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Stabiliser la couleur dès la macération

La vigne - n°125 - octobre 2001 - page 0

Les anthocyanes, responsables de la couleur, sont plus stables polymérisées. La quantité extraite, leur polymérisation et les conditions de stockage contribuent au maintien de l'intensité et de la teinte du vin.

La couleur est la première impression que nous donne un vin dans un verre. Son obtention, puis sa conservation méritent donc d'être travaillées. La couleur, qui dépend de la quantité d'anthocyanes extraites, est principalement influencée par le cépage et la maturité phénolique de la vendange. Autant la concentration en alcool et la température élevée pendant la macération favorisent l'extraction des composés phénoliques, autant les conditions physico-chimiques du vin peuvent être néfastes à sa stabilité tout au long de sa vie.

Pendant la macération, il ne faut souvent que trois jours pour arriver au maximum de l'extraction des anthocyanes. Avec la macération carbonique, la vitesse maximale de diffusion des anthocyanes n'est généralement atteinte qu'au bout de six jours. L'intensité colorante peut décliner après une trop longue macération car les anthocyanes extraites se fixent sur la matière solide, comme les rafles et les levures. Les polymères anthocyanes-tanins sont interactifs avec les parois des levures. A la fin de la fermentation alcoolique, les lies sont d'ailleurs rouge-bleu. Les levures peuvent dégrader une partie des anthocyanes.
Les vins issus de vendanges pourries sont sujets à la casse brune en raison de la présence de la laccase. Le vin devient un liquide alcoolique d'une couleur jaune sale, insipide, au goût et à l'odeur désagréables. Il est alors impropre à la consommation. Pour tester facilement la présence de la laccase dans un vin issu de raisin dont l'état sanitaire était médiocre, il suffit de prélever un échantillon et de le laisser à l'air libre. Si ce vin se trouble, s'irise à la surface, prend une teinte rouge brique, ou présente un dépôt jaune-brun et une saveur fade, c'est que cette enzyme est bien présente. Cette casse peut s'effectuer en l'espace de quatre heures à quatre jours. A titre préventif, une vendange malsaine mérite d'être chauffée afin de détruire l'enzyme responsable de la casse également sulfiter pour inhiber au maximum les réactions d'oxydation.

La tenue de la couleur du vin réside dans l'équilibre entre les concentrations en tanins et en anthocyanes. Pour éviter des précipitations, il faut veiller à ce que des anthocyanes soient polymérisées. Cette polymérisation nécessite de l'oxygène. C'est pourquoi des aérations par remontage à la fin de la fermentation aident à stabiliser la couleur. Le microbullage contribue aussi à polymériser les composés phénoliques. Cette micro-oxygénation peut démarrer dès la fin de la fermentation alcoolique sur des vins riches en composés phénoliques. Bien pilotée, elle amènera de la rondeur aux tanins.
Pour pallier le problème du déséquilibre anthocyanes-tanins, certains effectuent dès l'encuvage les assemblages entre différents cépages dont les équilibres sont complémentaires. ' En 2000, la syrah avait une couleur très prononcée, mais une structure tannique un peu faible. Nous avons donc décidé d'assembler avec un cépage structurant, mais pas aussi coloré ', explique un oenologue dans une cave du Languedoc. ' Avec une macération suffisamment longue, on arrive à extraire assez d'anthocyanes pour avoir un équilibre entre ces dernières et les tanins ', note un autre oenologue, faisant référence à une vendange dont la maturité phénolique est atteinte. Il existe trois types de condensations impliquant les anthocyanes. Si la température est maintenue trop basse (13 à 14°C), leur condensation est très limitée. Ces pigments de structure complexe sont peu sensibles aux variations de pH et au SO 2. La condensation des anthocyanes aboutit au maintien de la couleur rouge, voire à son augmentation.
La couleur n'est pas stabilisée tant que les condensations n'ont pas été réalisées. La couleur des vins jeunes est donc très sensible aux conditions du milieu : pH, SO 2, oxydation. Ainsi, avec la fermentation malolactique, des anthocyanes peuvent se décolorer, étant donné que le pH augmente sensiblement. Ces jeunes vins nécessitent des aérations, mais avec une protection raisonnable contre l'oxydation grâce au SO 2. L'oxydation ménagée contribue à la stabilisation de leur couleur. En barriques, il faut donc veiller à ouiller régulièrement.

Même si l'ajout de tanins à des fins de stabilisation de la couleur est interdit, ces derniers ont une action sur elle. Les ellagitanins extraits du bois, ajoutés à la fin de la fermentation alcoolique avec une aération, s'oxyderont de préférence, évitant que ce soient les anthocyanes qui prennent une teinte tuilée. Ces additifs contribuent à catalyser les combinaisons tanins-anthocyanes par le pont éthanal en présence d'oxygène. L'usage d'extraits de tanins du raisin (provenant des pellicules ou de pépins) a aussi une incidence sur la stabilisation de la couleur.

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