En Allemagne, pays culturellement attiré par la bière, les publicités sur le vin français sont très informatives pour rassurer le consommateur. L'art de vivre à la française passe au second plan.
Alors que l'Allemagne représente la première destination pour les exportations du marché viticole français, les campagnes de publicité des vins made in France ne foisonnent pas. Au contraire. Excepté l'incontournable CIVB (Comité interprofessionnel des vins de Bordeaux), peu d'opérateurs français posent leur étendard outre-Rhin. Les marques françaises préfèrent, en premier lieu, assurer leur présence dans les linéaires de la grande distribution, où les places sont chères. Le référencement implique des frais de promotion élevés (tête de gondole, prospectus, animations), laissant peu de latitude pour des campagnes de publicité destinées au grand public.Avec une consommation par habitant de 23,15 l de vin tranquille par an, l'Allemagne représente un beau potentiel. 50 à 52 % des vins consommés sont produits dans le pays. Parmi les 48 % de vins importés, l'Italie occupe la première place (40 %) grâce à l'importance de sa gastronomie. La France totalise 35 % des importations, suivie par l'Espagne (10 %), l'Europe centrale (8 %) et les vins du Nouveau Monde (8 %). ' Les vins français connaissent une période de régression depuis 1999, analyse Charles Collard, directeur du bureau Sopexa à Dusseldorf. Leur image reste positive dans le marché haut de gamme, supérieur à 10 deut- sche Mark (33,50 F). Mais celui-ci ne représente que 8 à 9 % des ventes. En revanche, le rapport qualité/prix des vins français s'est sérieusement détérioré sur le milieu de gamme, compris entre 5 et 10 deutsche Mark. La concurrence italienne et allemande y est très forte. L'image française n'est pas assez moderne, comme en témoignent les habillages trop classiques. ' L'atomisation de notre offre crée un handicap supplémentaire face à une distribution très concentrée. La présence publicitaire des vins français était équivalente à leur part de marché en 1998, à savoir 17 %. En 1999, la part de la communication des vins français est passée à 7 %. ' Au même moment, le négociant américain Gallo débloque un investissement publicitaire seize fois supérieur à sa part de marché, poursuit Charles Collard. Avec une part de marché de 1 %, Gallo investit 6,5 millions de deutsche Mark et s'achète une tradition en montrant les deux frères fondateurs de l'entreprise. Sans compter que cette société injecte plus de 12 millions de francs en communication hors média. ' Dans ce contexte peu florissant pour le marché viticole français, les vins de Bordeaux maintiennent leur pression publicitaire, avec un investissement de 19 millions de francs pour l'année 2000. A l'inverse de la communication anglaise très sensuelle, le ton de la publicité allemande est résolument informatif. Le texte tient toujours une place importante dans les publicités en Allemagne, les consommateurs étant peut-être plus rationnels qu'ailleurs : peu initiés à la dégustation du vin, les Allemands ont besoin d'explications pour être rassurés. 65 % des consommateurs sont occasionnels, la bière occupant de loin la première place dans les achats d'alcool, avec une consommation moyenne de 150 litres par an. Soit six à sept fois plus que le vin. Le caractère traditionnel des vins français, couplé avec un certain art de vivre, est assez souvent mis en avant. Sur l'un des visuels du CIVB, un homme dans un hamac tient un verre de vin blanc à la main... Les Français savent profiter de la vie. Les vins de Bordeaux n'occupent pas seuls le devant de la scène allemande. Ils ont été rejoints l'an dernier par les vins de table et de pays, dans le cadre d'une communication globale en Europe du Nord. Orchestrée par l'Anivit (l'interprofession nationale des vins de table et de pays), cette communication mise également sur la simplicité et les symboles français avec une image très dépouillée : un verre de vin et un morceau de pain, surlignés d'un message ' Restons simples '. 7 MF ont été attribués à cette campagne 2000, qui devrait être reconduite pour l'année 2001. L'UIVB (Union interprofessionnelle des vins du Beaujolais) a elle aussi jeté son dévolu sur l'Allemagne, son premier client avec 7 % des vins exportés. C'est une première pour cette structure. Cette communication expose les beaujolais villages dans une ambiance de pique-nique, les plaçant délibérément dans un univers différent de celui des beaujolais primeurs. L'accroche ? ' Les beaujolais villages, mûrs comme un grand vin rouge, fruités comme un primeur '. En marge de la photographie, un petit texte explique que les beaujolais villages sont des vins de garde, contrairement aux primeurs, et qu'ils accompagnent parfaitement la cuisine printanière et les pique-niques.