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L'eau chaude fait ses preuves

La vigne - n°130 - mars 2002 - page 0

Le traitement à l'eau chaude apporte une garantie supplémentaire sur l'état sanitaire des plants. Sur un matériel végétal de bonne qualité, il n'entraîne pas de baisse du taux de reprise.

Dans certaines régions, l'affaire ne fait aucun doute pour les vignerons : la flavescence dorée a été introduite par des plants de vigne en incubation longue. En effet, certains porte-greffes peuvent porter la maladie sans qu'aucun symptôme ne soit visible. Le traitement à l'eau chaude (TEC), mis au point depuis 1990, apporte une solution puisqu'il débarrasse le bois du phytoplasme de la flavescence dorée, mais aussi d'autres hôtes indésirables. On donne ainsi une garantie supplémentaire au vigneron quant à l'état sanitaire des plants qu'il achète.

L'efficacité du traitement repose sur un bain à 50°C pendant 45 min. La température doit être régulée avec une très grande précision, à la fois pour la sécurité du matériel végétal et pour l'efficacité sur le phytoplasme. Des essais sont en cours à l'Inra de Dijon et à l'Entav (Gard) afin d'évaluer la possibilité de réduire la durée du traitement, tout en conservant la même efficacité. ' Nous utilisons un matériel expérimental contaminé, nous le traitons avec des durées variables, puis nous réalisons des observations pendant plusieurs années pour vérifier que les plants sont sains. Il est indispensable de suivre l'état sanitaire pendant une période car les symptômes peuvent mettre du temps à s'exprimer ', précise Elisabeth Boudon-Padieu, de l'Inra.
Parallèlement à l'aspect efficacité du traitement, se pose le problème de la fragilité du matériel végétal et de sa réaction au traitement. Plusieurs campagnes d'observations ont permis de mieux cerner la question. Le traitement à l'eau chaude peut intervenir à différents stades : sur les boutures pépinières ou les racinés, qui sont utilisés par les pépiniéristes pour implanter les vignes mères de porte-greffes, sur les boutures greffables prélevées sur les vignes mères, ou sur les greffés-soudés. Chaque système a ses avantages et ses inconvénients. Aux pépinières Viaud (Val de Loire), on a choisi de traiter les bois lorsqu'ils arrivent, avant fractionnement et stockage en chambre froide. ' Pour que tout se passe bien, il est essentiel de réaliser le traitement dans les jours qui suivent la taille sur un matériel végétal très frais et en bon état ', explique le pépiniériste. La chambre d'agriculture de Gironde, équipée elle aussi d'une machine, confirme n'avoir constaté aucun problème de reprise sur des bois traités avant greffage, à condition que leur niveau de réserve soit suffisant. L'un des problèmes vient du fait que l'on ne sait pas évaluer facilement la qualité des bois. Pour le pépiniériste, le traitement avant greffage présente l'intérêt de n'introduire dans sa pépinière que des bois sains. Ainsi, on élimine le phytoplasme de la flavescence, mais aussi des bactéries, des oeufs de cicadelles et d'autres parasites.

D'autres préfèrent réaliser un traitement du greffé-soudé avant son départ chez le vigneron, afin d'apporter une garantie totale sur l'état sanitaire. ' En effet, en dépit des traitements réalisés, le risque d'une contamination en pépinière ne peut pas être totalement écarté ', admet un technicien. Cette solution pose toutefois un problème technique aux pépiniéristes car le greffé-soudé, une fois traité à l'eau chaude, ne doit pas être stocké trop longtemps. ' Le traitement élimine certains micro-organismes, ce qui laisse le champ libre au développement de la pourriture, notamment au niveau des racines ', constate un pépiniériste. Or, selon les conditions météo, le vigneron prendra ses plants plus ou moins tôt.
D'après des essais réalisés à la chambre d'agriculture de Bordeaux, le délai entre le traitement et la plantation influe sur la date de débourrement. Un lot de greffés-soudés, traité un mois avant la plantation, présente un faible retard de débourrement par rapport au témoin non traité. En revanche, si le traitement a lieu deux mois avant la plantation ou un jour avant celle-ci, le retard est plus important et peut aller jusqu'à trois semaines. Cependant, ce retard est rattrapé en cours de saison. Les essais, menés en Gironde et dans l'Aude, montrent que le traitement à l'eau chaude n'a pas d'incidence négative sur le taux de reprise. Aucune différence de comportement n'est constatée selon les cépages. En revanche, sur les porte-greffes, on peut trouver une incidence négative du traitement sur le fercal.
Certains s'interrogent sur l'opportunité de rendre ce traitement obligatoire afin d'éviter de contaminer des secteurs qui ne le sont pas encore. Pour l'Onivins, les traitements phytosanitaires effectués systématiquement par les pépiniéristes donnent déjà une garantie à laquelle s'ajoutent les contrôles réalisés par ses agents sur le terrain. ' En revanche, rien n'interdit à un vigneron de demander à son pépiniériste de faire appel à un prestataire de service pour réaliser le traitement à l'eau chaude, qui devient alors une condition contractuelle de vente. '
Cela dépend également du contexte de chaque région. La Bourgogne, par exemple, héberge la cicadelle vectrice, mais n'est pas touchée par la flavescence.

' Les vignerons doivent donc être suffisamment vigilants quant à la qualité des plants achetés, surtout s'ils s'approvisionnent chez des pépiniéristes situés dans des zones où sévit la flavescence dorée. En effet, si la maladie arrive, toutes les conditions sont réunies pour qu'elle se répande rapidement. Dans ce cas de figure, ils auraient tout intérêt à acheter des plants traités ', constate une technicienne.
Dans d'autres régions où la maladie est présente, le problème est différent. ' En effet, rappellent techniciens et pépiniéristes, le traitement à l'eau chaude n'est pas un vaccin : un plant traité, donc sain, planté dans une zone infestée sera immédiatement infecté s'il est piqué par un insecte vecteur. Toutefois, la plantation de matériel sain participe de l'effort de l'assainissement du vignoble et de lutte par l'éradication de la cicadelle. '

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