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archiveXML - 2003

Chais à barriques : place à l'immensité

La vigne - n°147 - octobre 2003 - page 0

Avec le développement des vins de marque boisés, d'énormes chais à barriques voient le jour. Visite au coeur des trois plus grands de France, dont les méthodes diffèrent radicalement.

Les domaines Virginie à Béziers (Aude), possèdent le plus grand chai du Midi et le troisième de France. Sur environ 4 000 m², 4 000 barriques sont entreposées, dans lesquelles 11 000 hl de vin sont vieillis par an. Elles sont disposées sur quatre niveaux grâce au système Barristock, et sont conservées environ trois ans.

Les fûts et leur contenu sont identifiés sur les fonds comme dans une cave particulière (le nombre de vins de la barrique et le numéro de lot du vin). Leur provenance est très variée : 40 % des fûts sont en chêne français, 50 % en américain, et 10 % proviennent des pays de l'Est.
Le travail en chai est facilité par une machine qui lave les fûts. Le reste des opérations est réalisé par deux ouvriers employés à plein temps.
Le vin est entonné sur place, au moyen d'une pompe à piston. Une fois en fûts, l'ouillage est primordial : comme le bâtiment est aérien, il y a de grosses variations d'hygrométrie. De ce fait, le chêne, notamment américain, travaille beaucoup, d'où une consommation annuelle de vin pour l'ouillage de 300 hl ! Durant toute la période de vieillissement, outre l'ouillage, les ouvriers doivent effectuer des contrôles analytiques de SO 2 et de CO2. Les prélèvements ont lieu mensuellement sur 10 % des barriques d'un lot de vin. Le réajustement de SO 2 se fait ensuite par pastilles effervescentes. De plus, tous les mois, les barriques sont dégustées. Aucun soutirage n'est réalisé, mais les ouvriers pratiquent des cliquages qui apportent l'oxygène nécessaire au vin.
Lorsque le vin est à son optimum, il est soutiré sur place à l'aide d'une canne en Inox et d'une pompe à rotor. Les barriques sont ensuite nettoyées deux par deux : elles sont amenées dans l'aire de lavage avec un chariot élévateur et disposées sur la machine Moog. Elles sont retournées et vidées de leurs lies, puis lavées avec le cycle approprié. Elles sèchent ensuite entre trois et huit heurs. ' Ce système permet de détartrer les barriques à 90 % ', assure Cédric Jenin, responsable du site. Enfin, les fûts sont méchés à l'aide de pastilles et sont ainsi prêts pour le réentonnage.

Le groupe William Pitters à Lormont (Gironde), ne dispose pas d'une telle machine, malgré la taille plus conséquente de son chai. Ses 17 000 à 18 000 barriques sont réparties dans deux bâtiments de 3 000 et 5 000 m². Elles sont placées les unes sur les autres en quinconce. Chaque barrique est conservée deux ans et reçoit, en moyenne, trois vins.
L'entreprise se fournit chez trois tonneliers. Ainsi, les chauffes, les origines et les qualités du bois varient, car ' le but est de réserver chaque lot de vin à un type de barrique particulier ', informe Jacky Maria, directeur industriel de William Pitters. Le fonctionnement du chai est assuré par trois cavistes et par un chef de chai. Chaque caviste a un rôle particulier.
Le premier est chargé de vider les fûts. Le second de les rincer, de les désinfecter, de les laver et de les remplir, le tout sans changer la barrique de place. Le dernier est responsable de l'ouillage. En revanche, pour les opérations importantes telles que le renouvellement du parc de barriques, une équipe de dix personnes est embauchée durant deux à trois jours.
L'approvisionnement en vin du chai est programmé de manière très précise, ' afin de laisser les barriques vides le moins de temps possible ', indique le directeur technique. Ainsi, tous les sept à dix jours, un lot de 1 500 hl rentre dans le chai. L'ouvrier chargé de l'entonnage se tient sur une nacelle et emploie un pistolet verseur, qui s'arrête automatiquement dès que le vin a atteint le haut du trou de bonde. Chaque lot est regroupé géographiquement et traité séparément des autres.
Un suivi par ordinateur est réalisé. Des analyses de laboratoire (acidité volatile, degré d'alcool, taux de SO 2) et des dégustations sont effectuées, sur chacune des barriques d'un lot, une fois tous les quinze jours. Ainsi, en l'espace de deux semaines, tout le lot a été contrôlé. Lorsque le vin a achevé sa période de vieillissement, il est soutiré grâce à un pistolet tireur qui s'arrête, dès qu'il n'y a plus de vin, et la phase de nettoyage débute. A l'aide d'une double canne, le caviste nettoie les fûts : une branche de la canne, terminée par une boule rotative, asperge la barrique, alors que l'eau est aspirée par la deuxième branche. Les fûts sont mis à sécher et sont alors prêts pour le remplissage.
Une organisation très différente est mise en place chez son concurrent direct, le négociant Castel, à Blanquefort (Gironde). Avec une capacité de 50 000 fûts, son chai est le plus grand d'Europe. Son fonctionnement est rendu possible grâce à sa mécanisation. A l'heure actuelle, le chai compte plus de 25 000 fûts, disposés sur les 8 800 m² de l'édifice. Ils sont quatre par rangée et empilés sur cinq niveaux. Le parc est renouvelé par tiers tous les six mois, ce qui fait que l'âge maximal d'une barrique est de dix-huit mois.

Comme aux domaines Virginie, l'identification du lot se fait sur le fond des fûts. Par contre, tous les fûts sont en chêne américain et proviennent de cinq fournisseurs différents. Le chai étant semi-enterré, la température y est de 16 à 18°C. L'hygrométrie est régulée par l'envoi de vapeur d'eau pulsée ; elle est comprise entre 75 et 80 %.
Le groupe est équipé d'une machine qui soutire, nettoie, remplit les fûts, et peut être activée par seulement deux personnes. La première amène les barriques sur leur support à la machine, puis les enlève. La seconde retire les bondes, positionne la canne de soutirage et de remplissage, met les pastilles de SO 2 et remet les bondes. Le rendement de la machine est de 200 barriques par jour. Les employés n'ont pas d'autre tâche puisque l'ouillage n'est pas pratiqué. ' L'hygrométrie est bien réglée, argumente Franck Crouzet, directeur de la communication chez Castel, et les bondes sont en silicone, ce qui rend tout ouillage inutile. ' Enfin, dégustations et analyses en laboratoire sont uniquement effectuées avant l'entonnage et avant le soutirage. Castel a donc résolu le problème de l'organisation en mécanisant fortement son chai et en limitant au maximum le nombre des opérations à réaliser.

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