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Diuron et terbuthylazine : des re strictions en vue

La vigne - n°127 - décembre 2001 - page 0

La terbuthylazine risque fort d'être interdite. Le diuron se maintiendra au mieux à 1 200 g/ha/an. Ces deux matières actives contaminent trop souvent les rivières ou les nappes.

Pour la simazine, les choses sont claires. Il reste encore deux campagnes, puis elle sera interdite. Plus aucune application ne pourra avoir lieu après le 30 juin 2003. Comme l'atrazine, elle a le tort de contaminer les rivières et les nappes. Ces deux substances s'y trouvent en quantités trop faibles pour intoxiquer les hommes, les poissons ou les plantes aquatiques. Malgré cela, elles empoisonnent les relations entre les agriculteurs et les autres ruraux, ces derniers estimant qu'elles n'ont rien à faire dans les cours d'eau. Pour cette raison, le ministre a décidé de les interdire. Il a pensé que c'était le meilleur moyen de ramener la paix dans les campagnes.
Mais il reste deux autres fauteurs de trouble : le diuron et la terbuthylazine. Le premier est celui que l'Institut français de l'environnement (Ifen) détecte le plus fréquemment dans les cours d'eau, après l'atrazine et ses dérivés qui viennent en tête. La seconde apparaît tout de suite derrière l'atrazine dans les eaux souterraines. Ces observations portent sur le territoire national. Or, dans les vignobles, la terbuthylazine contamine les nappes et les rivières. ' On la détecte facilement quelles que soient les régions ', explique-t-on à la Protection des végétaux. Malgré cela, elle bénéficie d'un sursis. En juillet, le comité d'homologation qui s'était penché sur le sort des triazines, avait souligné que si on interdisait la terbuthylazine dans les vignobles, elle risquait d'être remplacée par le diuron. Cela reviendrait à supprimer une source de pollution pour en alimenter une autre. Epineux problème auquel le ministre de l'Agriculture s'est donné le temps de réfléchir et qui devait être étudié plus précisément le 7 décembre, lors d'une nouvelle réunion du comité d'homologation.

Chez Syngenta, on abordait cette échéance avec pessimisme. La firme, principale productrice de terbuthylazine, redoutait son interdiction. ' On ne peut pas discuter de viticulture avec le ministère de l'Agriculture, regrettait l'un de ses responsables. Le seul critère d'analyse est la norme de présence des produits phytosanitaires dans les eaux de boisson. Il n'est jamais question d'agronomie, ni d'économie. '
Histoire de prendre les devants, la société Syngenta a supprimé Prius de son offre et a cessé la fabrication de Carazol pour ne plus en écouler que les stocks. Ces deux herbicides étaient les derniers à apporter 3 000 g de terbuthylazine lors d'applications en plein, à la dose homologuée. Prius pro et Carazol pro les remplacent. Tous deux n'apportent que 1 500 g/ha de terbuthylazine à pleine dose. De plus, Syngenta conseille de les réserver au désherbage du rang, ce qui revient à n'épandre que 500 à 700 g/ha.
Syngenta espère sauver sa matière active avec ce programme de repli. Y parviendra-t-elle ? Ses chances sont bien minces et elle est bien seule à les défendre. Cet été, elle avait le soutien de l'Association générale des producteurs de maïs (AGPM) pour obtenir un maintien de l'atrazine à 500 g/ha/an. Là, aucun organisme viticole ne défend la terbuthylazine. Pire, la Champagne y a déjà renoncé et la Bourgogne vient d'en refaire le voeu pour la deuxième année consécutive. A cela s'ajoute une troisième défection, celle des services officiels de L'Arc méditerranéen (1). L'an dernier, dans leur note régionale sur le désherbage, ils préconisaient encore la terbuthylazine, certes avec quelques réserves. Cette année, dans leurs nouvelles recommandations, ils expliquent qu'il ne faut plus l'utiliser en dehors des vignes basses et étroites. Ils conçoivent qu'elles fassent l'objet d'un traitement différencié car elles sont difficilement mécanisables. Et comme elles sont rares dans le Midi, les pollutions, s'il devait s'en produire, seront circonscrites.

En face, Bayer et Griffin, défenseurs du diuron dans le cadre de l'homologation européenne, ont eux aussi réagi. Comme Syngenta, ils ont élaboré un plan de repli. Ils ont proposé au ministère de l'Agriculture de ne plus vendre la matière active seule, mais uniquement associée avec d'autres herbicides foliaires ou de prélevée. C'est à leurs yeux le meilleur moyen d'éviter des dépassements de doses, qui sont appelées à baisser.
Les deux industriels ont également proposé de passer de 1 800 à 1 500 g/ha/an de matière active. Avant même la réunion du comité d'homologation, le ministère de l'Agriculture leur a répondu que 1 200 g/ha/an lui paraissaient un maximum. A cette dose, le diuron ne peut pas tenir les vignes propres du printemps jusqu'aux vendanges. S'il n'est pas épaulé par une autre matière active de prélevée, il faudra l'utiliser lors d'un second passage, au début de l'été. Le foliaire auquel il sera associé grillera les herbes présentes à ce moment-là. Quant au diuron, il empêchera la levée des adventices estivales pendant deux mois et demi à trois mois. Il viendra après un désherbage, uniquement avec des produits foliaires, réalisé à la sortie d'hiver. ' L'efficacité moyenne d'une telle stratégie est bonne , affirme Eric Chantelot, de l'ITV de Nîmes. En revanche, les écarts à la moyenne peuvent être importants. Dans les parcelles où la flore exerce une forte pression, le diuron à dose réduite ne conviendra pas. De même, les années de forte pression, il faudra s'attendre à de faibles niveaux d'efficacité. '
Si elles sont adoptées, ces nouvelles restrictions augmenteront le coût du désherbage et provoqueront la disparition ou la reformulation de nombreux produits. Le temps où l'on pouvait tenir ses vignes propres en dépensant 600 F/ha dans une seule application au printemps sera révolu. Si l'on ne veut faire qu'un passage, il faudra compter au moins le double. On s'en sortira à meilleur compte si l'on opte pour un programme foliaire. Mais alors, il faudra prendre sa rampe deux à trois fois, au minimum, par saison.

(1) ITV, Protection des végétaux de Paca et du Languedoc-Roussillon, chambres d'agriculture de la Drome, de l'Ardèche, et des départements de Paca et du Languedoc-Roussillon


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