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La lumière révèle certains arômes

La vigne - n°134 - juillet 2002 - page 0

L'exposition aux rayons du soleil influence la synthèse des arômes. Selon le cépage et donc les molécules aromatiques, les besoins ne sont pas les mêmes.

L'environnement lumineux des grappes influence la composition et la qualité aromatique des moûts et des vins. Ainsi, des grappes ensoleillées ne présentent pas la même composition en précurseurs d'arômes que des grappes à l'ombre. Un autre exemple : un sol recouvert d'un film d'aluminium ou d'un plastique noir pourra modifier les arômes des baies. Mais ces interventions sont interdites dans les AOC.

Des études sur la lumière sont menées à l'Inra de Montpellier, sous la responsabilité d'Alain Razungles. Elles ont montré que la lumière joue un rôle important sur la synthèse et l'accumulation de caroténoïdes dans les baies de syrah avant véraison. Les caroténoïdes sont produits pendant que la baie a une activité photosynthétique, c'est-à-dire tant qu'elle est verte. L'ensoleillement des baies favorise la formation de caroténoïdes. Après la véraison, cette même lumière amplifie leur catabolisme, aboutissant aux C 13-norisoprénoïdes, composés présents dans le raisin mûr sous formes glycosilées. Ce sont les précurseurs des terpènes responsables des arômes de rose, de muguet... Un ensoleillement total des baies est donc très favorable à la synthèse et à la révélation de ces arômes dans la syrah. Cela a aussi été démontré pour le riesling.
Une expérience, où l'on expose des grappes de syrah à des spectres lumineux incomplets par sélection de certaines longueurs d'onde du visible, donne des résultats très intéressants. On compare les teneurs en caroténoïdes, lorsque les baies sont soumises à une lumière passant au travers de filtres bleu, vert, jaune ou rouge. Les baies sont exposées à un spectre lumineux avec, respectivement, une faible quantité de jaune, de rouge, de bleu et de vert.
Avant véraison, les baies exposées à un spectre dépourvu de violet-bleu-vert (filtre jaune) ou de bleu-vert-jaune (filtre rouge) ont de plus faibles concentrations en caroténoïdes.

On en conclut qu'un environnement vert, comme les feuilles de vignes, n'est pas défavorable à la synthèse des caroténoïdes. La nature est donc bien faite ! Après la véraison, à nouveau, les filtres jaune et rouge donnent les plus fortes concentrations à maturité. Les teneurs en précurseurs d'arômes sont plus importantes dans les grappes ensoleillées, mais un environnement vert n'est pas pour autant préjudiciable à leur accumulation.
La syrah semble d'ailleurs nécessiter une exposition plus directe que le muscat de Frontignan. Le soleil amplifierait les notes de confiture, de réglisse et de fruits mûrs de la syrah, alors qu'un ombrage partiel préservera les arômes floraux du muscat. Ce dernier semble donner de meilleurs résultats sous un ombrage modéré. Le comportement d'autres cépages a aussi été étudié. En augmentant l'exposition au soleil du melon de Bourgogne, on favoriserait la complexité de ses arômes grâce, entre autres, à des terpènes aux odeurs de fleurs et à des C 13-norisoprénoïdes. La complexité induite par l'ensoleillement pourra être recherchée pour l'élaboration de certains muscadets. Indirectement, le soleil participerait à la synthèse des molécules aromatiques libérées lors de son élevage.

D'autres arômes ont aussi un caractère photosensible. L'exposition au soleil induit la diminution plus ou moins importante des teneurs en méthoxypyrazines au cours de la maturation des baies de cabernet-sauvignon. Ces molécules sont responsables du caractère ' poivron vert ' des baies immatures.
La synthèse des arômes se produit au sein de la baie. Ces molécules ne sont pas issues de la sève élaborée. On comprend l'importance du microclimat de la baie et l'intérêt du palissage, du rognage et de l'effeuillage. Le soleil joue directement sur le rayonnement perçu par la baie, mais aussi sa température. Ces deux paramètres ne pouvant pas être dissociés, de nombreux phénomènes restent à élucider sur la maturation aromatique des raisins. Les chercheurs poursuivent leurs études sur le comportement des raisins vis-à-vis du soleil. Une fois ces zones d'ombre écartées, il serait judicieux de rechercher les clones dont les grappes sont plus ou moins lâches.


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