Philippe et Jean-Marie Vial, installés en Gaec, dans la Côte roannaise, mènent de front trois priorités : la mécanisation du travail des vignes, l'amélioration et la concentration de leurs raisins, et la vente de leurs vins.
A Philippe, 34 ans, la vigne et la clientèle particulière. A Jean-Marie, 27 ans, les vinifications, l'administratif et les acheteurs professionnels. Le tandem des frères Vial, installés en Gaec sur 10 ha de la Côte roannaise, à Saint-André-d'Apchon (Loire), fonctionne efficacement.
En 1993, l'aîné, BTA viti-oeno et BTS de commerce des vins en poche, s'installe avec son père Marcel sur une exploitation de 7,7 ha de vigne. En 1998, il est rejoint par le cadet, titulaire d'un BTA viti-oeno, qui remplace le père partant à la retraite. Les deux frères savent que ' pour être dans la course, il faut rester compétent dans tous les domaines '. Pour y parvenir, ils mécanisent un maximum de travaux dans les vignes. Ils peuvent se consacrer davantage à la commercialisation. de leurs vins. Ils dégagent du temps pour ébourgeonner, éclaircir et enherber.
Dès qu'il arrive, en 1993, Philippe veut développer la bouteille (au départ 13 000 cols) et la vente directe. Il investit près de 31 000 euros en matériel. Le père et le fils équipent la cave de cuves en résine époxy et en Inox pour remplacer les vieux foudres en bois. Ils acquièrent des drapeaux pour maîtriser les températures de fermentation. Ils achètent un pressoir Vaslin de 30 hl, qui vient remplacer un vieux Garnier.
Dès 1994, ils arrachent les vieilles vignes peu mécanisables ou mal exposées. Depuis, ils replantent du gamay saint-romain, une souche locale de ce cépage noir à jus blanc. Ils le font au rythme de 4 000 m² par an. Dans le cadre d'une opération groupée d'aménagement foncier, démarrée en 1994, ils composent un îlot viticole de 3 ha sur le coteau restructuré du Boutheran comptant 11 ha. Ils palissent systématiquement les nouvelles plantations et les vignes encore en gobelets (1,5 ha). Ils remontent les palissages des autres parcelles, arrachant les piquets de 90 cm pour les remplacer par des piquets de 1,10 m. Ces améliorations sont financées en partie (de 25 à 35 % de l'investissement) par un programme intégré de développement viticole. Elles permettent d'introduire la prétaille et de réduire les temps de rognage et de palissage.
En 1999, le Gaec opte pour ' du 100 % Cuma viticole ', un moyen très efficace pour diminuer les coûts de revient. ' Une exploitation de 10 ha ne peut pas se payer un tracteur et un pulvérisateur de 110 000 euros ', confirme Philippe. En 2001, les deux frères tentent un premier essai de vendange à la machine sur 2,5 ha. L'avantage ? Plus besoin de gérer une troupe de vendangeurs, ' un vrai casse-tête '. L'inconvénient ? Il est nécessaire d'intervenir, avant la machine, pour couper les raisins pourris à la main.
En 2002, ils testent l'effeuillage mécanique. Les résultats ne sont pas ' mirobolants ', mais ils persévéreront. Toujours en 2002, juste avant les élections présidentielles, les frères Vial signent in extremis un CTE. D'abord pour réguler la vigueur de la vigne en enherbant tous les rangs sur la moitié du domaine. ' Nous voulons éviter d'avoir de trop gros raisins pour obtenir une meilleure concentration des baies et empêcher leur dilution lors des petites pluies d'avant vendange. ' Le CTE comprend aussi la construction d'un nouveau cuvage en briques de 240 m² (coût estimé : 122 000 euros), qu'ils espèrent opérationnel pour 2004. En moyenne, le Gaec a investi 23 000 euros par an, depuis 1993. Aujourd'hui, Jean-Marie et Philippe emploient un saisonnier de janvier à juillet. ' Nous ne nous agrandirons pas, nous ne voulons pas gérer un salarié ', affirme Philippe.
Un rosé et quatre rouges (classique, vieilles vignes, élevé en fûts de chêne, coteau-de-boutheran) sortent des chais de l'exploitation. Depuis 1997, le domaine applique la micro-oxygénation sur 50 hl de la cuvée vieilles vignes. ' La qualité des raisins permettait de pousser les macérations (jusqu'à 15 jours), explique Philippe. En conséquence, les vins étaient moins friands, moins fruités. Avec la micro-oxygénation, on arrive à fixer davantage la couleur, à obtenir des tanins plus ronds et des vins à boire plus tôt. ' En 1999, ils achètent un groupe de chaud et de froid. Pour la cuvée boutheran, ils cherchent à concentrer la matière par un égrappage systématique des jeunes vignes pour ôter sa verdeur au vin et par des cuvaisons plus longues.
Du côté commercial, avec l'arrivée de Jean-Marie, ils passent à la vitesse supérieure. Ils fréquentent cinq salons par an. En 2000, ils font le pari de développer les ventes en Bag-in-Box, au prix 19,8 euros les 10 l. Un succès. 600 Bib sont commercialisés en 2002. Près de 80 % des bouteilles sont vendues à des particuliers, cavistes ou restaurants, 10 % sont écoulées en GMS locales, dans les Casinos de Roanne, et alentours. A l'avenir, ils comptent diminuer le vrac et cibler davantage les cavistes.
L'année 2002 marque un autre tournant. Pour la première fois, les vins seront labellisés Terra Vitis, une charte de conduite raisonnée. ' On a franchi un cap en notant toutes nos interventions ', souligne Philippe.
La prochaine étape sera de s'en servir pour la communication. ' C'est un outil de crédibilisation de l'appellation et de rentabilisation de notre travail ', revendique-t-il. Tout un programme en perspective.