En dix ans, les Côtes du Rhône ont structuré leur offre, ajusté le profil de leurs vins et amélioré leur image. Portées par des entreprises en phase avec le marché et des campagnes de communication audacieuses, les ventes ont progressé à l'exportation.
Avec des ventes qui ont augmenté de 4,3 % pour atteindre 1 milliard d'euros en 2002-2003, les Côtes du Rhône ont plutôt bien résisté au retournement du marché. Elles n'oublient pas pour autant d'où elles viennent. ' Il y a quinze ans, nous avions encore une image de petit vin de comptoir, qui ne nous convenait pas ', affirme Michel Bernard, président d'Inter-Rhône. Pour la changer, les Côtes du Rhône se sont donné des moyens. Le budget de communication, de 6 millions d'euros dans les années 90, est passé à 10 millions d'euros en 2002 et 2003. Les campagnes se sont succédé, centrées sur les arômes et les saveurs de 1994 à 1998, puis sur les cinq sens à partir de 2001. Sur le marché français, des actions spécifiques ont été menées pour soutenir le développement des Côtes du Rhône-villages.
En Grande-Bretagne la campagne ' Think red, think Côtes du Rhône wines ' a bien fonctionné. ' Là-bas, il y a moins d'à priori sur le vin. Nous avons choisi de jouer à fond la carte humoristique et, en cinq ans, nous avons accru nos ventes de 48 % ', souligne Philippe Verdier, responsable marketing et communication à Inter-Rhône.
Dans le même temps, les vins ont évolué. ' Dans le décret des Côtes du Rhône, nous avons abaissé le carignan et le cinsault en cépages secondaires, sans les éliminer pour autant. Dans celui des Côtes du Rhône-villages, nous avons monté la syrah et le mourvèdre en cépages principaux, à côté du grenache ', précise Christian Paly, président du Syndicat des vignerons.
Sur le plan technique, la création de l'Institut rhodanien a fédéré les compétences. Il a bâti un observatoire du grenache afin de mieux maîtriser et vinifier ce cépage, qui reste la pièce maîtresse des assemblages. ' Notre objectif est d'affirmer notre typicité, tout en répondant mieux aux attentes des consommateurs. Sur ce point, nous avons été aidés par la demande internationale, qui se porte actuellement volontiers vers le grenache et la syrah. '
Durant la campagne 1991-1992, les Côtes du Rhône régionales représentaient 2,2 Mhl, les Côtes du Rhône-villages 140 000 hl, et les appellations communales 280 000 hl. ' Pour améliorer la cohérence de notre offre, nous avions besoin de renforcer notre milieu de gamme. Les côtes-du-rhône-villages, positionnées entre 3 et 5 euros/col, correspondent bien à la demande des consommateurs occasionnels. Nous avons incité les producteurs à en élaborer plus, les négociants à les intégrer dans leur gamme, et les distributeurs à les référencer ', explique Jérôme Villaret, responsable économie d'Inter-Rhône. En dix ans, les ventes ont été multipliées par deux et demie pour atteindre 360 000 hl en 2002-2003.
Malgré ces efforts, sur le marché français, les ventes de côtes-du-rhône régionales reculent depuis trois ans dans les grandes surfaces. Ce sont principalement les vins à moins de 2 euros/col qui perdent du terrain. ' Dans la tranche à 3 euros/col, nous avons des possibilités de progression, à condition d'améliorer la qualité de nos vins. ' Pour guider les consommateurs, l'interprofession propose aux opérateurs de segmenter leur offre en indiquant sur l'étiquette si leur vin est corsé ou fruité. Ces mentions apparaîtront dans les semaines à venir. En dehors des grandes surfaces, ' nous pouvons aussi progresser chez les cavistes, et en vente directe grâce au tourisme vigneron. Ce sont deux secteurs que nous n'avons pas encore poussés à fond '.
A l'export, les ventes ont augmenté ces dernières années et compensé le recul du marché français. Les trois années successives de petite récolte ont aussi aidé à maintenir l'équilibre. Mais ' en 2003, l'exportation a faibli. Actuellement, seuls les marchés anglais et danois restent dynamiques ', commente Jérôme Villaret. ' Prenons le pari que ce recul est conjoncturel et poursuivons nos efforts. L'exportation représentait 20 % de nos ventes il y a quinze ans, contre près de 30 % aujourd'hui. Notre objectif est d'arriver à 40 % ' , rappelle Christian Paly.
A vec ses prix stables et ses importants volumes, les Côtes du Rhône reposent sur une assise solide. ' En jouant sur la mise en réserve pour lisser les disponibilités, et sur la transparence des informations chiffrées pour couper court aux rumeurs, nous essayons d'éviter les prix en Yo-Yo. C'est indispensable pour que les entreprises puissent construire une stratégie ', précise Jérôme Villaret.
Sur le plan commercial, le vignoble a gagné en autonomie, grâce à un maillage de coopératives et de négociants dynamiques. ' Nous avons vu émerger dans la partie sud un négoce de pointe, misant sur le partenariat pour disposer de vins en phase avec la demande ', souligne Philippe Verdier. Globalement, la qualité s'est améliorée et a gagné en homogénéité. ' Mais il nous reste des volumes génériques à faire évoluer ', rappelle Michel Bernard. ' Nous allons nous appuyer sur le triptyque suivi des conditions de production, agrément et suivi en aval de la qualité pour continuer à progresser ' , ajoute Christian Paly. Comme le souligne un directeur de coopérative, ' nous avons une révolution culturale et culturelle à achever ! '