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Baisse du marché des appellatio ns pour 2010

La vigne - n°131 - avril 2002 - page 0

En 2010, le marché français des vins tranquilles pourrait accuser une baisse en volume oscillant entre 6 et 24 %. Dans les hypothèses les plus pessimistes, les appellations seraient aussi touchées.

La diminution de la consommation des vins en France n'est pas un fait nouveau. Restait à savoir si elle allait se poursuivre ou se stabiliser. L'Onivins, en collaboration avec l'Inra, a réalisé une projection à l'horizon 2010 des résultats obtenus au cours de leurs vingt années d'enquête.
Le sexe et l'âge expliquent à eux seuls 75 % de la variabilité de la consommation individuelle. Grâce à un modèle économétrique de prévision, fondé sur les hypothèses démographiques de l'Insee, les scientifiques ont pu estimer la répartition de la population par type de fréquence de consommation (régulier, occasionnel, non-consommateur) pour chaque sexe, et donc le marché intérieur des vins tranquilles en volume selon quatre scénarios d'évolution de consommation individuelle.
Toutefois, ces simulations excluent tout élément qui pourrait modifier l'offre viticole, ou un phénomène de société qui induirait une baisse sensible de la consommation. Ainsi, en 2010, la tendance observée ces dernières années s'accentuerait, à savoir une substitution progressive des consommateurs réguliers au profit des occasionnels. Les consommateurs réguliers ne représenteraient plus que 27 % de l'ensemble, contre 37 % en 2000. Actuellement, il faut six consommateurs occasionnels pour compenser la perte d'un régulier en terme de volumes consommés. Si cette tendance se confirme et que les consommations individuelles de 2010 restent équivalentes à celles de 2000, le marché intérieur des vins tranquilles subirait une baisse de 13 %.
L'hypothèse la plus pessimiste serait que les volumes par tête soient tous affectés d'une baisse d'un litre par an en moyenne, quelle que soit la fréquence de consommation. Dans ce cas, le marché baisserait de 24 %. En revanche, si la consommation des réguliers reste stable et que celle des occasionnels croît d'un litre par an, la baisse ne serait que de 6 %. Cette hypothèse reste la ' moins pire ' et impliquerait que les occasionnels masculins boivent, en moyenne, 20 % de plus et les femmes 30 %. Toutefois, d'après le rapport Inra-Onivins (1), ' même si cette simulation est la plus favorable pour le vignoble, elle apparaît en rupture totale avec la tendance de longue période. De plus, la stabilité de la consommation individuelle supposerait une adaptation des produits aux besoins des consommateurs réguliers '.

Enfin, le dernier scénario proposé serait une poursuite de la baisse d'environ 2,8 l/an de la consommation des réguliers, une stabilisation des occasionnels et une consommation de 5 l/an pour la moitié des non-consommateurs. Les réguliers perdraient en moyenne 12 % de consommation et les femmes 20 %. Dans ce dernier cas, le marché des vins intérieurs accuserait une diminution de 20 %. Toujours selon les conclusions du rapport, ' cette hypothèse apparaît en adéquation avec l'évolution des modes de vie et une politique de prévention de l'alcoolisme. Les moyens à mettre en oeuvre pour intéresser un public plus large à consommer du vin pourraient donc constituer un objectif de politique économique à discuter '.
A l'Onivins, Christian Mélani fait également preuve de réalisme : ' Au vu de ces hypothèses, on ne voit pas comment le marché français pourrait redémarrer ou se stabiliser. Il est peu probable que l'on ait fait beaucoup d'erreurs, car les chiffres de l'Insee sont fiables. A priori, même si on ne devrait pas au total perdre de consommateurs, la seule substitution des réguliers par les occasionnels induira une diminution des volumes consommés . ' Par ailleurs, si les scénarios les plus pessimistes se réalisent (recul de 20 à 24 % du marché intérieur), il n'y aurait pas que les VDT qui en subiraient les conséquences, les VQPRD (AOC + VDQS) seraient touchés, d'après Christian Mélani.

Chez les jeunes, le passage à la consommation régulière se fait de plus en plus tard. Et la concurrence avec les boissons rafraîchissantes sans alcool (BRSA) devient sévère. En effet, plus de 30 % des 15-24 ans consomment des BRSA (sodas, jus de fruits, cola...) au cours des repas, plus de 35 % de l'eau en bouteille, et plus de 40 % de l'eau du robinet. Consommeront-ils toujours ces boissons lorsqu'ils auront 30 ans ou se dirigeront-ils vers le vin ? L'enjeu est de taille, mais au vu de l'évolution actuelle, seule une minorité de 25-34 ans accédera à la consommation régulière de vin. Car même si le goût se modifie en vieillissant, il est plus facile de passer d'un produit neutre comme l'eau au vin, que de passer d'une boisson sucrée au vin. Comme l'explique Christian Mélani, ' l'apprentissage du goût est complexe et évolue dans le temps, mais le pourcentage de jeunes qui consommeront du vin se fera dans des proportions moindres qu'auparavant '. Les professionnels vont devoir plancher sur ce problème s'ils ne veulent pas que l'hypothèse la plus pessimiste se réalise.

(1) La consommation de vins en France. Comportements, attitudes et représentations. Résultats d'enquête Onivins-Inra 2000. Evolutions 1980-2000 et projections 2010. Rapport de décembre 2001.

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