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Désherbage thermique : une technique coûteuse

La vigne - n°163 - mars 2005 - page 0

Les rampes de désherbage thermique sont sûres aux yeux de leurs utilisateurs. Mais elles reviennent plus chères que celles de désherbage chimique. Avec certains modèles, on ne peut travailler qu'à faible vitesse, d'autres sont gourmands en combustible, ou occasionnent des brûlures à la vigne. Par ailleurs, si le spectre d'efficacité du désherbage thermique est équivalent à celui du chimique, son effet est moins persistant.


Le Centre d'expérimentation fruits et légumes de Midi-Pyrénées a testé la rampe Jaulent dans des vignes en coteaux. Pour une bonne efficacité, il conseille de passer le matériel à 2 km/h toutes les trois à quatre semaines. La largeur de désherbage est bien celle annoncée par le constructeur, soit 40 cm par brûleur. Le centre n'a constaté aucune brûlure de bourgeons, feuilles ou grappes sur ces vignes palissées à 2 m.
Bernard Coutelas, du lycée viticole de Blanquefort (Gironde), confirme ces propos : ' Je n'ai eu aucune brûlure. Le fil porteur est à 50 et 60 cm du sol. Le matériel fonctionne bien, mais la vitesse de passage est de 2 à 2,5 km/h seulement. C'est un inconvénient . ' La consommation pour un passage sur le rang est de 14 kg/ha environ. Il trouve le système pour changer les bouteilles pratique, et la sécurité à la pointe : s'il y a une coupure du brûleur, une électrovanne arrête tout immédiatement. ' En même temps qu'elle détruit les adventices, la rampe supprime les jeunes pampres, mais pas les complants, car les brûleurs ne restent pas assez longtemps devant chaque pied . ' Il conseille de vérifier la pression du gaz régulièrement, ainsi que les flexibles et les boulons.

La rampe Nofrost est différente des autres, puisqu'elle fonctionne au fioul. Ce système est pratique pour les Cuma : chaque utilisateur possède sa réserve de fioul, et recharge la cuve de la rampe avec. Cela évite d'avoir à multiplier les bouteilles de gaz. La Cuma de Jean-Jacques Smith, à Lury-sur-Arnon (Cher), a opté pour cet appareil. Le viticulteur a fait une adaptation pour monter la rampe sur un enjambeur. Suivant sa vitesse de passage, il consomme de 30 et 50 l de fioul par hectare. La cuve étant de 150 l, il a une bonne autonomie. La rampe n'est pas dangereuse, car ' il y a une sécurité '. Par contre, chaque fois qu'il passe devant un complant, soit il coupe le brûleur, soit le manchon de protection se rétracte. Il utilise la rampe pour épamprer, il lui suffit d'ouvrir une trappe. ' La chaleur monte sur 7-8 cm au-dessus du cône. Cela permet d'épamprer simultanément sans abîmer la baguette . '
La Cuma de Patrice Courret, à Saint-Eugène (Charente-Maritime), apprécie la souplesse d'emploi, la puissance et le faible coût d'utilisation de la rampe. Lui s'en sert au printemps, lorsque les adventices sont jeunes et qu'il ne peut pas désherber mécaniquement à cause du climat. En été, il privilégie le travail du sol pour éviter les incendies. A chaque passage, il consomme 30 à 35 l de fioul par hectare. La cuve de l'appareil étant de 300 l, l'autonomie est suffisante. Patrice Courret réalise deux passages par saison. Il n'épampre pas avec, car il ne s'en sert plus au moment de faire ce travail. Il a eu des difficultés d'allumage électrique, et a fait modifier la rampe, les viticulteurs de la Cuma la trouvant trop longue pour les manoeuvres.

Jean-Paul Serougne, chef de culture à Saint-Aubin-de-Branne (Gironde), emploie la rampe Onzain depuis six ans, du début de saison jusqu'à mai-juin, à 3 ou 4 km/h. A chaque passage, il consomme 70 kg/ha. Yves Heinzlé, de l'ITV de Mâcon, explique cette consommation : ' La maîtrise de la bulle de chaleur s'effectue par courant d'air. Il y a donc davantage de pertes . ' Grâce à ses sept citernes de 145 kg, Jean-Paul Serougne peut tenir une semaine. La rampe lui permet d'épamprer simultanément, sans avoir de réglage à faire. Il n'a pas de problèmes de brûlure sur sa vigne établie à 70-80 cm. Le principal inconvénient est la gestion des complants : ' Les protections (drains semi-rigides) sont insuffisantes et la chaleur brûle les plants. Avec des poches en plastique, c'est pire : elles fondent, puis prennent feu . '
Il regrette que la rampe ne soit pas à l'avant du tracteur, car ce serait plus pratique pour la conduite. L'entretien est simple : graissage des articulations et remplacement des pièces d'usure. Jean-Paul Serougne a comparé le coût de deux passages en chimique chez son voisin, et deux en thermique chez lui. ' Cela revient au même au niveau de la matière première . Le gaz coûte aux alentours de 0,70 euros/kg, et la location de la citerne 150 euros/an. ' Lionel Raymond, du château Lagarde (Gironde), est équipé de trois rampes Onzain depuis quatre ans. ' Nous avons essayé plusieurs systèmes, et c'est le seul qui ait une efficacité satisfaisante. L'appareil est fiable et puissant. ' Il passe la rampe de mi-février à mi-mai, soit en général trois passages. Ensuite, il préfère utiliser son Tournesol, outil de travail du sol Pellenc, pour ne pas provoquer de brûlure au niveau des grappes, ni d'incendie (couronne à 1,20 m). Il est équipé de bonbonnes de 600 l. Pour les descendre du plateau de l'enjambeur et les remplir, il utilise une pelle mécanique. Il ne se sert pas de la rampe pour épamprer, car elle est positionnée à l'arrière du porteur. Par contre, il fixe une épampreuse mécanique à l'avant, et réalise les deux opérations en même temps.

