Les pouvoirs publics, comme les responsables de la filière, ont marqué cette année leur volonté de faire avancer le dossier de la production raisonnée. Déclarations sans lendemain ou véritable travail de fond ? L'avenir nous le dira.
'Les efforts pour utiliser moins de produits phytosanitaires, raisonner les interventions, bref, produire plus propre, ne datent pas d'hier en viticulture. Ce qui change aujourd'hui, c'est la volonté de formaliser tout cela et de faire avancer les choses à plus grande échelle ', constate un professionnel. D'ailleurs, la réflexion actuellement en cours concerne l'agriculture dans son ensemble. Du côté des pouvoirs publics, tout a commencé avec la loi d'orientation affichant clairement sa volonté de promouvoir une agriculture plus respectueuse de l'environnement. En 1999, face à la multiplication des initiatives locales, le ministre de l'Agriculture a demandé à Guy Paillotin, ancien président de l'Inra, un rapport complet sur l'agriculture raisonnée. Le rapport, rendu en février dernier, propose une définition de l'agriculture raisonnée et fixe comme objectif d'entraîner à court terme (environ cinq ans) tous les agriculteurs dans une démarche environnementale. La filière viticole a alors proposé un socle commun pour la viticulture raisonnée, listant un certain nombre de points à prendre en compte dans une démarche raisonnée.Dans le même temps, un groupe de travail rassemblant des chercheurs et des techniciens de différents organismes et de toute la France s'est mis en place, dès 1999, pour rédiger un référentiel national ' Production intégrée de raisins '. L'objectif de ce référentiel est de proposer un outil de travail aux vignerons qui souhaitent aller au-delà de la viticulture raisonnée. A toutes les étapes de la production, des solutions techniques ayant le moins possible d'impact sur l'environnement sont privilégiées. Le groupe de travail a cependant souligné quelques impasses. ' En ce qui concerne la désinfection des sols, la lutte contre la flavescence dorée et contre les maladies du bois, on sait que la solution existante présente un risque écologique, mais il n'existe pas, pour le moment, de solution alternative à proposer aux vignerons. Dans ces cas précis, et faute de mieux, les solutions actuelles sont retenues ', explique l'un des techniciens. Le référentiel national ' Production intégrée ' a été officiellement présenté lors du dernier Vinitech. Il donne un cadre général et établit une liste de recommandations à suivre depuis la plantation du vignoble jusqu'à la manipulation des produits, en passant par l'entretien des sols, la protection du vignoble. .. Il se décline ensuite pour chaque région en tenant compte des caractéristiques locales. Une commission nationale sera chargée d'agréer les cahiers des charges régionaux pour assurer une cohérence nationale. Le groupe de travail se maintiendra pour aménager et réactualiser le référentiel en fonction des nouveaux apports de la recherche et pour rester à l'écoute des remontées du terrain en ce qui concerne notamment la faisabilité de tel ou tel point. Selon les régions, l'état d'avancement des dossiers varie. En Champagne, le référentiel sur la partie viticole est prêt et trois sites pilotes de production intégrée sont en place. Tous les participants se sont vu remettre un référentiel technique reprenant les conseils, un cahier d'exploitation pour consigner les opérations réalisées et un guide d'autodiagnostic. Une fois les outils en main, chacun avance à son rythme. En Bourgogne, le référentiel régional sera mis à disposition des vignerons intéressés dès la prochaine campagne. En Beaujolais, un guide des pratiques viticoles sera transmis à tous les exploitants au printemps 2001. L'objectif est de fédérer le plus grand nombre possible de vignerons. On a donc fixé, dans un premier temps, des objectifs de production raisonnée plus que de production intégrée. Pour le socle commun viticulture raisonnée comme pour le référentiel production intégrée, la démarche est volontaire. Le suivi des progrès se fait par un autocontrôle. En revanche, si l'exploitant souhaite valoriser ses efforts et revendiquer le terme ' production raisonnée ', il devra faire réaliser un contrôle externe pour obtenir la qualification de son exploitation. Les modalités devraient être précisées dans le décret. ' Dans tous les cas, la partie d'autodiagnostic est essentielle car elle permet au vigneron de se situer dans la démarche, de voir ses points forts, ses faiblesses, puis ses progrès ', constate un technicien. Autre point important pour mener à bien la démarche : le travail de groupe, qui permet l'échange d'informations avec ses collègues et l'encadrement technique. ' Les outils pour mettre en oeuvre une démarche de production raisonnée ou intégrée en viticulture existent. La mise en pratique et le développement dépendront de la volonté des professionnels ', prévient un conseiller technique.