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La pulvérisation d'azote stimule les fermentations

La vigne - n°131 - avril 2002 - page 0

L'enherbement peut entraîner des difficultés fermentaires. L'apport d'azote au vignoble par pulvérisation sur le feuillage, au moment de la véraison, corrige cet effet sans pour autant augmenter la vigueur.

De nombreuses observations mettent en évidence l'effet concurrentiel de l'herbe sur la vigne. Cela se traduit par une diminution de l'expression végétative, accompagnée fréquemment d'une baisse du rendement. Diverses expérimentations ont aussi montré que les baies issues de vignes enherbées contiennent moins d'azote que celles provenant de parcelles en non-culture. Selon l'importance de cette carence, un effet sur la fermentescibilité des moûts est observé.
Pour corriger ce déséquilibre azoté du moût, la première piste explorée consiste à réaliser un apport d'activateurs en cours de fermentation, couplé à une oxygénation. Les formules de complémentation disponibles sur le marché n'ont, semble-t-il, pas toutes la même efficacité.
Une autre voie corrective a été expérimentée dans le Beaujolais, le Val de Loire et en région méditerranéenne. Il s'agit d'apporter de l'azote sur les vignes au cours du cycle végétatif. Les études ont permis d'évaluer l'impact de cette fertilisation azotée foliaire sur le comportement de la vigne, sur la composition des moûts et sur les cinétiques fermentaires. Les résultats ont été présentés lors des journées du Columa (1).

En Beaujolais, une parcelle de gamay, enherbée avec de la fétuque rouge, a été suivie pendant quatre ans en comparant quatre modalités : un témoin conduit en non-culture, l'enherbement, l'enherbement avec trois apports d'urée sur le feuillage avant véraison, et l'enherbement avec trois apports d'urée après véraison. A chaque fois, les expérimentateurs pulvérisaient 600 l/ha d'une dilution à 2 % de perlurée, engrais titrant 46 % d'N. Au bout de trois passages, ils avaient apporté près de 16 kg d'azote par hectare.
Au niveau du vignoble, on constate sans surprise que le poids du bois de taille par cep et le poids de récolte par cep sont inférieurs dans la modalité enherbée par rapport au témoin. La comparaison entre la parcelle enherbée et celles enherbées avec apport d'urée montre que la pulvérisation d'azote entraîne une augmentation moyenne du poids des sarments sans modifier le rendement.
L'analyse des moûts à la récolte indique que la teneur en azote ammoniacal sur la modalité enherbée est inférieure de 39 % au témoin. L'écart par rapport au témoin est ramené à - 11 % dans la modalité enherbée avec apport d'urée avant véraison, et à - 17 % dans la modalité enherbée avec apport d'urée après véraison. Les deux modalités d'apport ne se distinguent pas statistiquement. ' Le suivi des fermentations alcooliques montre des différences plus ou moins marquées selon le millésime. Cependant, le lot enherbé a systématiquement la cinétique la plus lente, et le lot en non-culture la cinétique la plus rapide. La modalité enherbement avec apport d'urée présente une cinétique très proche de celle du lot témoin ', indique Valérie Lempereur, de l'ITV de Villefranche-sur-Saône.
Par ailleurs, l'analyse des vins montre que la modalité enherbée est la moins riche en anthocyanes et en tanins, même dans le cas où la teneur en anthocyanes des baies de l'enherbée était supérieure à celle des autres lots. ' Du fait de la cinétique fermentaire plus lente, l'extraction des anthocyanes et des tanins est moins intense ', explique Joël Carsoulle, du Comité de développement du Beaujolais.
Dans le Midi, les essais sur sauvignon montrent que la fertilisation azotée foliaire à la nouaison induit une augmentation de la croissance végétative secondaire. Réalisé à la fermeture de la grappe, l'apport n'a pas d'effet sur la croissance foliaire. Par ailleurs, l'analyse de la composition azotée des moûts à l'encuvage indique que l'apport d'azote avant et à mi-véraison permet de rectifier les carences induites par l'enherbement. La vitesse de fermentation de la modalité enherbée avec pulvérisation d'urée est pratiquement identique à celle du témoin, tandis qu'elle est plus lente pour la modalité enherbée.
Une étude a aussi été menée dans le Val de Loire. Les résultats obtenus en 2000 étaient opposés à ceux présentés ci-dessus. En 2001, en revanche, les observations vont dans le même sens.

L'écart constaté en 2000 semble lié au fait que la parcelle était déjà carencée en azote avant d'être enherbée. Le gazon a aggravé cette situation, au point de rendre la pulvérisation foliaire sans effet. Les résultats obtenus sur différents cépages et régions semblent donc concordants : l'apport d'azote par voie foliaire permet de réduire l'impact de l'enherbement sur les fermentations, sans effet sur la vigueur de la vigne. ' Cependant, pour développer cette pratique sur le terrain, il faut prendre plusieurs précautions , prévient Eric Chantelot. En effet, l'urée est une forme d'azote toxique pour la vigne qui peut provoquer des nécroses sur les feuilles. Il convient donc de privilégier un apport réduit (5 unités maximum), renouvelé deux ou trois fois à une semaine d'intervalle, et de traiter avec un volume de bouillie important, d'environ 600 l/ha . ' Pour cette raison et pour des soucis de compatibilité non connue avec les autres molécules, il ne semble donc pas possible d'apporter l'azote en mélange avec un traitement phytosanitaire.

(1) Conférence sur la lutte contre les mauvaises herbes

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