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Pour certains voisins, irriguer peut rimer avec qualité

La vigne - n°124 - septembre 2001 - page 0

Les agronomes peaufinent le pilotage de l'irrigation pour apporter l'eau strictement nécessaire aux objectifs de qualité de la vendange.

Dans certaines régions, la culture de la vigne n'est envisageable qu'avec un apport d'eau. Pour de nombreux pays viticoles, l'irrigation n'est pas seulement une nécessité ; elle est aussi et surtout devenue un facteur de qualité. L'irrigation a été au centre de l'une des journées techniques du Gesco (Groupe d'étude des systèmes de conduite de la vigne), qui s'est déroulée le 3 juillet dernier à Montpellier. Les exposés de différents chercheurs, venus de tous les pays viticoles, montrent combien leur approche de l'irrigation est différente de la nôtre. Des expérimentations sont menées pour savoir à quels moments et à quelles doses l'irrigation est la plus efficace. Ces objectifs ont deux origines distinctes. La première est liée à la qualité de la récolte. La seconde est tout simplement l'économie d'eau, car la gestion des ressources en eau est devenue une préoccupation mondiale. Le goutte-à-goutte est le mode d'irrigation qui est retenu pour sa moindre perte d'eau, en comparaison avec l'aspersion, la micro-aspersion ou l'inondation.
En Australie comme en Afrique du Sud, l'irrigation fait partie de l'ensemble des facteurs de la conduite d'un vignoble. Elle est l'un des paramètres participant à la détermination des choix techniques lors de l'établissement du vignoble : préparation du sol, densité, palissage, porte-greffe, et cépage... Ensuite, l'itinéraire technique et l'irrigation sont déterminés en parallèle.
Une technique d'irrigation originale a été exposée par un chercheur australien. Elle n'existe que depuis six ans, mais se développe avec succès sur le continent. Elle consiste à n'irriguer qu'une partie des racines. Le réseau de goutte-à-goutte est conçu afin d'irriguer alternativement chaque côté du rang. L'inversion de la zone arrosée avec celle qui ne reçoit pas d'eau peut se faire tous les dix à quinze jours. Cette méthode permet d'économiser 50 % d'eau, tout en apportant le volume suffisant au développement de la vigne. Du côté non alimenté, les racines produisent davantage d'acide abscissique. Cette hormone agit sur les stomates des feuilles et induit leur fermeture. L'évapotranspiration de la vigne est donc plus faible et les besoins en eau réduits. Cette méthode permet de créer un stress hydrique localisé. On obtient donc la réponse biochimique à ce stress sans ses effets indésirables sur la récolte. Les racines du côté asséché sont alimentées en eau par celles irriguées et ne dépérissent pas. Cette méthode permet d'économiser l'eau, tout en garantissant une bonne qualité de raisins.

L'irrigation fait toujours l'objet d'études afin de définir, au niveau d'une parcelle et de façon pratique pour le vigneron, à quel moment débuter les apports d'eau dans la saison, quand les arrêter et combien d'eau apporter. Les rythmes et les doses des apports doivent aussi être raisonnés. Ce pilotage dépendra du type de raisin recherché. Ainsi, si l'on désire faire du moût concentré, on veille à éviter toute contrainte hydrique. Pour du raisin de vin de table, la contrainte sera maintenue faible, tandis que pour du raisin destiné à un vin de haute qualité, on laissera apparaître une contrainte hydrique dès la nouaison dont on maîtrisera la progression jusqu'à la maturité.
En Californie, certains ne commencent l'irrigation qu'en fonction du calendrier, d'autres lorsque la sonde à neutrons indique un niveau de déficit hydrique seuil, et d'autres à partir de la mesure du potentiel hydrique foliaire en mi-journée. Une fois l'irrigation débutée, il est pourtant possible de déterminer les cadences en fonction du coefficient cultural de la parcelle. Ce dernier est fonction de paramètres : sol, écartement entre les rangs, et surface foliaire. La recherche se penche donc sur la détermination de ce coefficient, propre à chaque parcelle et qui évolue avec la saison.

Tandis que nos concurrents s'interrogent sur l'amélioration du pilotage de l'irrigation, en France, le débat porte toujours sur son autorisation. Seules sept appellations ont prévu la possibilité d'irriguer dans leurs décrets. L'Inao se penche sur cette question, mais on souligne que ' l'irrigation doit être exceptionnelle pour être crédible dans les AOC '. Cette possibilité exceptionnelle d'apporter de l'eau à des vignes en fort stress hydrique, est justement ce que demandent des vignobles méditerranéens.
A la clôture de la journée, Jacques Gravegeal, président des producteurs de vins de pays d'Oc, souligne que si les vignes de vin de pays ont besoin d'être irriguées, c'est bien pour améliorer la qualité du raisin et favoriser sa maturation, et non pas pour augmenter les rendements.
Bien que l'irrigation soit interdite, des essais sont conduits en France. La chambre d'agriculture du Gard teste une association enherbement-irrigation depuis deux ans. D'après les premiers résultats, l'enherbement permet de réduire le rendement, l'irrigation favorise la maturation. L'essai se poursuit pour confirmer ces résultats. Cette association serait peut-être la réponse adaptée à la viticulture française.

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