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Les négociants investissent le vignoble

La vigne - n°122 - juin 2001 - page 0

De plus en plus de négociants proposent ou imposent à leurs fournisseurs un suivi technique du vignoble. Ils poursuivent deux objectifs : améliorer la qualité et assurer la traçabilité des apports.

'A l'origine, nous avions une activité classique de négociant avec des achats de vin. Depuis 1996 et la mise en place de nos trois centres de vinification, nous recevons une partie de nos apports en raisins et nous sommes devenus vinificateur-éleveur. Nous avons constaté une amélioration sensible de la qualité des vins produits de cette manière. Nous avons voulu pousser la démarche plus loin en amont, en mettant en place une politique de suivi du vignoble avec nos fournisseurs ', explique Jean-Paul Malinge, directeur technique de la maison Rémy Pannier (Val de Loire).Pour la société Skalli (Hérault), le suivi du vignoble, initié depuis trois ans, permet d'obtenir le raisin adapté à un profil de produit. ' Nous avons quatre marques commerciales qui correspondent à quatre qualités. Nous identifions donc chez nos différents fournisseurs les parcelles qui produiront du raisin pour telle ou telle gamme et nous adaptons l'itinéraire technique. Il faut donc apprendre à travailler de façon ciblée selon le résultat souhaité et s'intéresser aux gestes de qualité qui permettent d'apporter une valeur ajoutée ', indique Pierre Gouttenoire, responsable des achats de raisin chez Skalli. L'un des précurseurs en matière de suivi de l'amont est probablement la société Yvon Mau (Gironde), qui a créé son club des produteurs en 1994. ' L'objectif est d'établir un partenariat durable entre le négoce et le producteur afin de faire progresser la qualité ', rappelle Christophe Mangeart, animateur du club, qui réunit près d'une cinquantaine de vignerons. Dans tous les cas de partenariats cités, des contrats sont établis entre le négociant et chacun de ses fournisseurs. Ils peuvent être annuels chez Yvon Mau, sur trois ans pour les deux gammes les plus prestigieuses de Skalli, et tacitement reconduits tant qu'ils ne sont pas dénoncés pour les deux autres marques. Pour Rémy Pannier, ils durent cinq ou dix ans. La société Baron'arques, créée en 2000, s'appuie sur un partenariat un peu différent entre un négociant, la société bordelaise Baron Philippe de Rothschild, et une cave coopérative, Les vignerons du Sieur d'Arques. L'objectif est d'élaborer un grand vin rouge à partir de parcelles sélectionnées chez les adhérents. Lorsque les relations négoce-viticulture ne sont pas contractualisées, le négociant peut malgré tout donner des indications sur ce qu'il souhaite, notamment en terme de charge. Le vigneron est alors libre de suivre ou non ces directives mais, au final, si la qualité n'est pas au rendez-vous, le négociant peut refuser le lot. Des cahiers des charges plus ou moins stricts sont mis en place. Chez Rémy Pannier, il est très détaillé et fixe les objectifs, les recommandations et les obligations liées aux pratiques de la fertilisation à l'entretien du sol, en passant par les traitements, les analyses... Les vignerons doivent par ailleurs tenir un cahier d'exploitation afin d'assurer une totale traçabilité. Par le biais de ses deux ingénieurs, le négociant apporte un appui technique sur le terrain et organise une formation à la lutte raisonnée. La société Skalli met également en place un cahier des charges adapté selon la gamme visée. Quatre visites officielles sont aussi organisées chaque année sur les parcelles sélectionnées afin de contrôler le travail effectué. Enfin, tous les quinze jours, les fournisseurs reçoivent un bulletin d'information concernant les traitements éventuels et les produits conseillés. Chez Yvon Mau, on donne aux vignerons partenaires un guide d'orientation avec les principes de base, mais il s'agit plus de suivi et de conseil que de contrôle. Des formations sont aussi mises en place pour aider les fournisseurs à acquérir les outils et la méthode de la traçabilité. La demande des acheteurs se fait en effet de plus en plus pressante en ce sens. C'est d'ailleurs dans un souci de traçabilité que la société Mommessin, dans le Beaujolais, met en place des cahiers de culture et de vinification pour ses fournisseurs. ' Nous pourrons ainsi répondre à toutes les questions ou objections de nos acheteurs. Selon les cas, le vigneron apporte la totalité ou une partie de sa production (en raisin, moût ou vin) au négociant. Le travail que nous effectuons avec nos fournisseurs amène une plus-value très nette au vignoble. Nous ne souhaitons donc pas que le fruit de nos efforts profite à nos concurrents. Nous acceptons un apport partiel seulement à la condition que le volume conservé par le vigneron soit directement valorisé en bouteilles et par ses soins ', explique un responsable d'achat.Conscient du fait que les efforts consentis par les vignerons doivent être récompensés, chaque négoce établit son mode de valorisation. La société Baron'arques exige, par exemple, que la récolte des parcelles sélectionnées soit faite en cagettes de 12 kg alors qu'elle est habituellement réalisée en box de 300 kg ou mécaniquement. ' Nous rémunérons la cave coopérative en conséquence et c'est elle qui se charge de répercuter la prime aux adhérents concernés ', explique Vincent Montigaud, directeur général. Chez Yvon Mau, une dégustation anonyme des vins des membres du club est organisée à l'issu de l'élevage. Ils sont classés en cinq catégories. En catégorie A ' excellent ', la rémunération correspond à la moyenne interprofessionnelle à laquelle s'ajoute un bonus de 80 %. En catégorie D ' acceptable ', le bonus se situe entre 0 et 5 %. Chez Rémy Pannier, la prime est calculée par hectare et varie selon les appellations.

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