Scientifique, député, ministre, sénateur, Joseph Capus s'est farouchement battu pour que l'appellation d'origine ne soit pas une simple indication de provenance.
Né à Marseille en 1867, Joseph Capus suit une formation d'agronome à l'Ecole supérieure de Grignon (Yvelines), dont il sort professeur d'agriculture. En 1897, il est nommé en Gironde, et intègre le Comice agricole et viticole de Cadillac. Son intérêt pour la vigne et le vin prend alors toute son ampleur et ne se démentira jamais.
Joseph Capus s'exerce d'abord sur le plan scientifique, puis parlementaire. A Cadillac, il travaille sur les maladies de la vigne, notamment sur le black-rot et sur le mildiou, avec Georges Cazeaux-Cazalet, le maire de la ville, au début du XX e siècle. Il crée la première station d'avertissements météorologiques, pour prévenir de l'approche des maladies.
Parallèlement, c'est l'un des promoteurs de la loi du 1 er août 1905 sur la répression des fraudes qui, dans le secteur du vin, interdit le mouillage et le sucrage, et lutte contre les falsifications. C'est un premier pas vers le respect de l'origine et de la qualité des vins.
A cette époque, deux thèses sur l'appellation d'origine s'opposent. Celle défendue par Joseph Capus qu'il qualifie lui-même de ' réaliste ', stipule que ' l'appellation d'origine n'est pas une simple indication de provenance : il s'y attache une certaine idée d'originalité et de qualité '. En face, la seconde thèse, majoritaire, établit que l'appellation d'origine indique l'origine, sans considérer autre chose, notamment ' les caractères du vin '. ' C'est la seconde, fausse et artificielle qui, fait incroyable, a longtemps triomphé ', relève Joseph Capus dans sa Genèse des appellations contrôlées.
En 1906, devant la Société des viticulteurs de France, réunie en congrès des appellations d'origine, Joseph Capus défend sa conception. ' Dans mon esprit, ce n'est pas l'origine seule que la loi doit défendre, mais la qualité ou, pour mieux dire, les caractéristiques du vin qui font son originalité. Je tenais à attirer l'attention sur le danger qu'il y aurait à accorder une appellation d'origine uniquement à cause de l'origine. '
Joseph Capus souligne l'importance des usages, des cépages et des sols. Il plaide en faveur de la dégustation, aidée de l'analyse chimique. Toute sa vie, il oeuvrera dans ce sens. Sa carrière politique et son oeuvre législative en témoignent. Il est député de Gironde de 1919 à 1928, ministre de l'Agriculture en 1924, sénateur de Gironde de 1930 à 1941. Il siège à la commission de l'agriculture, qu'il présidera en 1927. Il déposa plusieurs propositions de loi relatives à la protection des appellations d'origine. Dès son premier mandat, il est bien décidé à faire modifier la ' loi néfaste ' du 6 mai 1919, qui consacre notamment l'appellation d'origine comme un droit collectif de propriété, mais qui entraîne des abus.
La loi Capus du 22 juillet 1927 apporte des exigences nouvelles sur les usages locaux, loyaux et constants concernant les cépages, les façons culturales, les modes de vinification et d'élevage. Elle est améliorée par le décret-loi du 30 juillet 1935, qui crée les AOC et le Comité national des appellations d'origine (Cnao), organisme interprofessionnel (viticulture, négoce et pouvoirs publics) auquel sont délégués d'importants pouvoirs réglementaires.
En 1939, Joseph Capus crée, avec Maurice Salles, la Fédération des syndicats des grands vins de Bordeaux, afin de coordonner les efforts syndicaux de la région. Nommé président du Cnao (qui deviendra l'Inao), il organisa la défense de nos grands vins en France et à l'étranger.
Joseph Capus décède le 1 er mai 1947 à Paris.
BIBLIOGRAPHIE
' L'évolution de la législation sur les appellations d'origine '
' Genèse des appellations contrôlées ', Joseph Capus.
' Dictionnaire des parlementaires français ', J. Jolly.