De nombreuses études prouvent l'importance de l'alimentation hydrique pour l'obtention d'un raisin à fort potentiel oenologique. Les viticulteurs cherchent à optimiser cette alimentation par le biais, dans certaines régions, de l'irrigation. Cependant, cette pratique demeure interdite...
Pratiquée en Espagne, en Californie ou au Chili, l'irrigation suscite de nombreuses réactions en France. Certains viticulteurs considèrent que pour être concurrentiels vis-à-vis des producteurs du Nouveau Monde, ils doivent posséder les mêmes outils. L'Inao, quant à lui, campe sur ses positions : l'irrigation n'est pas autorisée en zones d'AOC durant la période végétative de la vigne. Elle ne peut être permise que dans certaines appellations, zones ou parcelles, et uniquement sur dérogation du préfet.
Cependant, cette réglementation date de l'époque où il fallait limiter les rendements. Aujourd'hui, elle est obsolète. En mai 2001, le Comité national a approuvé un nouveau rapport. Il en ressort que l'Institut accepterait la compatibilité entre l'irrigation et la production d'un vin de qualité, si les apports hydriques ne faisaient que combler une ' carence climatique avérée ', c'est-à-dire s'ils n'étaient pas systématiques. ' L'irrigation n'est compréhensible que pour sauvegarder le pied, afin de ne pas compromettre la vigne à long terme, explique François Ronçin, délégué national à la recherche de l'Inao d'Angers. Si une irrigation est nécessaire tous les ans, cela signifie que la vigne n'est pas plantée sur un milieu propre à la viticulture . '
Il en découlerait que les installations fixes seraient interdites, mais que des systèmes mobiles seraient autorisés en cas de sécheresse excessive : ceux par aspersion sur frondaison (canons) reproduiraient alors l'orage manquant, sans pour autant modifier le développement racinaire de la vigne... De plus, les installations fixes, mises en place avant ce rapport, pourraient être conservées sur un délai de plusieurs années ou jusqu'à leur amortissement.
Ce rapport prévoit donc la possibilité d'irriguer en AOC. Cette décision a provoqué de nombreuses rivalités dans le Sud-Est, entre les zones irrigables et non irrigables. A la suite de ces ' manifestations ', il a donc été bloqué, et la vieille réglementation fait toujours référence à l'heure actuelle. En conséquence, dans la pratique, des flous existent. Dans le Sud-Est notamment, certaines zones bénéficient de dérogations et de nombreux viticulteurs possèdent des installations fixes.
Pour essayer de faire avancer un peu ce dossier, l'Inao a mis en place un programme d'étude des Avertissements agricoles afin de déterminer comment encadrer les irrigations. L'Inra, la chambre d'agriculture de l'Aude et l'ITV de Montpellier sont chargés de trouver une méthodologie permettant de définir, chaque année, les zones où autoriser une irrigation et, le cas échéant, à quel moment la déclencher, pendant combien de temps et à quelle dose. De plus, de nombreux syndicats du Sud-Est planchent sur ce sujet dans l'optique d'un changement de réglementation. Pour eux comme pour de nombreux viticulteurs, l'irrigation raisonnée peut être un facteur de qualité.