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Corse, l'île rejoint ses homologues du continent

La vigne - n°128 - janvier 2002 - page 0

La Corse bénéficie de l'afflux touristique grâce auquel elle écoule 70 % des volumes de ses AOC et 30 % de ses VDP, le reste devant être expédié sur le continent ou exporté. En 2001, les vins de pays de l'île de Beauté ont marqué un ralentissement. Malgré des disponibilités en hausse par rapport à la campagne 1999-2000, le chiffre d'affaires des vins vendus en vrac a diminué pour la seconde année consécutive. Cela s'explique par la baisse des volumes vendus en vrac et celle de leurs cours (- 6 % pour les VDP rouges et rosés et - 17 % pour les VDP blancs, entre les campagnes 1999-2000 et 2000-2001).
Avec ce retournement de tendance, la profession a réagi au niveau de la production. La conduite de la vigne en 2001 visait notamment des volumes plus restreints. La taille d'hiver, les vendanges en vert, l'enherbement dans les zones trop fertiles et la réduction des fertilisations étaient de mise. ' Nous avons informé les vignerons des difficultés dans les ventes des vins de qualité inférieure, et sur les techniques visant l'obtention de meilleurs raisins ', explique Yves Melleray, de l'Union viticole de l'île de Beauté. Pour accélérer ce processus, une baisse du rendement butoir en vin de pays a été décidée. Il est passé de 90 à 85 hl/ha. Ce millésime a, de surcroît, été marqué par une forte précocité de la vigne, qu'elle a exprimée du débourrement jusqu'aux vendanges. Malheureusement, cela s'est soldé par des gelées à la mi-avril. La sécheresse a parfois atteint des pieds qui ont enregistré un blocage dans leur maturation.

La réduction du rendement plafond s'est traduite par une réflexion générale au sujet des vins de pays. En effet, les professionnels considèrent que la dénomination ' vin de pays de l'île de Beauté ' n'est pas assez explicite pour conquérir des consommateurs à l'autre bout du monde. Deux dispositifs sont examinés. En premier lieu, rejoindre les vins de pays des Portes de la Méditerranée, dont le nom est considéré comme plus porteur. En second lieu, la profession envisage de créer une nouvelle dénomination de vin de pays qui ne contiendrait pas le mot Corse, pour éviter les ambiguïtés avec les AOC, mais qui porterait un nom qui tournerait autour du terme Corsica. ' On aboutirait à une gamme de trois vins de pays. Si nous réussissons à nous mettre d'accord rapidement sur les critères de ce nouveau vin de pays haut de gamme, ils pourraient être appliqués au millésime 2002 ', espère Bernard Sonnet, directeur de l'interprofession corse. De plus, la Corse s'est déjà décidée à rejoindre deux organismes nationaux. Tout d'abord, la Confédération française des vins de pays, pour bénéficier d'un accompagnement dans la valorisation de ses produits. Au niveau des appellations, l'interprofession corse va rejoindre le CNIV pour participer aux débats touchant les AOC. Enfin, la Corse souhaite réunir certains petits vignobles, comme le Jura ou la Savoie, pour mettre en place un dispositif d'observation des marchés sous l'égide du CNIV, adapté à leurs besoins spécifiques.
L'interprofession corse est par ailleurs ' bloquée ', car elle ne constitue pas une véritable interprofession pour deux raisons. En premier lieu, les caractéristiques fiscales propres à la Corse font qu'il n'y a pas de TVA sur les ventes de vins en Corse. Ensuite, l'interprofession regroupe à la fois des VDP et des AOC. ' Aujourd'hui, nous ne pouvons pas être une interprofession en temps que telle , explique Bernard Sonnet, mais nous allons le devenir. ' La Corse a vécu deux années de flottement, depuis que le contrat de plan Etat-région a commencé, en 2000. ' Aucune grande action n'a pu être engagée, étant donné le gel de certains financements. Heureusement que la région se porte bien ', confie Bernard Sonnet.

En outre, la Corse participe à la création du Comité international des îles vitivinicoles. ' L'association est née dans le bassin méditerranéen. Elle s'est ouverte sur l'Atlantique pour accueillir les îles viticoles du Portugal (Madère...) et de l'Espagne (Canaries) ', précise Yves Leccia, président de ce comité et vigneron corse. Ces îles abritent des vignes et des vignerons qui ont des points communs. Ce comité envisage d'exploiter ces ressemblances et s'est donné trois premières missions. Tout d'abord, inventorier les vignobles insulaires : au niveau production, encépagement, économie. Ensuite, instaurer une logique de communication. Enfin, mieux protéger leurs patrimoines, qui sont fortement concurrencés par le tourisme et l'urbanisation. A terme, ce comité pourrait proposer à l'OIV (Office international de la vigne et du vin) un classement de tout ou partie de certains des vignobles menacés. Pour l'instant, ce comité en est à l'inventaire. Une quinzaine d'îles sont déjà membres.
L'identité corse est un patrimoine que le Civam corse est en train de caractériser. Il développe un système d'information géographique (SIG) décrivant les terroirs. La première appellation à être recensée de la sorte est Calvi. Ce SIG mettant en évidence les unités de terroir sera prêt au printemps 2002, d'après Laurent Bourde, directeur du Civam corse. La prochaine vinification permettra de différencier les produits issus de ces derniers. En second lieu, les collections de clones de variétés de cépages peu connus et en voie de disparition se sont étoffées. Une dizaine de souches de biancone, de cualtaccio et de rimenese sont venues compléter la collection du conservatoire.
Le Civam sélectionne aussi des levures. La souche JB3 a été testée ces deux dernières années. Elle se prête particulièrement bien à la vinification des muscats et des rosés. La JB3 révèle un potentiel terpénique supérieur aux autres levures testées : de 70 % à 250 % l'an dernier. La dégustation du millésime 2001 confirmerait cette tendance, qu'il faut encore vérifier analytiquement. ' Cette levure est très prometteuse, mais je reste encore prudente ', explique Nathalie Uscidda, du Civam.

(1) Comité national des interprofessions des vins à appellation d'origine. Basé à Paris, il regroupe une vingtaine d'interprofessions.
(2) Confédération française des vins de pays, également basée à Paris.

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