La rampe Richard-Breton n'a pas encore d'utilisateur, mais Yves Heinzlé, de l'ITV, l'a testée : ' Elle fonctionne bien. Elle est sûre, car l'alimentation des brûleurs se fait avec du propane gazeux, et non liquide. Il y a plus de sensibilité au niveau du système d'allumage. De plus, cette rampe ne consomme pas trop . ' En revanche, elle ne permet pas d'épamprer.

James Grégoire, de l'entreprise Grégoire, est viticulteur à Cognac (Charente). Il a monté la rampe sur sa machine à vendanger. ' Je désherbe trois rangs à la fois. Comme je passe à 3 km/h, ça va vite . ' La rampe fonctionne bien et son autonomie est bonne (560 kg). La consommation est de 45 à 55 kg/ha. La rampe pouvant se replier, il n'a pas de problème de maniabilité. James Grégoire ne passe donc qu'en début de saison, car dans les vignes basses, la chaleur grille les bourgeons ou les grappes situées à 30 ou 40 cm du sol. De même, il ne peut pas épamprer.
Jean-Jacques Jacquiaud, à Saint-Quantin-de-Rançanne (Charente-Maritime), a fait le même constat : ' En été, les herbes sèches s'enflamment, brûlent les raisins et les feuilles jusqu'à 80 cm du sol, mais c'est minime . ' Il passe à 2,5 km/h un rang sur deux, car il désherbe mécaniquement le deuxième. Il effectue quatre passages par campagne. En été, mieux vaut passer tôt le matin sur la rosée ou après un orage, ou être équipé d'un tracteur avec une cabine climatisée. ' Sinon, la chaleur de la rampe me brûle les jambes, et les herbes qui crament font beaucoup de fumée . ' Il consomme environ 45 kg/ha s'il désherbe tous les rangs et dépense 110 euros/ha pour passer un rang sur deux. En inclinant les brûleurs, il est possible d'épamprer les jeunes pampres simultanément, sur 25 à 30 cm, soit une économie de 50 % de temps à l'épamprage. Jean-Jacques Jacquiaud nettoie les gicleurs. Le circuit électrique de la sécurité vient de tomber en panne.

Vincent Bliard, des champagnes Bliard (Marne), fixe la rampe Souslikoff à l'arrière de sa chenillette Mafroco. ' Je suis satisfait, même si j'espérais que ce serait une alternative au labour ou au fauchage. En réalité, c'est un complément . ' Il effectue trois passages par an, à 3 km/h. Sa consommation avoisine les 50 kg/ha/passage. Comme son appareil est équipé de quatre bouteilles de 13 kg, son autonomie est faible. Le seul entretien est le changement des flexibles (une fois en cinq ans). Il a eu une panne de l'allumage électrique, réparée par le constructeur. Il n'a jamais eu de souci de sécurité avec l'appareil, mais il préfère le passer lui-même. La rampe n'abîme pas les pieds. ' Cependant, si un bourgeon est pris dans la flamme, il mourra. Mais dès qu'il a atteint 2-3 cm, l'apex est rarement touché et le sarment continue à pousser. De même, si une grappe basse est prise dans la flamme, sa peau va durcir, mais la maturité continuera. ' Par contre, il ne peut pas épamprer avec, ce que confirme Michel Valton, viticulteur bio à Aubertin (Pyrénées-Atlantiques). Il utilise la rampe en alternance avec des interceps et une épampreuse mécaniques. Pour lui, le principal atout du thermique est la vitesse de passage, plus élevée qu'avec des interceps mécaniques : environ 4 km/h. Il est équipé de quatre bouteilles de 13 kg, mais il préférerait une de 100 l. Le système de fixation des bouteilles n'est pas au point : sur les terrains caillouteux, elles bougent et ne se vident pas entièrement. Il faut sans cesse les remettre en place. Il regrette que l'appareil ne soit pas muni d'un système de réglage de l'écartement des brûleurs, car il a des interrangs dont les largeurs sont différentes.


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