Sur le pourtour méditerranéen, l'ordre d'arrivée de la récolte, le rythme des vendanges et les modes de vinifications ont été revus.
Tandis que des parcelles ont été inondées dans le Gard, le Vaucluse et l'Hérault, d'autres ont survécu aux orages du 8 et 9 septembre. Mais ce n'était pas gagné pour autant. Le vent humide et les brouillards ont été perturbateurs. Jusqu'à la mi-septembre, il n'y a pas eu de mistral pour éclaircir le ciel, et pour faire sécher les raisins. Il a fallu réagir vite : revoir les plannings des vendanges, mais aussi les façons de vinifier.
Dans le Gard et les départements voisins, alors que seulement 15 % du raisin était rentré, les orages ont rendu une partie irrécupérable, car pleine de limon. Il a fallu accepter d'emblée une certaine perte de récolte. Le reste a dû subir une opération de sauvetage de dernière minute. La pluie est tombée sur des baies aux pellicules fragilisées, à l'approche de leur maturité. Elles risquaient de pourrir. ' Des domaines ont rentré la totalité de leur récolte en dix jours, au lieu de trois semaines, comme à l'habitude ', rapporte Christophe Riou, à Inter-Rhône.
Pour vinifier au mieux ces raisins, les caves ont dû envisager des macérations plus courtes, afin de ne pas extraire trop de faux goûts issus d'un début de pourriture. Beaucoup d'entre elles ont vinifié en rosé ce qu'elles avaient prévu de vinifier en rouge. Il fallait extraire le maximum en phase aqueuse et à faible température. Les chapeaux de marc ont été travaillés avec délicatesse pour sortir la couleur et le fruit. Les enzymes d'extraction ont été mises de côté. Le raisin n'étant pas suffisamment mûr, il n'avait que peu de structure. Le sulfitage devait être ' énergique ' pour éviter une montée de l'acidité volatile. Les grosses bourbes ont été soigneusement éliminées, autant pour les blancs que pour les rouges. Même sur le raisin sain, les fermentations alcooliques semblaient un peu plus difficiles. Le choix des levures, des nutriments, des vitamines, les moments où les ajouter et la maîtrise des températures devaient être ajustés au mieux pour obtenir le meilleur de ces raisins délicats. La chaptalisation a été demandée dans les Côtes du Rhône, pour obtenir le demi-degré ou le degré qui manquaient aux parcelles rentrées dans la précipitation. Cuve par cuve, et grâce à la dégustation, il a fallu orienter les choix techniques.
Dans le Beaujolais, les vignerons ont trié la vendange fortement affectée par les pluies, en acceptant de réduire leurs volumes. Les vins seront plus riches, plus colorés et plus fruités que le millésime précédent. Autour du bassin méditerranéen, le millésime est fortement marqué par une hétérogénéité. Sur les parcelles rentrées dans la précipitation, les vins s'annoncent moins alcooleux, plus gouleyants, mais aussi plus fins et avec un beau fruité. Autrement, les parcelles sans problème sanitaire ont des degrés plus importants et ont atteint un beau potentiel phénolique.
Ce millésime comptera quand même des vins aux degrés élevés et à la structure prononcée. Les pluies ont perturbé la maturation du raisin. Début septembre, les degrés potentiels ont diminué. Le grenache, la syrah et le merlot ont ainsi perdu 0,6 % de TAV potentiel au début du mois de septembre, d'après l'Institut coopératif du vin. Les baies ont grossi et leurs pellicules éclataient facilement lors du transport. L'état sanitaire s'est aggravé sur les parcelles déjà touchées. Malgré tout cela, le potentiel polyphénolique est resté assez bon. Les teneurs en anthocyanes étaient nettement supérieures, au début septembre, qu'à la même date l'an passé. Leur cinétique d'accumulation est restée régulière malgré les pluies. Les grenaches étaient caractérisés par un indice de polyphénols totaux faible, mais surtout par une très faible contribution des tanins des pépins, ce qui augure des vins aux tanins soyeux. Ces pluies ont obligé les vignerons à rentrer les raisins sous la menace de la pourriture, et non pas en fonction de la maturité recherchée. La sélection parcellaire était obligatoire et nécessitait du temps. Les pluies ont tout de même apporté l'eau qui manquait aux parcelles en coteaux des secteurs tardifs. Dans ce cas-là, les précipitations ont débloqué le processus de maturation.