont souhaité mettre en place une structure réactive ', explique Arnaud Descôtes, en charge de la mission ' environnement ' du CIVC. La cellule rassemble huit représentants de la propriété et du négoce. Il n'est pas nécessaire que tous soient réunis pour prendre une décision, ce qui améliore la réactivité. Ce groupe a une double mission : réagir ponctuellement aux crises qui peuvent se présenter et, sur le plus long terme, coordonner les actions de recherche, d'expérimentation et de développement entre les différents acteurs de l'environnement en Champagne (CIVC, ITV, GDV et chambres d'agriculture). Une fois la cellule créée, les dossiers ne se sont pas faits attendre. ' En février 1998, la présence de diuron et de triazine est détectée dans un captage d'eau près de Reims. En mars, la cellule organise une réunion sur le bassin versant concerné en présence des distributeurs de produits phytosanitaires. Il est demandé aux vignerons de ne plus utiliser ces herbicides. En juin, une réflexion est menée pour déterminer la suite à donner à cette affaire. La commission technique décide alors d'étendre cette mesure à toute la Champagne dès la campagne suivante. En juillet, un courrier co-signé par le CIVC, la Protection des végétaux, l'ensemble des partenaires techniques, des conseillers et des distributeurs est envoyé aux 16 000 exploitants champenois. Il explique la décision prise et donne des solutions techniques alterna- tives, rappelle Arnaud Descôtes. Il s'agissait ici d'une décision politique et non technique s'appuyant sur le principe de précaution. ' La cellule ' environnement ' a aussi réagi rapidement il y a un an lors de la pollution de la Marne. Ce dossier, particulièrement sensible, a alors été transmis au président de l'interprofession. D'autres sujets potentiellement ' crisogènes ' - entendez ici générateurs de crise - ont mobilisé cette cellule. Mais dans bien des cas, le simple fait d'anticiper ou de réagir rapidement a permis de désamorcer les problèmes. Parallèlement à sa fonction de veille sur des problèmes ponctuels, la cellule ' environnement ' mène une réflexion de fond sur les points susceptibles de poser des problèmes dans quelques années et qu'il serait bon d'étudier dès maintenant. Quand les projets sont retenus et les budgets votés, le relais est passé à l'instance exécutive, la mission ' environnement ' qui transfère les dossiers aux différents services techniques et fait ensuite remonter les résultats.Certains dossiers sont depuis longtemps au stade du développement. Citons, par exemple, la lutte raisonnée, à l'étude depuis quinze ans. Le réseau Magister, qui apporte le suivi et le conseil sur le terrain, s'étend aujourd'hui à 100 communes, sur les 250 que compte la Champagne viticole. ' Par la lutte raisonnée, nous pouvons réduire les problèmes de pollution diffuse liée à l'épandage de produits phytosanitaires et à leur migration potentielle vers les nappes phréatiques. Mais plusieurs études ont montré que la principale cause de pollution des eaux superficielles est, en réalité, liée à des pollutions ponctuelles. Celles-ci sont dues à de mauvaises pratiques des exploitants : vidange des fonds de cuve dans les fossés ou sur les chemins, lavage des pulvérisateurs sur des zones non adaptées... Après étude, la solution concrète la plus facile à mettre en oeuvre consiste à équiper les pulvérisateurs d'une cuve d'eau claire afin de rincer à la parcelle en faisant un tour supplémentaire ou deux. Nous avons rencontré les différents concessionnaires pour nous assurer de la faisabilité de ce système ', raconte Arnaud Descôtes. La solution des aires de lavage avec traitement des eaux de rinçage a été écartée pour le moment, car jugée trop coûteuse et trop lourde à gérer. L'objectif poursuivi : 5 000 pulvérisateurs équipés dans cinq ans ! Un autre sujet d'étude est lié aux plans régionaux sur la qualité de l'air qui intéressent toute la France. La partie diagnostic et analyse de la qualité de l'air revient aux instances régionales. Cependant, les professionnels champenois n'ont pas voulu attendre les résultats pour s'intéresser au sujet. En effet, il y a de fortes chances de trouver des produits phytosanitaires dans l'air ; donc, autant chercher des solutions dès maintenant. La question initiale est de savoir si les produits arrivent dans l'air par la dérive au moment de l'application ou par la volatilisation à partir d'un support (vigne ou sol)... La question de la dérive est déjà travaillée à l'aide, notamment, des diagnostics pulvérisateurs. Pour la volatilisation, le sujet est à l'étude avec l'Inra de Colmar et l'ITV, pour établir les indices de risque potentiel de 250 produits vis-à-vis de l'air, de l'eau superficielle, de l'eau souterraine, de la faune auxiliaire mais aussi le risque de dérive et de toxicité aiguë. Cette étude permettra aux professionnels d'apprécier le risque lié à l'utilisation de telle ou telle molécule et, éventuellement, de prendre la décision de ne pas recommander tel ou tel produit. ' Pour la gestion des déchets générés par l'activité vitivinicole, nous en sommes encore à la phase de l'acquisition de données. En effet, pour le moment, nous n'avons pas de solutions pratiques à proposer aux vignerons. Le projet est donc de réaliser un diagnostic HACCP et Iso 14 001 en considérant la Champagne comme une entreprise. Nous verrons ainsi les points critiques et les solutions envisageables à l'échelle de l'ensemble du vignoble champenois ', précise le responsable de la mission ' environnement '. Autre volet important : les effluents de cave. Aujourd'hui, 50 % des flux polluants produits à la vendange sont traités ; cela représente 3 % des unités. Les efforts se poursuivent avec la réalisation d'un état des lieux par commune ou par collectivité, la création d'un groupe de travail réunissant les professionnels et les techniciens et proposant des pistes, l'augmentation des moyens d'accompagnement sur le terrain... Sur l'ensemble des dossiers en cours, la mission ' environnement ' souhaite disposer d'indicateurs simples (le nombre de pulvérisateurs équipés de cuves d'eau claire, le pourcentage de DCO traitée...) permettant de mesurer les progrès effectués sur les différents dossiers et, selon les résultats obtenus, de réorienter les moyens. ' L'environnement n'est évidemment pas une préoccupation récente en Champagne, déclare un professionnel. Ce qui est nouveau, c'est de concevoir ce dossier dans sa globalité. '