Pendant deux à trois semaines au cours du mois d'avril, les stades phénologiques n'ont guère évolué. Il faisait trop froid. Les températures ont aussi retardé les contaminations primaires.
Fin mars, tout était réuni pour que le mildiou se manifeste très tôt : les oeufs d'hiver étaient déjà mûrs dans plusieurs vignobles et les températures restaient douces. Mais le mois d'avril, trop frais, n'a pas permis à ce parasite de s'exprimer aussi tôt qu'on le craignait, comme le résume Gilbert Sanchez, à la chambre d'agriculture d'Aubenas : ' Quand on avait la pluie, la température n'était pas suffisante ; quand les conditions étaient réunies, la vigne n'était pas assez développée. ' Début avril, dans le Bordelais, en Bourgogne et en Savoie, des contaminations primaires ont été possibles. Cependant, l'incubation a été exceptionnellement longue, et la sortie des taches issues de ces premières contaminations a tardé. Le 2 mai, on les attendait en Bourgogne ; elles devaient apparaître le 8 mai à Chignin, en Savoie. Dans le Bordelais, elles étaient observées le 30 avril dans le Médoc et la région de Saint-Emilion ; mais le service régional de la Protection des végétaux soulignait que ces sorties étaient de très faible intensité et qu'il fallait, pour permettre des repiquages à partir de ces premiers symptômes, une température nocturne d'au moins 13°C pendant 5 heures pour que la sporulation soit possible. Or, début mai, les nuits étaient encore bien plus froides.En Bourgogne comme en Aquitaine, ces services d'avertissements agricoles s'interrogeaient aussi sur la vitalité du mildiou issu de ces contaminations, après une période d'incubation aussi longue. Dans le Sud-Est, une climatologie fraîche mais pas très pluvieuse en avril n'a pas permis aux contaminations primaires, possibles dès le 7 avril, de s'exprimer avant la dernière décade d'avril, mais les sorties de taches étaient très éparses. En Maine-et-Loire, l'intensité des pluies a été suffisante pour provoquer des éclaboussures sur les premières feuilles ; mais compte tenu des températures trop froides, ces pluies n'ont pas pu être contaminatrices. En Midi-Pyrénées, les toutes premières taches étaient observées sur le Madirannais le 20 avril, à la suite des contaminations du 6. Cependant, fin avril et début mai, à la faveur d'une remontée des températures, les conditions devenaient plus favorables au mildiou et, un peu partout, on s'attendait à découvrir les premiers foyers début mai. Dans ces conditions, les premiers traitements se généralisaient. ' Même si cela reste une année précoce pour le mildiou, on s'attendait à un départ encore plus rapide ', témoigne Jean-Louis Brosseau, dans le Muscadet. ' Mais les températures d'avril n'ont pas calmé le mildiou, le potentiel reste très élevé ', ajoutait, début mai, son collègue de l'Yonne. ' Le risque est fort ', confirme-t-on en Ardèche, mais aussi dans le Loir-et-Cher. Même chose dans le Jura, où l'on précise que la période fraîche du 6 au 23 avril n'a pas altéré le potentiel du mildiou, mais qu'elle a freiné la croissance de la vigne. En effet, la précocité signalée dans plusieurs régions début avril a fondu. ' Le débourrement était précoce mais, aujourd'hui, la vigne affiche seulement un petit retard de deux jours par rapport à l'année 2000 ', indique Marc Guichet, à la chambre d'agriculture des Pyrénées-Orientales. ' Les cépages tardifs avaient dix jours d'avance début avril, les précoces en affichaient cinq. Mais pendant trois semaines, avec des températures très fraîches, la vigne n'a pas poussé, et cette avance a fondu comme neige au soleil ', explique-t-on dans l'Aude. ' Le stade végétatif a stagné pendant quinze jours ', ajoutait Guillaume Morvan, dans l'Yonne. ' La vigne a débourré vers la mi-avril, mais n'a pratiquement pas bougé ensuite. Le chardonnay étale à peine une feuille, et les autres cépages débourrent tout juste. On a dix jours de retard par rapport à la normale ', indiquait, le 2 mai, François Langellier, au Comité interprofessionnel du vin de Champagne (CIVC). ' On est revenu dans les normales saisonnières ', remarquait Marie-France Périllat, à la Protection des végétaux d'Aquitaine. Même chose dans les côtes-du-Rhône, où la vigne a perdu son avance. Mais le radoucissement enregistré fin avril permettait à la végétation d'évoluer enfin. ' Et si la chaleur revient, les maladies aussi ', soulignait un conseiller.