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Ne sous-estimez pas les risques d'accidents

La vigne - n°157 - septembre 2004 - page 0

De 1997 à 2001, la MSA a enregistré 610 accidents avec les phytos, dont 134 en viticulture. Ils surviennent lors de la préparation, de l'application ou du nettoyage. Souvent, ils résultent d'une protection inadaptée, de la précipitation ou d'un manque de formation. Tour d'horizon des problèmes rencontrés.

Les accidents avec les produits phytosanitaires n'arrivent pas qu'aux autres ! La MSA peut en témoigner. Depuis 1997, elle enregistre, caractérise et analyse les accidents liés à l'utilisation des produits phytosanitaires. De janvier 1997 à décembre 2001, elle a recensé 610 accidents (toutes productions confondues), dont 134 en viticulture.
En 2001, les signalements en vigne ont même été majoritaires, alors que les surfaces cultivées sont dix fois moins importantes qu'en céréales. 36 % des accidents (toutes productions confondues) sont survenus avec des fongicides, 31 % avec des insecticides et 20 % avec des herbicides. Mais ramenés aux quantités utilisées, on s'aperçoit que les accidents sont plus fréquents avec les insecticides.
Les contaminations surviennent lors de toutes les phases d'exposition : la préparation, l'application et le nettoyage. ' Il n'y a pas vraiment de phase où il y a plus d'accidents. Par contre, les intoxications les plus graves se font lors de l'application : c'est à ce moment-là que le nuage de produit est le plus important ', considère Alexandre Nicolay, ingénieur conseil en prévention des risques professionnels à la caisse centrale de la MSA.
En fait, lors de l'application, les risques d'accidents dépendent du type d'appareil utilisé et de la protection de l'applicateur. Dans les dossiers de 2003 de la MSA, on trouve le cas d'un salarié viticole qui a développé une conjonctivite trois heures après le début d'un traitement avec trois fongicides. Il avait traité pendant dix heures d'affilée par forte chaleur, avec un pulvérisateur à jet projeté. La cabine de son tracteur n'étant pas climatisée, il l'avait ouverte. Du coup, à chaque demi-tour, il pénétrait dans le brouillard de pulvérisation. En outre, il ne portait qu'un masque à cartouche et compte tenu des températures, la MSA doute qu'il l'ait porté durant les dix heures du traitement.

Selon les statistiques de la MSA, 25 % des accidents surviennent avec un pulvérisateur à dos, alors que les surfaces traitées de cette façon sont minimes. Avec certaines matières, c'est un vrai danger. Le paraquat qui, en cas de fuites, provoque des brûlures dans le dos et sur la nuque, en est l'illustre exemple. C'est d'ailleurs ce qui a amené la MSA à déconseiller son utilisation avec les pulvérisateurs à dos.
Beaucoup de contaminations surviennent lorsque l'applicateur s'arrête quelques minutes pour fumer, s'alimenter ou boire, trois choses formellement interdites lors des traitements. D'autres accidents surviennent lorsque l'applicateur passe d'une zone peu contaminante à une zone très contaminante. C'est le cas notamment lorsqu'il quitte sa cabine filtrée sans protection, lors d'une panne mécanique ou pour déboucher une buse. ' Dans la précipitation, les vignerons utilisent le système D. Parfois, certains débouchent une buse à la bouche ou mettent les mains dans la cuve. '

' Lorsqu'une buse est bouchée, mieux vaut mettre des gants et utiliser des petits outils pour la déboucher. L'idéal est d'avoir un coffre avec des équipements de protection individuelle (EPI) à l'extérieur de la cabine et une petite cuve de rinçage ', conseille Alexandre Nicolay.
Reste à utiliser l'EPI qui convient au bon moment.
' Souvent, les vignerons se focalisent sur l'aspect respiratoire. Ils mettent un masque, car ils sentent les produits et ont conscience du danger. Mais ils ne protègent pas leur corps. Or, dans notre réseau, ce sont souvent des problèmes d'intoxications cutanées et d'allergies qui remontent. Les produits sont absorbés par la peau et provoquent des problèmes digestifs et des céphalées ', prévient Alexandre Nicolay. De plus, l'entretien et la conservation des EPI dans un local sec sont indispensables.
Lors de la préparation des produits phytosanitaires, dans la majorité des cas, les vignerons se protègent correctement. ' Ils ont bien identifié cette phase comme étant très contaminante, car ils utilisent les produits purs ', constate Alexandre Nicolay. Mais un accident est vite arrivé... Avec les gros conditionnements, le sac peut exploser ou se renverser. ' Ensuite, tout dépend de la protection et de la manière dont le vigneron va gérer le risque ', poursuit-il.
Par exemple, un dossier de toxicovigilance concerne un salarié de 40 ans, qui manipulait un insecticide de la famille des organophosphorés. Lors de l'ouverture du bidon, celui-ci lui a glissé des mains et est tombé au sol, cette chute provoquant une grosse projection de produit sur le visage. Le salarié portait des vêtements adaptés, mais pas de masque, ni de lunettes. Il a rincé son visage à l'eau, mais a ressenti une vive brûlure aux yeux. Atteint d'une kératite (infection), il a dû s'arrêter pendant huit jours. Il n'a pas eu de séquelles. Par la suite, il a porté les protections adéquates.
Une autre opération sujette aux accidents, et qui est peu considérée en viticulture, est celle du nettoyage. ' Les vignerons sont moins vigilants durant cette phase, car ils pensent qu'elle est moins contaminante ', remarque Alexandre Nicolay. Par exemple, croyant bien faire, certains rincent leur combinaison de type 5. Or, elles ne sont pas imperméables.

Alexandre Nicolay cite un autre cas d'accident survenu lors du nettoyage de la cuve d'un pulvérisateur : une bouillie à base de Lannate y était restée une nuit entière et la cuve était bouchée. Le vigneron, uniquement protégé de gants de chantier, est descendu dedans pour la nettoyer et a fait un malaise.
Tous ces exemples montrent que souvent, les accidents résultent d'une méconnaissance des risques, d'un manque de formation, de la manière de travailler ou du manque de protection. L'utilisation d'équipements de protection individuelle réduit les risques, mais ne les supprime pas. Le choix de produits moins toxiques, l'utilisation d'une cabine filtrée et climatisée, une bonne hygiène de vie (ne pas fumer, ni boire, ni manger pendant les traitements), le fait de ne pas traiter en pleine chaleur sont autant de facteurs qui limitent les risques.

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