Les recettes locales ne font plus les comptes des taxes dont sont redevables les vignerons. En contrepartie, les formalités liées à la circulation des vins sont allégées.
'A partir du 1er août 2001, tout le monde devra être dans les clous ', prévient la Direction générale des douanes. Il reste donc aux vignerons et aux coopératives un peu plus de cinq mois pour intégrer toutes les subtilités de la réforme des contributions indirectes. Les négociants devront appliquer l'ensemble des nouvelles dispositions après le 1 er janvier 2002, soit au début de leur prochain exercice commercial.Cette période transitoire ne sera nullement trop longue. Jusqu'à présent, seul le plus facile a été fait, à savoir : la mise en place d'un statut unique pour tous ceux qui produisent, stockent ou vendent du vin. Il s'agit du statut d'entrepositaire agréé. Cet entrepositaire a une obligation : fournir une déclaration récapitulative mensuelle de son activité, où il calcule lui-même les droits dont il est redevable. Et les producteurs devaient remettre leur première déclaration au plus tard le 5 février. En Bourgogne où la réforme fut expérimentée, des vignerons se plient déjà à cette formalité depuis septembre dernier. Pour beaucoup, c'est la conséquence la plus lourde de l'entrée en vigueur de la réforme. C'est la fin d'une époque où l'on pouvait se rendre auprès de sa recette locale, une liasse d'acquits et de congés sous les bras, en demandant : ' Bon alors, ça fait quoi ? ' Les fonctionnaires ou les correspondants locaux ne calculeront plus le montant des droits de circulation (ou accises) et des taxes Anda. Aux vignerons de le faire. Les douanes contrôleront après coup l'exactitude de leurs déclarations. Désormais, il faudra fournir, au plus tard le 5 de chaque mois, une déclaration récapitulative de l'activité du mois précédent. Il faudra le faire même, si l'on n'a rien vendu et, de ce fait, rien à payer. Ceux que la paperasse répugne trouveront-là un motif à attraper des maux de tête. Ils vivront également dans l'angoisse de s'être trompés et d'avoir à le payer à coup d'amendes. Pour les aider, les syndicats ont conçu des formulaires, souvent provisoires. Ils sont appelés à être perfectionnés afin qu'il soit plus aisé de les remplir et qu'ils servent à la déclaration des accises et à celle des cotisations volontaires obligatoires. Toutes les régions affichent ce second objectif. Mais toutes n'y sont pas parvenues. La plupart des formulaires de déclaration récapitulative mensuelle sont appelés à évoluer pour une autre raison. En principe, ils devraient être extraits des registres de caves. Or, ceux ouverts au début de cette campagne ne sont pas conçus pour cela. De nouveaux registres sont à l'essai. Ils ne seront pas au point avant plusieurs semaines. Alors seulement, ils seront diffusés à grande échelle. Et tout le monde devra les tenir. Plus question, disent les douaniers, de tolérer qu'ils soient mal renseignés. Un producteur de vins d'appellation ou de pays y inscrira ses volumes agréés en entrée. Lors de chaque sortie, il notera les références aux documents qui accompagnent le transport, au contrat d'achat et au certificat d'agrément. Lorsqu'il déclassera une cuve en vin de table ou en repliera une autre vers une appellation de rang inférieur, il le consignera. L'administration veut disposer de moyens pour suivre les mouvements de chacun des vins détenus dans une cave. Elle accorde aux opérateurs un jour pour inscrire une entrée et trois jours pour consigner une sortie. Seuls ceux qui réalisent moins de dix opérations par an peuvent se contenter de noter les entrées et les sorties sur leur déclaration de récolte. Les autres pourront se simplifier la vie avec l'informatique. Cependant, là encore, les choses ne sont pas prêtes. Lors de notre enquête, nous n'avons trouvé que quelques domaines où les registres et les déclarations sont informatisés. Dans la plupart des départements, les syndicats en sont réduits à attendre que les douanes se prononcent sur les systèmes utilisables. Cette avalanche de formalités catastrophe les uns. Ils auront besoin du soutien de leurs syndicats et de la compréhension des services de contrôle jusqu'à ce qu'ils assimilent les nouvelles exigences. Les autres n'y voient rien que de très normal. La plupart des présidents ou des administrateurs de syndicats sont de cet avis. Selon eux, la comptabilité réclamée par l'administration devrait déjà être tenue par toute entreprise digne de ce nom, ne serait-ce que pour la précision de sa gestion. Quant aux douanes, elles rappellent que les registres sont obligatoires depuis 1975. Ils seront contrôlés plus strictement. C'est la contrepartie de la suppression des vingt-neuf titres nationaux de mouvement et de la facilité avec laquelle leurs remplaçants seront accordés. En principe, congés, laisser-passer, acquits et autres passavants devaient disparaître au 1 er janvier. Mais les douanes n'ont pas pu fournir les nouveaux imprimés. Pour cette raison, la Direction générale a maintenu l'utilisation des registres confiés jusqu'à leur épuisement, au plus tard le 1 er juillet de cette année. Les vins en suspension de droits doivent voyager avec le DAA ou sa version personnalisée, le DAC. Les vins en droits acquittés circulent avec une CRD, le DSA ou le DSAC. La première est obligatoire pour les bouteilles de moins de 3 l quittant la propriété. Les nouveaux textes ne prévoient pas qu'elles puissent circuler uniquement avec un document d'accompagnement. Lors d'un enlèvement en vrac à la propriété, les vignerons auront affaire à un DAA ou à un DAC, établi par le transporteur ou le négociant. Comme par le passé, ces imprimés devront être validés. Cependant, l'administration a simplifié cette formalité. Elle propose deux solutions qui évitent de se rendre dans les recettes locales. Pour en bénéficier, il faut d'abord avoir signé une convention de domiciliation avec son receveur des douanes. On peut alors obtenir des documents prévalidés. L'administration n'en distribuera pas plus de deux cents par opérateur lors de cette campagne, et prévient qu'elle n'en donnera plus que cent après le 31 juillet. Pour les caves particulières (CNCP), ces documents devraient être distribués sans restriction. La Direction générale des douanes s'y oppose en plaidant pour une autre solution : les machines à timbrer. Elles permettent aux opérateurs de valider eux mêmes leurs documents et ils peuvent les acheter collectivement. La discussion n'est pas close. ' Si les producteurs restent fermes, l'administration centrale cèdera ', pronostique un service départemental de la viticulture. Les textes prévoient d'autres simplifications. Désormais, un propriétaire peut transférer du vin entre ses chais situés dans la même aire de production, en l'accompagnant d'un document d'identification. Le petit vrac (récipients de moins de 33 l) qu'un particulier vient retirer au chai voyagera plus légèrement.Une dernière mesure est à l'étude : l'élargissement de la dispense de cautionnement. Pour l'instant, tous les producteurs en bénéficient pour les vins qu'ils détiennent en stock. Mais s'ils veulent expédier des vins en s'acquittant mensuellement des droits, ils doivent présenter une caution bancaire. L'administration s'assure ainsi de récupérer les taxes en toutes circonstances. Elle envisage de dispenser de cette formalité ceux dont les ventes à la consommation (au particulier, à un débitant de boissons) génèrent moins de 9 510 F/an de droits (accises et taxe Anda). Elle accorderait la même dérogation à ceux qui expédient en suspension de droits moins de 250 hl/an de vin. Voilà pour les grands traits d'une réforme qui simplifiera la vie de ceux que la paperasse n'impressionne pas et compliquera celle des autres.