Sur les pentes de la chaîne du Zemplén, au nord-est de la Hongrie, des grands rectangles bruns de terre nue cassent l'harmonie verdoyante du paysage de Tokaj. Dans d'autres régions aussi, des quantités de nouvelles plantations se préparent, avant le 1 er mai 2004, date de l'entrée de la Hongrie dans l'Union. Depuis 1998, 1 500 ha en moyenne ont été plantés par an. On estime qu'il y en a eu 4 000 ha en 2003.
Première raison : l'Etat distribue des aides pouvant aller jusqu'à 60 % du montant de l'investissement (coût d'une plantation : 20 000 euros/ha en moyenne). Encore faut-il que les producteurs s'astreignent à remplir ' des kilos de papiers ' administratifs pour les obtenir.
Deuxième raison : trop d'incertitudes pèsent sur le sort des producteurs hongrois après l'entrée dans l'Union. Et ' ni Bruxelles, ni Budapest ne savent ce qui va se passer ', déclare l'un d'entre eux. Quelles aides obtiendront-ils ? Quelles règles devront-ils respecter (droits de plantation, méthodes culturales...) ? Une certitude cependant : ils ne seront plus autorisés à planter sur des terres vierges. Cette restriction de leur liberté géographique entraînera un coût supplémentaire. 1 ha non planté se vend 1 000 à 2 000 euros et 1 ha planté entre 7 000 et 10 000 euros/ha, selon la région et le terroir.
Mais ce ne sont pas les seules raisons qui poussent à planter. N'oublions pas que la plupart des régions viticoles hongroises sont en pleine renaissance depuis le début des années 90. Les caves qui font la notoriété des régions (Tokaj, Eger, Szekszard, Villany...) sont encore en pleine expansion. Pour elles, c'est le moment ou jamais de planter pour accroître leur outil de travail et le rendre opérationnel.
Les chiffres de la superficie du vignoble hongrois sont à lire avec précaution. Il y a peu, l'OIV annonçait 127 000 ha. Il s'agissait d'estimations sur une superficie non contrôlée. Or, en 2001, des experts ont recensé l'ensemble du territoire. A la suite de ce travail, la Hongrie a revendiqué 93 000 ha auprès de l'Union. Malgré cette régression, le vignoble paraît encore trop grand. ' Les professionnels hongrois estiment à 75 000 le nombre d'hectares correspondant aux besoins du marché, dont 68 000 ha de vignes en production et le reste en jeunes vignes ', observe Zoltan Harcz, responsable au ministère de l'Agriculture.
Les plantations, effectuées apparemment dans l'urgence, correspondent plus à une restructuration du vignoble qu'à une extension. La Hongrie a plus de risques de voir son vignoble décroître que d'atteindre le chiffre déclaré à l'Union. En effet, des milliers de petits propriétaires n'ont pas les finances, ni la motivation pour entretenir leurs vignes. Nombre d'entre eux les abandonnent. Si l'Union leur propose, dès 2004, une aide conséquente à l'arrachage, ce mouvement risque de se renforcer.
PLANTATIONS
En Hongrie : les plantations sont libres et subventionnées par l'Etat jusqu'au 1 er mai 2004 (entrée dans l'Union). Le vignoble, dont le cadastre a été fixé le 31 mai 2001 à 93 000 ha, est en pleine restructuration. La superficie globale risque davantage de décroître que de croître dans les années à venir.
En France : comme tous les pays de l'Union, la France est limitée dans ses plantations et doit obéir aux règles européennes.