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Bag-in-Box : attention aux entrées d'oxygène

La vigne - n°155 - juin 2004 - page 0

Les poches des Bib ne sont pas parfaitement étanches à l'oxygène. Il faut donc prendre encore plus de précautions pour protéger le vin des oxydations et des micro-organismes que lors d'une mise en bouteilles.

Contrairement aux bouteilles en verre, bouchées par du liège ou du plastique, les Bag-in-Box (marque déposée par Smurfit) ou caisses-outres ne sont pas parfaitement étanches à l'oxygène. Les robinets peuvent laisser entrer de l'oxygène, mais c'est surtout la poche qui est perméable, d'autant plus que la température ou l'humidité s'élève. ' La chaleur et l'humidité provoquent une perte exponentielle du pouvoir barrière d'un film ', affirme Philippe Sapin, de la société Technibag, à Villefranche-sur-Saône (Rhône). Les différents films disponibles n'ont pas les mêmes propriétés. D'après l'Institut coopératif du vin, à Montpellier (Hérault), les poches laissent passer de 0,2 à 3 ml d'oxygène par litre et par mois.

Comme le vin est plus exposé à l'oxygène qu'en bouteille, le sulfitage doit être important car le SO 2 est rapidement oxydé. ' Près du tiers du SO2 libre disparaît dans le mois qui suit le tirage ', justifie Florence Gras, oenologue à l'Institut coopératif du vin (ICV). ' Nous recommandons un SO2 libre supérieur de 10 mg/l par rapport à ce que l'on recherche en bouteille ', explique Philippe Sapin, soit dans les 40 à 45 mg/l. L'addition d'acide ascorbique est parfois conseillée pour renforcer la protection contre l'oxydation.
De même, il est recommandé de procéder à une filtration très serrée, voire stérile, pour ne pas risquer d'altération microbienne après conditionnement. Bénédicte Nicolini, responsable du département bouchage de l'ICV, préconise des seuils de coupure inférieurs ou égaux à 0,65 µm. Sur les vins fragiles, l'addition de sorbate de potassium est recommandée, si l'on craint un redémarrage de levures. Dans les faits, ' trop de centres de remplissage de Bib ne prennent pas assez de précautions ', déplore Florence Gras. Ainsi, Cédric Chêne, viticulteur à la Roche Vineuse (Saône-et-Loire), ajoute ' un peu plus de SO2 dans le vin destiné aux Bib que pour les bouteilles '. Il vise 30 mg/l de SO2 libre, contre 28 en bouteilles. ' Je tire environ 200 Bib à la fois, et je ne les garde pas plus de trois mois, justifie ce viticulteur. Quand je tire des rosés, je conditionne un premier lot normalement, puis je sulfite un peu plus le reste de ma cuve avant de la finir. Quant aux autres vins, je ne les conserve pas assez longtemps pour justifier d'augmenter fortement la dose de SO 2. ' Pour la première fois sur le millésime 2003, il a filtré les blancs sur membrane de 0,45 µm, ' parce qu'ils n'ont pas fait la malo '. Jusqu'ici, les vins n'étaient filtrés que sur kieselguhr.
Chez le négociant Adrien Vacher, en Savoie, les vins sont préparés de la même manière pour le tirage en Bib que pour la mise en bouteilles. Le sulfitage (20 à 25 mg/l de SO 2 libre pour les rouges, 30 à 35 pour les blancs) et la filtration finale sont identiques. Cette dernière opération se fait, dans les deux cas, sur plaques de cellulose pour les blancs, sur membrane pour les rouges.

Pour éviter les oxydations du vin, il faut aussi prendre garde à l'oxygène dissous dans le vin, avant ou pendant le conditionnement. ' La moindre fuite, le plus petit joint abîmé est une entrée d'air dans le vin , témoigne Patrick Shea, directeur commercial de la société Vitop. Cela prend beaucoup plus d'importance que lors d'un tirage en bouteille, et pas seulement parce que l'emballage est moins étanche. En effet, le débit instantané de tirage est beaucoup plus important dans les tuyauteries : on remplit 3 l/s. Si bien que, par effet Venturi, on peut faire rentrer de grandes quantités d'air, même si le circuit est en charge . ' Pour protéger les joints et éviter les relargages dans les membranes de filtration, des systèmes anticoups de bélier doivent aussi être prévus.
Pour limiter les entrées d'air, ' le vide d'air de la poche est préférable avant remplissage, d'autant qu'il permet de remplir à hautes cadences , ajoute Philippe Sapin. Toutefois, pour ne pas risquer d'endommager la poche, il faut contrôler la puissance du vide : la dépression maximale est de 0,55 bar '.
De même, l'utilisation des systèmes d'inertage, dont sont équipées les machines de tirage, permet de remplacer la bulle d'air riche en oxygène par un gaz neutre comme l'azote. ' En fait, ces dispositifs sont rarement utilisés ', regrette Patrick Shea.

On sait aussi qu'un vin chargé en gaz carbonique dégaze légèrement au moment du tirage, ce qui contribue à appauvrir la bulle d'air en oxygène. Mais cela peut poser des problèmes au tirage. ' Au départ, je voulais garder plus de gaz dans mes Bib que dans mes bouteilles, se souvient Cédric Chêne. Mais je me suis rendu compte que le remplissage devenait plus compliqué, car le vin moussait parfois. Je maîtrisais moins bien le volume dans chaque poche. '
La présence de gaz carbonique pose aussi des problèmes en conservation. Il est recommandé de ne pas conserver plus de 800 mg/l de gaz carbonique dans les vins. En effet, il risque de provoquer un gonflement des outres, si la température augmente, ce qui nuit à la présentation des Bib et les rend invendables. ' Dans d'autres pays, la barrière est fixée à 300 mg/l ', remarque un spécialiste. Technibag recommande à ses clients de ne pas dépasser cette dernière limite sur les rouges. ' Nous ne mesurons pas le gaz carbonique avant tirage, mais nous l'évaluons par dégustation, explique Thierry Chabert, chef de cave chez Adrien Vacher. Nous envoyons beaucoup de nos Bib dans les stations de ski et nous ne voulons pas avoir de poches qui gonflent en raison de l'altitude. Nous dégazons les rouges à l'azote, car le gaz carbonique nuit à leur dégustation. '
Autre problème souvent signalé sur ces conditionnements : les fuyards. ' La manipulation des poches est primordiale dans ce domaine, explique Philippe Sapin. Elle doit être aussi douce que possible pour éviter la formation de microperforations qui causent des fuites de vin, ou de microfissures qui augmentent la perméabilité de la poche à l'oxygène. De même, l'adaptation de la taille du carton à celle de la poche est très importante. La poche ne doit pas être trop à l'étroit pour que le frottement ne l'abîme pas, ni trop au large pour ne pas abîmer la poche par phénomène de flex-cracking ', c'est-à-dire en raison des plis qui se forment et se déforment au cours de la manipulation.

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