Cette année, l'administration réalisera 5 000 contrôles portant sur la détention et l'usage des produits phytosanitaires, contre 3 500 l'an dernier. La viticulture est particulièrement visée. La vigne couvre 10 % des surfaces cultivées françaises et reçoit 40 % des produits de traitement.
Ce n'est pas un scoop : l'utilisation des produits phytosanitaires est dans le collimateur des pouvoirs publics. Le ministère de l'Agriculture augmente chaque année les contrôles. Il y en aura 5 000 en 2004, contre 3 500 en 2003 et 2 000 en 2002.
Les ingénieurs et les techniciens des Services régionaux de la protection des végétaux (SRPV) sont habilités à effectuer des contrôles chez les distributeurs et chez les exploitants. Ils s'assurent que les distributeurs ont l'agrément et qu'ils vendent des produits autorisés. De plus, les distributeurs sont obligés de montrer leur cahier des ventes, ce qui permet de déceler des fraudes à l'usage.
Chez les vignerons, les agents du SRPV vérifient que tous les produits achetés sont autorisés, et qu'ils sont utilisés conformément aux usages réglementaires. Ils vérifient également que les mélanges réalisés sont bien autorisés. Sur les 5 000 contrôles prévus cette année, 500 devraient être affectés aux mélanges. Mais dans ce domaine, la prévention devrait prévaloir sur les sanctions, du moins en 2004.
D'autres services administratifs interviennent sur l'utilisation des produits phytosanitaires. L'inspection du travail (Itepsa), rattachée à la Direction départementale de l'agriculture (DDA), contrôle la sécurité des applicateurs. S'appuyant sur le code du travail, ces inspecteurs ont compétence sur les locaux de stockage, sur la façon dont les salariés effectuent les traitements (port du masque, etc.), mais aussi sur le délai d'entrée dans la parcelle après un traitement.
En 2003, le SRPV du Languedoc-Roussillon a effectué 200 contrôles auprès des distributeurs, et 180 auprès des utilisateurs. Chez ces derniers, quarante-deux infractions ont été relevées. Il y a eu vingt-neuf rappels à la réglementation, principalement pour le non-respect des conditions d'emploi ou détournement d'usage. Par exemple, un désherbant autorisé pour le blé avait été utilisé dans des vignes.
Quatorze procès-verbaux ont également été dressés et transmis au procureur de la République. ' Sept d'entre eux portaient sur la détention ou l'utilisation de produits espagnols ou italiens, précise Laurent Scheyer, responsable du contrôle de l'utilisation des produits phytosanitaires, à la DRAF-SRPV du Languedoc-Roussillon. Sur ces sept procès-verbaux, trois exploitants ont été condamnés à 3 000 euros d'amende, dont 2 000 euros en sursis pendant cinq ans. Le jugement doit par ailleurs être publié dans la presse. Les produits étrangers n'ont pas toujours la même concentration et les mêmes constituants que les produits français. C'est le cas d'un Katana sud-américain, commercialisé en Espagne, et qui est autorisé sur la canne à sucre et le citron. De plus, les consignes d'utilisation ne sont pas lisibles par un salarié français. '
Toujours dans la région du Languedoc-Roussillon, au cours de l'année 2003, un vigneron a imposé à son salarié d'effectuer un traitement à l'arsénite. ' Dans ce cas-là, il y a infraction au code rural, mais surtout au code du travail ', poursuit Laurent Scheyer. Le jugement n'a pas encore été rendu, mais l'on peut s'attendre à une condamnation assez lourde, dans la mesure où cette pratique peut s'apparenter à un empoisonnement.
Les contrôleurs regrettent que leurs procès-verbaux restent trop souvent lettre morte. ' Face à des crimes très graves comme les vols ou les viols, l'usage illicite des produits phytosanitaires semble légitimement mineur pour un procureur de la République, explique Marc Coussy, responsable des contrôles au SRPV d'Aquitaine. Il nous faut argumenter sur l'aspect environnemental pour être entendus. '
Si les ministères de l'Agriculture, de la Santé et de l'Environnement renforcent leurs contrôles, Bruxelles n'est pas en reste. L'Europe impose aux Etats membres, en contrepartie des aides, de respecter la réglementation. En 2005, 5 % des exploitations françaises devraient être contrôlées. On en est actuellement à seulement 1 % et faute de moyens humains, l'objectif des 5 % restera un voeu pieux.