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Pourriture grise, la prophylaxie avant tout

La vigne - n°144 - juin 2003 - page 0

La prophylaxie constitue la première méthode de lutte contre la pourriture grise. Elle débute dès la plantation. Elle implique une maîtrise de la vigueur, l'aération des grappes et le respect de leur intégrité.

L'année 2002 fut celle du vigneron. C'est là qu'il a pu mesurer l'importance des mesures prophylactiques dans la lutte contre la pourriture grise. ' Ceux qui ont bien travaillé ont mieux dormi que les autres ', résume Olivier Grand, de la chambre d'agriculture de Gironde.
Et pour cause. Début septembre, le botrytis profite de conditions climatiques favorables à son développement pour investir l'ensemble des vignobles. La situation, préoccupante, n'est réellement inquiétante que dans les parcelles ' mal ' conduites. Dans les autres, les dégâts restent limités. C'est le cas, par exemple, dans les appellations Anjou, Saumur et Muscadet, où dans les parcelles bien tenues, l'intensité du botrytis n'excède pas 5 % fin septembre.
' Les mesures prophylactiques sont à mettre au même niveau, voire à un niveau supérieur par rapport à la lutte chimique, lors d'années difficiles ', a rappelé Marc Fermaud, de l'Inra de Bordeaux, lors d'un colloque organisé par la firme Syngenta, en janvier dernier. Effectivement, la prophylaxie reste un préalable indispensable aux applications d'antibotrytis. Dans les parcelles peu sensibles, elle peut même suffire à contrôler la maladie la plupart des années. Dans La Tassée beaujolaise (n° 130) du mois de février 2003, Joël Carsoulle, du Comité de développement du Beaujolais, revient sur les pratiques à mettre en oeuvre. Petit tour d'horizon.

La première chose à faire est de maîtriser la vigueur, dès la plantation. Les choix du porte-greffe et du clone sont les premiers critères à prendre en considération. Vient ensuite le raisonnement de la fumure de fond - notamment les apports de matière organique - en fonction de l'analyse de sol.
Mais le vigneron ne doit pas en rester là. Il doit poursuivre ses efforts tout au long de la vie de la vigne. ' Ce qui est sûr, c'est que les mesures limitant l'entassement du feuillage sont bénéfiques ', prône Olivier Grand. Et elles sont nombreuses. La limitation de la fertilisation azotée est primordiale. La croissance de la vigne dépendant de cet élément, tout excès se traduit par une augmentation de la vigueur. De nombreux essais ont montré qu'il en découlait un effet négatif sur la qualité des raisins. C'est pourquoi l'azote n'est nécessaire que dans les parcelles les plus faibles.
L'autre paramètre agronomique qui permet de diminuer la vigueur est l'enherbement. Là encore, l'efficacité sur la pourriture grise a été largement démontrée. Et 2002 a fait école, puisque les parcelles enherbées ont été moins touchées que les autres. L'efficacité serait, en moyenne, de 20 à 30 % par rapport à une parcelle non enherbée. Mais tout dépend de l'espèce et de la concurrence qu'elle induit, comme le montrent les essais de la chambre d'agriculture de Gironde, réalisés en 1992 sur une parcelle de merlot en sol argileux. Le taux de pourriture grise du témoin était de 33 %, alors que dans l'enherbement à base de pâturin, il n'est que de 7 %, dans celui à base de fétuque élevée 5 %, et dans ceux à base de fétuque rouge et de ray-grass, ce taux n'atteint que 3 %.

Les opérations en vert présentent aussi un intérêt, l'objectif étant d'aérer les grappes. Mais attention, certaines peuvent aboutir à l'effet inverse en favorisant l'émergence des entre-coeurs. C'est le cas de l'ébourgeonnage. Des essais du Comité de développement du Beaujolais, effectués trois années de suite, montrent par exemple, en 1994, des intensités de pourriture grise de 8,4 % dans le témoin et de 19,8 % dans la partie ébourgeonnée. La hauteur de rognage est également importante. Trop sévère, elle accentue l'émission des entre-coeurs. Trop élevée, elle provoque un entassement du feuillage sur ces parcelles d'observation taillées en gobelet, avec palissage individuel. L'éclaircissage manuel n'apporte pas de différences significatives, même en 2002. Par contre, l'éclaircissage physiologique au Sierra montre un effet plus marqué. Ainsi, en 1997, dans le Beaujolais, l'intensité de la pourriture dans les vignes éclaircies chimiquement n'était que de 5 %, contre 14 % dans les parcelles non traitées.
Epamprage au coeur de la souche et suppression des entre-coeurs sont aussi recommandés. ' Mais attention à garder suffisamment de SFE (surface foliaire exposée) ', rappelle Olivier Grand. Quant à l'effeuillage, il s'avère un allié précieux. L'efficacité optimale est obtenue à la nouaison. Il permet d'économiser un, voire deux traitements.
Enfin, comme le souligne Jean-Louis Brosseau, de la chambre d'agriculture de Loire-Atlantique, ' la première protection contre le Botrytis est la lutte contre les vers de la grappe '. En effet, toute blessure des baies constitue une porte d'entrée pour le champignon. Les vers, en perforant les grappes, favorisent l'installation du Botrytis. Et ce, d'autant plus que les larves transportent les spores sur leur dos et inoculent ainsi directement la maladie au coeur des baies. Les essais, réalisés en 2002 par la chambre d'agriculture de Loire-Atlantique, le confirment. Dans le témoin où il y a eu deux traitements antibotrytis aux stades A et B, le taux de botrytis est de 39 %. Dans la partie qui a reçu en plus un traitement insecticide, il n'est plus que de 14 %, alors que dans celle où il y a eu deux insecticides, il tombe à 6 %. Une protection soignée contre l'oïdium est aussi à mettre activement en oeuvre. ' Les antibotrytis se situent désormais au dernier maillon de la chaîne ', conclut Marie-Laure Panon, des services techniques du Comité interprofessionnel du vin de Champagne.


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