Retour

imprimer l'article Imprimer

archiveXML - 2001

Les antimildious ne retardent pas la maturation

La vigne - n°120 - avril 2001 - page 0

Les principaux antifongiques visant le mildiou n'ont pas d'incidence sur la maturation des raisins de cabernet sauvignon. Ceci infirme une appréhension.

Délicate mission : comparer des raisins issus de vignes traitées régulièrement contre le mildiou à d'autres raisins issus de vignes jamais traitées. En France, c'est impossible car on ne trouve pas de raisins non traités et, qui plus est, sains... Les chercheurs bordelais sont donc partis au Chili. On y trouve des terroirs très peu propices au développement de cette maladie cryptogamique ; les parcelles non traitées produisent des raisins sains. Le travail sur l'évaluation de l'impact des antimildious a donc pu y être effectué à partir de raisins parfaitement comparables. Malgré la différence de climat avec les terroirs bordelais, cette étude est pertinente.Depuis la généralisation de l'utilisation de produits de synthèse pour la lutte contre les maladies cryptogamiques, de nombreuses études se sont orientées vers leur toxicité et leurs effets sur l'environnement. Les résidus des molécules ont été mesurés, et surtout leurs conséquences sur le déroulement des fermentations alcooliques et les défauts olfactifs qu'ils engendrent. Mais jamais l'influence sur la croissance des fruits et leur composition n'a été étudiée. Cela est maintenant chose faite. La comparaison s'est déroulée en 1999 sur une parcelle chilienne de cabernet sauvignon, dont la densité est de 4 166 ceps/ha. Les molécules testées sont le cuivre (Bouillie bordelaise RSR), le folpel (Folpan), un mélange de fosétyl-Al et de folpel (Mikal flash). Les traitements ont été effectués à raison de 100 l de bouillie à l'hectare, sur chaque face de la végétation et en respectant les doses homologuées. Ainsi, le cuivre a été appliqué à 3 000 g/ha, le folpel à 1 500 g/ha, l'association fosétyl-Al et folpel aux doses respectives de 2 000 g/ha et 1 000 g/ha. Entre le début de la floraison et la fin de la véraison, quatre programmes de traitements ont été comparés à une parcelle témoin non traitée. Ces modalités sont : dix folpel espacés de dix jours ; sept folpel suivis de trois cuivre (à partir de la fermeture de la grappe) avec une cadence de dix jours ; neuf folpel suivis d'un cuivre (à la fin de la véraison) avec une cadence de dix jours ; huit Mikal espacés de quatorze jours. La comparaison des raisins concernait sept facteurs : le pourcentage de véraison, la concentration en sucres, l'acidité totale, le pH, les teneurs en anthocyanes totales et extractibles, le thiol qui participe à l'arôme variétal du cabernet sauvignon, et les résidus des matières actives. L'application d'un produit antimildiou engendre un pourcentage de baies vérées plus important, que ce soit à mi-véraison et à la fin de la véraison. Ainsi, les vignes traitées au folpel suivi de un ou trois traitements au cuivre sont les plus avancées : 46 % des baies sont vérées soixante-dix jours avant la récolte. Les grappes de la parcelle témoin non traitée ne sont vérées qu'à 25 %.Mais cette avance sur le mûrissement s'estompe rapidement : soixante-cinq jours avant la récolte, les parcelles traitées sont vérées à 88 % contre 72 % sur le témoin. Si les traitements accélèrent la véraison, ils ne favorisent pas significativement la progression de la concentration en sucres, ni celle du pH, ni la baisse de l'acidité totale. Les traitements antimildious n'ont pas non plus d'incidence défavorable sur les teneurs en anthocyanes des raisins et des vins. Alors que la concentration totale en anthocyanes est supérieure dans le cas d'un traitement au folpel suivi d'un cuivre, la différence n'est pas significative pour un folpel avec un fosétyl-Al. Les écarts entre les teneurs en anthocyanes extractibles ne seraient pas significatifs non plus. Un arôme variétal du cabernet sauvignon est le 3-mer- captohexanol. La concentration de ce thiol est influencée par les traitements que subit la vigne. Mais, pas dans le même sens. Les trois constats de cette expérimentation amènent à des interrogations. L'arôme est très faiblement présent dans les raisins ayant reçu un ou plusieurs traitements cupriques. Ceci pourrait s'expliquer par la forte teneur en cuivre dans le moût pouvant interférer. La parcelle traitée avec le mélange folpel et fosétyl-Al donne des raisins dont la teneur en thiol est plus faible que sur la parcelle témoin. Cette observation n'a pas pu être validée statistiquement. De plus, la faible réactivité de l'aluminium avec ce thiol ne permet pas d'expliquer cet écart. Des essais à Bordeaux ont mis en évidence une teneur plus élevée de ce thiol dans les moûts issus de vignes traitées au folpel. Ces différentes observations amènent à une interrogation sur le rôle ' protecteur ' que pourraient avoir les composés soufrés volatils produits lors de la dégradation du folpel sur le précurseur de l'arôme. La teneur en résidus a aussi fait l'objet d'analyses, dont les résultats figurent sur l'infographie. Les résidus sont bien évidemment plus présents dans les moûts issus des parcelles traitées. De plus, on remarque que leurs teneurs sont supérieures aux teneurs retrouvées dans des moûts issus de parcelles traitées en Hexagone. La différence de climat ou la présence de mildiou contribueraient-ils à la dégradation de ces molécules ? Malgré des légères différences concernant certains des sept facteurs comparés, des études statistiques ont amené les chercheurs à conclure que ces écarts n'étaient pas significatifs. Seules des interrogations se posent au sujet de l'influence des traitements cupriques sur la baisse du thiol. Les teneurs en résidus sont plus importantes, mais cela pouvait être prévisible. Grâce à cette étude, il est donc légitime de penser que les traitements antimildious n'ont pas d'incidence négative sur la maturation, ni sur la composition des raisins de cabernet sauvignon.

Cet article fait partie du dossier

Consultez les autres articles du dossier :

L'essentiel de l'offre

Voir aussi :