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Montilla-Moriles : un vignoble au c?ur de l'Andalousie

La vigne - n°148 - novembre 2003 - page 0

Depuis plusieurs siècles, cette région aride donne naissance à des vins atypiques. ' Finos, amontillados, olorosos et pedro ximenez ' y sont élaborés selon des méthodes de vinification et d'élevage ancestrales.

Au sud de l'Espagne, en dessous de Cordoue, s'étend le vignoble de Montilla-Moriles. Cette appellation d'origine contrôlée, de plus de 10 500 ha, s'est développée sur des terres argilo-calcaires et sous un climat méditerranéen, grâce à un cépage blanc, résistant à la sécheresse, le pedro ximenez. Il permet d'obtenir plusieurs types de vins suivant le mode de vinification et d'élevage choisi : les finos, les amontillados, les olorosos et les pedro ximenez, tous d'environ 15° d'alcool naturel.
Dans cette région, la densité de plantation moyenne des vignes est de 2 500 pieds/ha. La plupart du temps, l'espacement est de 2 × 2 m pour des vignes conduites en gobelet. Quelques jeunes vignes sont cependant palissées ; elles sont alors espacées de 2,40 × 1,00 ou 1,20 m, ce qui facilite la mécanisation. L'âge moyen des ceps est de trente à quarante ans, et le rendement varie de 40 à 60 hl/ha suivant les sols. Outre le pedro ximenez, on trouve anecdotiquement du baladi, de l'airen, du moscatel et du torrontes. Les viticulteurs traitent peu, car les fortes températures de la région, alliées à l'absence de vent, empêchent le développement des maladies.
Les vendanges se déroulent généralement fin août, début septembre. Elles sont manuelles et le raisin est récolté en cagettes. En 2002, la production de l'AOC s'est montée à 536 703 hl.
Après la récolte, les grappes destinées à produire du pedro ximenez sont laissées sept à neuf jours de plus au soleil, sur des nattes d'alfa (sorte de crin végétal) : c'est le passerillage. Toutes les grappes sont ensuite emmenées dans les chais.

Le raisin est pressé, généralement dans un pneumatique. Les moûts sont ensuite transvasés dans des cuves en résine pour un débourbage rapide. Puis, ils passent dans des cuves en Inox, où se déroule la fermentation alcoolique, toujours spontanée, aux environs de 23°C. La première partie de la fermentation tumultueuse s'étend sur trois jours, et a lieu sous contrôle des températures par ruissellement d'eau froide sur les parois.
Lorsque la densité atteint 1 005, les vins sont transférés dans des cuves en béton nommées tinajas, ce qui stoppe la fermentation. Ils y restent une vingtaine de jours et y réalisent leur fermentation malolactique à l'air libre. Ces récipients en forme de jarres sont maintenus à 15°C, favorisant le développement d'un film de levure à la surface du vin. Ce voile le protège d'une oxydation rapide.
A la fin de la malo, les vins sont soutirés. Puis, le maître de chai, le capataz, détermine le devenir de chaque tinaja.
Les finos, vins frais d'apéritif, sont élevés en fûts de chêne, où ils développent à nouveau un voile de levure au contact de l'air. Son installation est favorisée par les quelques grammes de sucre restants et par la haute tolérance des levures à l'éthanol. Durant l'élevage, les levures du voile consomment l'acidité volatile. Le vin qui aurait été accidentellement piqué se trouve ainsi débarrassé de ce défaut. Les fûts contenant les finos sont entreposés dans des chais très hauts, aux murs épais, où une faible température est maintenue et où les sols sont arrosés quotidiennement pour humidifier l'air. Toutes ces conditions évitent qu'ils s'oxydent trop rapidement. Et les Andalous vont jusqu'à dire que leurs finos ne sont pas oxydés. Les amontillados, finos vieillis, sont tout d'abord élevés sous voile de fleur, comme des finos. Néanmoins, leur vieillissement se termine au contact de l'air, ce qui crée un vin plus oxydé. Les olorosos sont mis dans des fûts de chêne sous des hangars aérés où règne une haute température. Ainsi, le voile de levure ne peut pas se développer et le vin s'oxyde vite. Quant au pedro ximenez, vin très sucré de dessert, il subit une courte fermentation interrompue par mutage à l'alcool, après le passerillage des raisins. Ensuite, il connaît un long vieillissement oxydatif en barriques.

Le système andalou de vieillissement en fûts, dit solera, a pour but d'obtenir des vins homogènes d'une année sur l'autre. Il consiste à prélever du vin des fûts les plus vieux pour l'embouteillage (environ 30 % du fût par an). Après ce soutirage, l'espace vacant de la barrique sera comblé par du vin plus jeune d'un an, criadera, tiré d'une barrique, qui sera elle-même comblée par un vin d'un an plus jeune. Cette opération est réalisée en cascade et se termine lors de l'ajout du vin de l'année. Chaque vin est donc constitué d'un assemblage de plusieurs millésimes. Une fois prélevé, le vin est stabilisé en cuve, puis filtré sur membrane et embouteillé.
En Andalousie, tout ce travail de vinification est réalisé par des caves, les bodegas, qui s'occupent également de la commercialisation. En 1981, les principales caves de la région (Alvear, Navisa, Perez Barquero, Promeks, Toro Albala, et Moreno) se sont regroupées dans une association, Montisierra, afin de promouvoir leurs vins à l'international. Ce groupe effectue 75 % des ventes nationales et la totalité des ventes à l'exportation. Cependant, tous les types de vins ne se vendent pas aussi bien. ' 60 % des ventes d'une bodega sont des finos, même si les ventes de pedro ximenez augmentent, confie Rafael Delgado Ruz, directeur export de Perez Barquero. L'export n'est pas assez développé. ' En 2002, le volume exporté était de 46 000 hl, réparti surtout en Hollande, au Royaume-Uni et au Canada. Cela ne représente que 8,57 % de la production totale de l'AOC. L'association a encore du pain sur la planche pour arriver à développer sa notoriété à l'étranger.

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