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Un indicateur évalue l'impact des phytos sur l'environnement

La vigne - n°119 - mars 2001 - page 0

La méthode mise au point par l'Inra de Colmar permet d'estimer l'impact des pesticides sur l'environnement et d'effectuer un diagnostic à l'échelle de l'exploitation.

Jusqu'à présent, le choix d'un produit phytosanitaire s'appuyait essentiellement sur son efficacité, son prix et ses contraintes d'application. Depuis quelques années, les utilisateurs ont aussi pris en compte l'effet de ces produits sur les auxiliaires comme les phytoséides. La méthode mise au point à l'Inra de Colmar dans le cadre du Réseau vignes et vins septentrionaux, et en collaboration avec l'interprofession champenoise et l'ITV, va plus loin et classe les produits selon leur impact sur l'environnement. Une information particulièrement utile pour tous ceux qui travaillent en viticulture raisonnée ou intégrée. ' A l'origine, le système a été mis au point pour les grandes cultures, explique Philippe Girardin, en charge de ce travail à l'Inra de Colmar. Il a donc fallu l'adapter pour la viticulture en tenant compte de deux problèmes spécifiques : les effets de la dérive et l'impact sur les auxiliaires. 'L'impact environnemental des pesticides est évalué sur plusieurs compartiments : l'eau de surface, l'eau de profondeur et l'air. Le risque lié à l'entraînement vers les eaux de surface dépend de plusieurs variables : le risque de ruissellement selon les caractéristiques du terrain (type de sol, pente...), la distance par rapport à une rivière, la persistance du produit et la toxicité pour les organismes aquatiques. Le risque lié à l'entraînement vers les eaux de profondeur dépend, lui, de la lessivabilité du pesticide, du risque de lessivage (lié à la teneur du sol en matière organique) et de la toxicité du produit pour l'homme. Le risque lié à la propagation dans l'air provient de la volatilité du pesticide, de sa persistance et de sa toxicité pour l'homme. Un autre risque appelé dose est lié à la quantité de matière active utilisée. Un module spécifique à la viticulture concernant le risque pour les auxiliaires a été ajouté. Il est calculé en fonction de l'impact des pesticides sur les phytoséides, les connaissances étant trop limitées sur les autres auxiliaires. La dérive, liée au type de matériel de pulvérisation et aux réglages, a aussi été prise en compte. ' Nous avons retenu quelques paramètres facilement mesurables permettant d'estimer la dérive : le type de pulvérisation (porté, projeté, pneumatique, hélicoptère, face par face, voûte, canon oscillant...) mais aussi l'utilisation de panneaux récupérateurs, la fermeture des certaines buses pour les premiers traitements... La taille des gouttes, en revanche, n'a pas été prise en compte car elle est trop difficile à mesurer dans la pratique ', explique Marie Thiollet, de l'Inra de Colmar. Le système mis au point permet de calculer le risque lié à une matière active sur un compartiment donné de l'environnement selon la dose utilisée, le type de pulvérisateur et en tenant compte des paramètres du milieu comme la nature et la profondeur du sol, la pente... Les risques obtenus sur chaque compartiment sont agrégés à l'aide d'un système expert. On obtient alors le risque global pour la matière active considérée. Si un produit est constitué de plusieurs matières actives, un risque lié au produit est calculé. Pour obtenir un indicateur pour un traitement donné, on agrège les indicateurs obtenus pour les différents produits utilisés lors de ce traitement. En agrégeant les indicateurs de chaque traitement, on obtient un indicateur pesticide pour une parcelle sur l'ensemble de l'année. Cela permet d'évaluer l'impact environnemental d'une campagne de traitements phytosanitaires et de voir quels sont les compartiments touchés. Trois cent quatre-vingts produits phytosanitaires ont été testés, soit environ 130 matières actives. Au cours de la campagne 2001, l'indicateur appelé ' I-PHY ' sera expérimenté dans quelques exploitations à partir des programmes effectués afin de valider le système. ' Cela permettra de voir si, lorsque l'indicateur calculé par le système est mauvais sur tel ou tel compartiment, on enregistre effectivement une pollution du milieu et inversement ', explique Philippe Girardin. Le CIVC, l'ITV et l'Inra de Colmar ont prévu de publier, à l'automne prochain, une note nationale classant les produits selon leur impact environnemental. Ensuite, le logiciel permettant de calculer l'indicateur devrait être diffusé sous des conditions qui restent à définir. Il sera possible de réaliser un conseil agronomique individualisé à la parcelle. Pour chacune, les données concernant les caractéristiques simples du milieu, le matériel utilisé et le programme de traitement seront rentrées dans le logiciel qui calculera la valeur de l'indicateur. Cela favorisera le diagnostic à la parcelle et pour l'exploitation, afin de voir l'évolution d'une année sur l'autre. On pourra aussi réaliser une simulation en remplaçant tel produit par tel autre. ' Comme cela se fait dans les centres de gestion, il serait aussi envisageable de réaliser des analyses de groupe afin de situer chaque vigneron par rapport à ses collègues ', indique Philippe Girardin. Dans le cadre d'une démarche de qualification de l'exploitation en production raisonnée, les viticulteurs pourraient adhérer à un tel système de diagnostic, les données fournies restant confidentielles. Cet outil couplé à d'autres pourrait servir à l'autodiagnostic. A cet indicateur ' Pesticides ', maintenant au point pour la viticulture, les chercheurs de l'Inra de Colmar vont en ajouter d'autres afin de disposer d'un véritable tableau de bord environnemental de l'exploitation. L'indicateur ' Couverture du sol ' est presque terminé. Il permettra d'évaluer l'érosion selon le type de couverture (couverture pérenne, mulch, semis, paillage...) et le pourcentage couvert. D'autres indicateurs seront étudiés : la gestion de l'azote, des matières organiques et du phosphore, celle des déchets au niveau de l'exploitation...

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