ImprimerCette région produit la plus célèbre des appellations italiennes, le Chianti, mais également d'étonnantes créations contemporaines. Ces dernières sont vendues très cher.
Le chianti en fiasque - cette bouteille au col long et au corps pansu, couverte de paille tressée - appartient au folklore des pizzerias. Les vignerons de Toscane le vendent, aujourd'hui, en bouteilles d'allure bordelaise. Elles reflètent mieux les nouvelles orientations qu'ils ont prises. L'appellation Chianti couvre 20 000 ha, dont seulement 7 200 pour le noyau historique, dénommé Classico. Comme la quasi-totalité des appellations rouges de Toscane, le chianti est un vin de sangiovese ou ' sang de Jupiter ', dont il existe de nombreux clones, plus ou moins productifs. Avant 1970, on y ajoutait du raisin blanc pour l'adoucir et le rendre plus facile à boire. Avec une vinification à température réduite, des vignerons progressistes ont limité l'extraction des tannins. Ils ont créé des vins 100 % sangiovese, révélant ainsi la valeur de ce cépage.
Dans le même temps, ils se sont intéressés à d'autres variétés, comme le cabernet-sauvignon, le cabernet franc ou le merlot. Ils ont baptisé Super Tuscan leurs expériences menées hors des limites bien établies de l'appellation Chianti. De cet esprit d'exploration sont nés deux vins mythiques : le Solaia d'Antinori et le Sassicaia du marquis Incisa della Rocchetta, à partir de cabernet-sauvignon, de cabernet franc et de merlot, cotés de 100 à 200 euros la bouteille.
Après les appellations haut de gamme, la dégustation au chai se termine en général par l'une de ces inventions maison, classée en vin de pays ou de table, parfois même exclue de toute catégorie quand elle dépasse 15°. Ces vins que l'on vous sert en dernier sont aussi les plus chers. Le comte Fumi vend ainsi son Castepugna à 11,33 euros HT, plus 20 % de TVA, alors que sa bouteille chianti réserve ne dépasse pas 7,59 euros. Le Castepugna ' a pour nous une valeur affective supérieure. C'est une sélection familiale ' , justifie-t-il. De même, le château-hôtel Castel di Meleto (180 ha) propose son Rainero classé vin de pays et contenant un tiers de sangiovese, de merlot et de cabernet-sauvignon à 35 euros ' alors que nos chiantis classico commencent à 9 euros ', sourit Gianfranco Campione, directeur commercial. Face à cette multitude d'initiatives, certains acheteurs se déclarent perplexes : ' Beaucoup de gens ne comprennent pas les prix ', constate Peter Petrof, directeur d'Italhandel Gmbh, un importateur de vin italien basé à Hambourg, en Allemagne.
Il goûte à ces curiosités haut de gamme pour connaisseurs et collectionneurs, mais il achète des valeurs plus classiques : ' des chiantis à 2-3 euros la bouteille, chiantis classico compris à 4-5 euros et du vin de table à 1 euros. Mes clients lisent la presse du vin, rêvent d'Italie et demandent des vins de Toscane. Mais ils n'achèteraient pas les Super Toscan. '
L'esprit d'initiative et la recherche constante de qualité menée par les Toscans sont reconnus par tous les amateurs. La revue Wine spectator, par exemple, classe régulièrement leurs vins parmi les cent meilleurs du monde. Du point de vue qualitatif, plus de 35 % du volume bénéficient d'une dénomination d'origine contrôlée garantie (DOCG) ou d'une dénomination d'origine contrôlée (DOC), ce qui constitue le plus fort pourcentage d'Italie. Pour toutes ces raisons, la Toscane demeure la région viticole la plus connue du pays, même si elle n'en produit que 5 % du volume avec 2,3 millions d'hectolitres (2 millions seulement en 2003, à cause de la sécheresse). La vigne couvre la moitié de la surface agricole de la région, soit 87 000 ha et 52 000 exploitants déclarent produire du vin.
Les Toscans savent aussi recevoir les étrangers. Comme la plupart de ses confrères, Gianfranco Campione jongle avec quatre ou cinq langues et observe attentivement les goûts de ses visiteurs : ' Allemands et Scandinaves aiment des vins forts, presque oxydés, car ils les boivent le soir, comme un cognac. A l'inverse, Français et Italiens apprécient le vin en mangeant. ' Son exploitation, le Castel di Meleto, exporte 80 % de sa production. Gianfranco Campione pense que les consommateurs vont se lasser des vins trop boisés et sa production séjourne seulement dans des grandes barriques ou des tonneaux de plusieurs vins. ' Bois et concentration n'ont rien à voir avec la qualité. Trop de bois est dangereux, en particulier pour nos vins d'Europe, car la plupart des consommateurs risquent de ne pas détecter la contribution du terroir et du cépage. '
La Toscane ne se limite pas au rouge, le vin blanc atteint le quart du volume total. Il est produit avec les cépages malvasia, trebbiano et vermentino. Près de Carrare, 70 % du vin est blanc, comme le célèbre marbre issu des environs de la ville. Malgré les succès, tout n'est pas rose. Président de la strada del vino locale, Pier Paolo Lorieri déplore le départ de nombreux vignerons âgés, qui ne transmettent pas leur exploitation, souvent d'un hectare seulement. ' Les parcelles sont minuscules, situées dans des collines escarpées et impossibles à mécaniser. ' Même son tracteur Fantini à chenilles, qu'il dirige avec un joystick de jeu vidéo, est parfois trop large. Il ne mesure pourtant qu'un mètre, mais traditionnellement, 11 000 à 12 000 pieds sont plantés à l'hectare. ' Nous rêvons d'un petit tracteur télécommandé qui couperait l'herbe et pulvériserait en même temps. ' En attendant, le terrain reste ' de grande fatigue '
